Le Haut-Marnais de 49 ans, licencié au Langres Haltérophilie Musculation, a remporté le titre mondial de sa catégorie dans un contexte inédit : dans sa salle d'entraînement, avec ses proches pour seul public et face à une caméra.
C'est une année décidément particulière. Alors que les collégiens et lycéens ont découvert les cours en ligne, que les plus grands se sont mis au télétravail, Claude Rollée a lui expérimenté les championnats du monde d'haltérophilie... en visioconférence.
Le jeudi 27 mai dans la salle de son club le Langres Haltérophilie Musculation, Claude Rollée soulève ses barres face à une caméra. À l'autre bout du monde, des juges valident sa performance sur leur écran de contrôle. En raison du Covid, la fédération internationale a décidé de ne pas rassembler les athlètes et de les faire concourir chacun chez eux. Arraché puis épaulé-jeté, Claude Rollée donne tout ce qu'il a malgré le contexte et parfois de mauvaises surprises.
"Juste une caméra, mes entraîneurs, ma femme..."
"J'ai réussi à faire 132 kilos à l'épaulé-jeté et 104 kilos à l'arraché. Mais comme j'ai bougé un peu pendant mes mouvements, je suis sorti du cadre de la caméra et les juges n'ont pas validé toutes mes barres."
Le côté logistique a été notamment géré par Adeline Cristofoli. Pour elle aussi, cette compétition virtuelle a été une grande première.
Notre premier stress, c'était que la connexion internet ne tombe pas en panne
"Il a fallu s'adapter de la pesée jusqu'à la fin de la compétition, raconte Adeline Cristofoli. L'organisateur de la compétition était en Irlande, les arbitres étaient chacun chez eux aux quatre coins de l'Europe, il y avait même une dame aux États-Unis au début. Alors il a fallu filmer le passeport de Claude pour prouver que c'était bien lui. On a réglé la balance en direct, on a pesé Claude puis on a filmé les poids, la barre, pour montrer que les poids étaient des vrais poids, que la barre faisait bien 20 kilos, que tout était bien réglementaire au niveau du plateau. C'était très très minutieux."
Au bout de l'effort, Claude Rollée valide finalement 127 kilos à l'épaulé-jeté et 97 kilos à l'arraché : il est en tête de la compétition réunissant les haltérophiles européens. Une magnifique performance dans ce contexte particulier.
"Habituellement, dans une compétition, il y a sa famille dans la salle, les amis, le public, les autres compétiteurs, son entraîneur... C'est cette ambiance qui nous galvanise. C'est la consécration de réussir quelque chose devant eux. Là, il n'y avait rien de tout ça ! Juste une caméra, mes entraîneurs, ma femme... On était cinq en tout. C'est difficile de se transcender dans ces conditions, de faire monter l'adrénaline. Alors mon entraîneur m'a foutu des baffes pour me motiver. Et puis, j'ai vu la fierté dans les yeux de ma femme, ça m'a aidé."
En compétition le jeudi, sacré seulement le lendemain
Il faut pourtant attendre pour se réjouir. En raison du décalage horaire, les haltérophiles du continent américain ne concourent que le lendemain. Finalement, la délivrance arrive le vendredi : Claude Rollée est bien champion du monde des moins de 50 ans, dans la catégorie moins de 89 kilos.
"C'est beaucoup de fierté parce que ça a été vraiment dur au niveau travail. Pendant le confinement, s'entraîner tout seul dans le garage, c'est assez compliqué pour se motiver. J'allais voir mon entraîneur à Langres, mais sans les collègues d'entraînement, tout seul, la motivation n'est pas toujours là. Et malgré tout, il fallait s'astreindre à des gros entraînements pour garder le niveau. J'en faisais 4 ou 5 dans la semaine, le dimanche matin aussi. Tout ça à gérer avec mon entreprise... Ça n'a pas été facile et il y a d'autant plus de fierté."
Déjà sacré quatre fois champion de France, vice-champion d'Europe en 2016, troisième des championnats du monde à Barcelone en 2018, Claude Rollée a inscrit, à 49 ans, la plus belle ligne de son palmarès. Une immense satisfaction pour son entraîneur Jean-Louis Gudin.
"C'est un titre qu'on n'attendait pas. On savait que Claude était dans le top 10 mais de là à gagner... C'est un immense accomplissement pour Claude, d'autant que c'est un chef d'entreprise qui s'entraîne après le travail, c'est loin d'être évident. Donc pour lui, pour nous, le club, la ville de Langres c'est une grande satisfaction."
"Ce titre va faire du bien au club"
La victoire de Claude Rollée permet au club de remporter son premier titre de champion du monde. Par le passé, des athlètes langrois ont déjà obtenu de belles performances aux Jeux Olympiques (comme Benjamin Hennequin, sixième à Pékin), des podiums mondiaux et même un titre de champion d'Europe avec Brandon Vautard à l'épaulé-jeté en 2018. Ce nouveau trophée dans les vitrines devrait permettre d'attirer encore de nouveaux jeunes.
"Ce titre peut apporter au club. On va faire des démonstrations d'haltérophilie pour les jeunes cet été et Claude sera avec nous. Ça va peut-être donner envie à des jeunes de nous rejoindre. On en a besoin parce qu'avec la pandémie, on a un peu perdu le contact avec nos licenciés. Ce titre va faire du bien au club, ça c'est clair."
La prochaine étape pour Claude Rollée l'emmènera à Tokyo au Japon pour les Masters Games. Une compétition mondiale que le vétéran abordera avec le nouveau statut de champion du monde de sa catégorie.