Pas de portable au collège : 200 établissements français expérimentent la pause numérique en 2024. Les téléphones sont proscrits en classe bien sûr, mais aussi dans les couloirs et la cour de récréation. À Ensisheim en Alsace, parents et élèves apprécient la mesure.
Quelque 200 élèves de 6ᵉ ont passé la grille de leur collège à Ensisheim (Haut-Rhin) ce lundi 2 septembre, des jeunes adolescents invités à éteindre leurs portables dès le premier jour. Les plus grands devront faire de même dans cet établissement pilote "pause numérique". La règle de conduite "sans portable" s’impose dans tout le collège et s’accompagnera d’un discours de sensibilisation aux méfaits des écrans.
En ce jour de rentrée, la mesure ne choque personne, bien au contraire. Les parents approuvent. "C’est pas une mauvaise chose parce qu’ils passent beaucoup de temps sur leur téléphone. Nous, on n’avait pas ça à l’époque et on a très bien vécu. Ils discuteront peut-être un peu plus ensemble au lieu d’être tout le temps sur les réseaux sociaux", commente un papa. Sa fille, qui entre en 6ᵉ, hausse les épaules et ajoute : "Je sais pas quoi en penser… Moi de toute façon, je ne l’utiliserai pas."
Une maman renchérit : "C’est une idée géniale, je suis pour à 100%. Parce que de nos jours, ils sont tout le temps sur leur téléphone. Ça leur apprendra à faire autre chose de leur journée et c’est très bien !" Un peu comme si le collège venait au secours des parents.
Une loi inappliquée depuis 2018
Faut-il le rappeler ? Une loi interdit les téléphones portables dans les collèges depuis 2018. Mais elle est difficile à appliquer. Et à Ensisheim, plusieurs incidents ont eu lieu l’an passé et perturbé la vie de l'établissement : une bagarre filmée dans la cour, un "tracker" posé sur un téléphone par un parent pour écouter les cours à distance…
De quoi pousser l’équipe administrative à réfléchir à des solutions pour faire respecter la loi. "Quand on a vu passer la circulaire sur la pause numérique, on s’est dit, là il y a peut-être moyen de faire quelque chose. Mais on ne savait pas qu’on serait pilote et les seuls dans le département !", sourit Isabelle Anastasi, principale du collège Victor Schoelcher.
La question qui se pose désormais est d’ordre technique et financier. Où déposer les téléphones pendant les heures passées au collège ? Pour l'heure, la solution n'est pas trouvée. "Il est possible d’insérer des petits casiers numériques dans les casiers existants. Mais il faut réfléchir aux élèves externes qui n’ont pas de casier en installant des colonnes de petits casiers numériques," explique la principale. D’autres solutions sont à l’étude comme l’utilisation de pochettes verrouillées par l’élève et qui se déverrouille à une borne numérique.
Mais tout cela a un coût et n’est pas financé à ce stade. En attendant une solution pérenne, l’établissement s’engage dans un trimestre expérimental avec des téléphones qui resteront éteints dans les cartables, le tout accompagné d'une grande action de sensibilisation.
On voudrait que les élèves apprennent à vivre sans leur téléphone au collège et qu’ils y soient plus heureux. Il n’est jamais trop tard pour bien faire.
Isabelle Anastasi, principale du collège Victor Schoelcher d'Ensisheim
L’ensemble des enseignants est appelé à se mobiliser. Des actions seront menées dans toutes les disciplines pour inciter les élèves à un usage raisonné du portable, les former aux dangers des réseaux sociaux, à la gestion des fake news. Des tables rondes seront également organisées avec les parents, car le but est que l’usage raisonné perdure quand les élèves rentrent à la maison le soir.
"On voudrait que les élèves apprennent à vivre sans leur téléphone au collège et qu’ils y soient plus heureux. Il n’est jamais trop tard pour bien faire. Les adolescents sont en pleine croissance, ils apprennent tout le temps, ils peuvent aussi apprendre ce qu’ils ne font pas bien et ce qu’on peut mieux faire pour vivre mieux", assure la principale du collège.
Les 760 collégiens d’Ensisheim sont désormais embarqués dans cette aventure de pause numérique. Un 2ᵉ collège pilote existe en Alsace, celui de Mutzig dans le Bas-Rhin.