Les ponts sont des ouvrages d'art fascinants. Nombreux sont ceux qui les empruntent sans jamais se poser la question du comment ou du pourquoi de leur création. D'autres, plus contemplatifs, se sont penchés sur leur histoire. C'est le cas d'un Haut-Rhinois, Jean-Pierre Burckel.
Dans son bureau de Village-Neuf, on ne voit que ça, des trophées de pêche à la mouche. Jean-Pierre Burckel est un grand mordu. Il a participé à des compétitions dans toute l'Europe. Si le coronavirus n'était pas venu contrarier ses projets, il serait à l'heure actuelle en train de pêcher la truite en Slovénie avec son épouse.
Jean-Pierre Burckel est un homme de rivères et l'homme d'un fleuve, le Rhin, qui s'écoule à quelques mètres de chez lui, dans le coin des Trois frontières. Il y vient souvent admirer les ponts qui l'enjambent. C'est une histoire familiale qui a conduit ce Haut-Rhinois à des recherches plus approfondies. Sa mère lui racontait que pendant la guerre, les soldats allemands venaient chercher la main d'oeuvre alsacienne dans le cadre du STO, le service de travail obligatoire, pour l'emmener dans les usines allemandes. Sa mère se souvient avoir traversé le pont de bâteaux de Huningue tous les matins sous bonne escorte. Ce souvenir familial a conduit Jean-Pierre Burckel à lancer des recherches sur les premiers ponts sur le Rhin, des ponts en bois appelés ponts de bâteaux. Ils étaient constitués de plusieurs barques à fond plat surmontées de poutres et d'un tablier de planches de bois.
Jean-Pierre Burckel, habitué des sites de vente aux enchères, a trouvé au fil du temps des centaines de cartes postales anciennes représentant ces ponts en bois. Il en a recencé 26 entre Huningue et Arnhem aux Pays-Bas, construits depuis le XVème siècle et dont les techniques ont évolué jusqu'à leur disparition après la Deuxième Guerre mondiale. Peu pratiques, ils demandaient des manipulations fastidieuses pour laisser passer les péniches. Ils présentaient surtout l'avantage d'être démontables en cas de conflit armé.
Le pont de bateaux de Huningue a été victime d'une inondation en 1949. Il a ensuite été remplacé par un bac qui reliait les deux rives et enfin par un pont routier en béton dans les années 70. Jean-Pierre Burckel a fini par éditer un livre sur ces fameux ponts de bâteaux. On y retrouve toute sa collection de cartes postales. Ce livre extrêmement bien documenté ouvre la voie à d'autres publications. Jean-Pierre Burckel travaille déjà sur un nouvel ouvrage consacré à tous les autres ponts sur le Rhin, routiers, ferroviaires, destinés aux piétons ou aux vélos. Il sera prêt dans quelques mois, quand la saison de la pêche à la mouche sera terminée?