300 personnes se sont donné rendez-vous ce dimanche 4 juin en début d'après-midi à Saint-Louis (Haut-Rhin). Ils ont manifesté contre la dégradation chronique de la prise en charge médicale dans cet établissement géré actuellement par le GHRMSA (Groupement hospitalier de la région de Mulhouse et du sud Alsace).
Ils se sont donné rendez-vous sur le parvis de l'hôtel de ville de St-Louis (Haut-Rhin). Des habitants de cette région frontalière, des retraités, des médecins et des élus locaux.
Tous dénoncent, ce dimanche 4 juin, la dégradation de l'offre médicale dans l'ancienne clinique des Trois Frontières, reprise et gérée depuis janvier 2023 par le GHRMSA (Groupement hospitalier de la région de Mulhouse et du sud Alsace). Les griefs s'accumulent : la fermeture du bloc opératoire pourtant flambant neuf, le départ de nombreux spécialistes, le fonctionnement intermittent du service des urgences.
Une gare de triage
Ces derniers mettent clairement en cause le GHRMSA, mais également l’ARS (Agence Régionale de Santé) les accusant d’organiser "la désertification médicale du secteur." Cette dernière a d'ailleurs labellisé, en avril dernier, l’établissement en "hôpital de proximité : une porte d'entrée dans le système de soins".
Une simple porte d'entrée qui justifierait donc, implicitement, la disparition du plateau technique, qui ne constitue pas l'un des critères d’un hôpital de proximité. "C'est une question de justice pour la population, d'égalité d'accès aux soins", explique le docteur Ventré, gastro-entérologue "Il faut renouer le dialogue avec le ministère. Nous demandons un vrai service de médecine, un service des urgences calibré comme il faut pour éviter les fermetures régulières, la situation actuelle est vraiment très dangereuse."
Claude Frantz, ancien pharmacien de la clinique, est en première ligne du cortège. "Cet hôpital de proximité n'est finalement plus qu'une gare de triage. On a besoin, pour 83.000 habitants, d'une structure hospitalière qui soit plus adaptée à la population. L'offre de soins qui est proposée n'est pas correcte. J'en discutais avec des médecins généralistes, ils sont obligés de transférer des patients de plus en plus loin : Colmar, Strasbourg, Belfort, Montbéliard. Aujourd'hui, le gamin qui se fait mal au foot le dimanche après-midi, ben s'il doit être soigné, ce sera sur Mulhouse ou ailleurs, où il y a la place, où on veut bien le prendre surtout, et c'est ça le gros problème que rencontrent tous les généralistes du coin qui ne savent plus à qui adresser les patients."
On a besoin, pour 83.000 habitants, d'une structure hospitalière qui soit plus adaptée à la population. L'offre de soins qui est proposée n'est pas correcte
Claude Frantz, pharmacien
Un état de fait qui complique sérieusement le quotidien des habitants. Ils sont tout de même 90.000 à constituer ce bassin de population. Tous doivent désormais aller à Mulhouse pour la plupart des rendez-vous avec des spécialistes (urologie, orthopédie, gastro-entérologie) ou leurs examens alors même que l'hôpital de Mulhouse sature. "Trois à quatre mois de délai" dans la spécialité du docteur Ventré.
Les séniors, présents en grand-nombre ce dimanche, ne cachent pas leurs inquiétudes. À l'image de ce monsieur. "Je suis venu malgré la fête des mères. Est-ce que c'est utile, je n'en sais rien. Il n'y a plus rien à Saint-Louis. Pour le moindre truc, il faut aller à Mulhouse. La dernière fois que je suis allé aux urgences de Saint-Louis, une chance, elles étaient ouvertes ce jour-là, je suis rentré à 14h et je suis sorti à 21h. Il y avait un seul médecin, en plus il devait faire la nuit. Combien de temps, il va tenir ? Il m'a fait comprendre pas longtemps non. Dans le temps, c'était un super hôpital avec maternité, il y avait tout, maintenant, il n'y a plus rien, même plus de médecin".
Dans le temps, c'était un super hôpital avec maternité, il y avait tout, maintenant, il n'y a plus rien, même plus de médecin
Mise en danger de la vie d'autrui
Cette contestation est aussi menée sur le terrain judiciaire, avec la plainte contre X déposée, mardi 30 mai, par le conseiller communautaire de Saint-Louis agglomération, Patrick Striby, pour mise en danger de la vie d’autrui. Présent lui aussi ce dimanche, il ne comprend pas la décision de l'ARS. "J'espère déjà éveiller les consciences, montrer que quand on prend des décisions administratives qui ont un impact direct sur la vie des gens, même sur l'espérance de vie des gens, ben que tout ça il doit y avoir une forme de responsabilité. On constate, depuis début janvier, depuis la reprise de l'hôpital, qu'il y a des décès, des pertes de chances pour la population. Parfois quand on envoie une personne âgée d'un endroit à l'autre sans un véritable suivi, c'est une forme de maltraitance et tout ça, ça doit être soumis à la justice, c'est elle qui doit décider si oui ou non, il y a bien mise en danger de la vie d'autrui."
On constate, depuis début janvier, depuis la reprise de l'hôpital, qu'il y a des décès, des pertes de chances pour la population
Patrick Striby, conseiller communautaire
"C'est un outil parmi d'autres, un outil de responsabilité. On espère aussi quand même que ça fasse bouger les choses parce que le ministre est également cité dans la plainte, la ministre déléguée, l'Agence régionale de santé, le repreneur sont cités dans la plainte. On souhaite vraiment que la justice fasse son travail et surtout que les choses changent."