Pour cet été perturbé par le coronavirus, les vacanciers plébiscitent le camping-car. Le véhicule, symbole de liberté, n'a jamais autant fait rêver qu'après le confinement. Et surtout, il permet de voyager en respectant les gestes barrières. Les ventes ont explosé chez certains concessionnaires.
Éviter les contacts mais partir en vacances quand même, c'est le dilemme de l'été pour de nombreux Français. Et pour faire face aux angoisses liées au coronavirus, certains ont tranché : ils voyageront, oui, mais en camping-car.
"Ca n'arrête plus, lâche Sébastien Couset entre deux rendez-vous. On est surbookés". Ce patron d'une concession qu'il a fondée en 2012 à Duttlenheim, dans le Bas-Rhin, croule sous les appels et les visites de clients depuis la mi-juin. En plus des achats reportés à cause du confinement, il enregistre l'arrivée de nombreux nouveaux clients.
Le coronavirus gonfle les ventes
"Du 15 au 20 juin, en cinq jours à peine, toutes nos offres de location étaient complètes jusqu’à fin août, et la tendance est la même pour les ventes, détaille l'un de ses vendeurs, Jeannot Schmitt. Les gens ont peur de séjourner dans des hôtels, d’aller dans des piscines. Ils veulent éviter de croiser trop de monde, sans pour autant renoncer aux vacances avec leurs enfants. Le camping-car incarne la liberté, ils peuvent aller où ils veulent, quand ils veulent."En cinq jours à peine, toutes nos offres de location étaient complètes jusqu’à fin août, et la tendance est la même pour les ventes.
Le coronavirus dope ainsi les ventes : plus 20% en juin par rapport à l'année dernière dans cette concession. Et c'est pareil dans toute la France. Au point que Michel Froger a dû se déplacer en Alsace depuis sa ville du Mans pour récupérer son fourgon acheté 50.000 euros. "Ce sont des véhicules très prisés, il n'y avait plus aucun modèle disponible dans les concessions autour de chez moi. J'ai regardé sur internet et le dernier véhicule qui restait, c'était celui-là, en Alsace", confie ce client, qui admet que le confinement a été un facteur déclenchant pour accélérer un achat déjà envisagé, mais pas avant plusieurs années. "On a besoin d'air et d'évasion", sourit-il.
Une envie de liberté partagée par tous les nouveaux propriétaires de ces véhicules de vacances. Pour Raphaël et Marie-Louise Kempf, le camping-car est même synonyme de nouvelle vie. "Profiter", c'est désormais leur credo : "J’ai été atteint par le virus et hospitalisé sous oxygène pendant une semaine. J’ai aussi perdu un très bon ami à cause de cette saleté de coronavirus. Alors j’ai dit, maintenant ça suffit, il faut qu’on prenne du temps pour nous, avec ma femme. On a vu ce camping-car il y a trois, quatre semaines. Cela correspondait parfaitement à ce qu’on cherchait, alors on a décidé de foncer", se réjouit ce boulanger colmarien.J’ai été atteint par le virus et hospitalisé sous oxygène pendant une semaine. Alors j’ai dit, maintenant ça suffit, il faut qu’on prenne du temps pour nous.
Le secteur du tourisme doit s'adapter
Pour répondre à cette vague de camping-caristes, le secteur du tourisme doit s'adapter. À Obernai, le camping municipal a anticipé : la physionomie du camping a été revue pendant les mois de fermeture forcée. Davantage d'emplacements ont été stabilisés pour permettre au camping d'accueillir plus de camping-cars. "Ils sont de plus en plus nombreux depuis cinq, six ans", explique Bernard Fischer, le maire de la ville. Et les responsables du site se préparent à voir arriver cet été encore plus de nouveaux campeurs que d'habitude.Mais certains professionnels s'inquiètent de cet intérêt massif pour le camping-car. Michel Martzloff, patron d'une concession à Bernolsheim (Bas-Rhin), se méfie de cet effet de mode. "Les achats sont bouclés beaucoup plus rapidement qu'en temps normal. Généralement, les clients prennent le temps de réfléchir avant de faire leur choix. Ce n'est plus le cas en ce moment", assure-t-il.
Et ces "achats précipités" soulèvent selon lui de nombreuses questions : "Est-ce que les clients ont acheté le véhicule qui leur convient vraiment ? On verra d’ici un an. Mais certains risquent de faire marche arrière et de privilégier à nouveau l'avion, les croisières ou le train. Et s'ils revendent leur camping-car, leurs acheteurs seront autant de clients perdus pour nous."Est-ce que les clients ont acheté le véhicule qui leur convient vraiment ? On verra d’ici un an.
Une perspective qui l'angoisse, d'autant qu'il a dû embaucher deux salariés pour être en mesure de répondre à toutes les sollicitations. Des clients qu'il qualifie pour beaucoup de "rêveurs" : "les gens viennent ici en disant vouloir acheter, on leur consacre beaucoup de temps mais souvent, ça ne va pas plus loin parce qu'ils ne se rendent pas compte qu'il faut compter au moins 50.000 euros pour un véhicule digne de ce nom".
Pour les déçus, une idée de compromis : la location. Comptez pour cela entre 70 et 150 euros en moyenne par jour selon les modèles et la saison. Cela vous permettra en plus de vous familiariser avec le camping-car avant peut-être un jour, d'aller plus loin, si affinités...