Alors que les dépenses quotidiennes ne font qu’augmenter (carburants, produits alimentaires, loyers) les vide-greniers deviennent de plus en plus indispensables pour les ménages. Reportage à Châlons-en-Champagne, dimanche 3 avril 2022, au quartier Madagascar.
L’espace d’une journée, froide mais ensoleillée, le petit quartier Madagascar à Châlons-en-Champagne (Marne) s’est transformé en marché à ciel ouvert dimanche 3 avril. De chaque côté des rues pavillonnaires, les exposants ont rassemblé, sur des tables ou à même le sol, les objets dont ils souhaitent se débarrasser. Les grands classiques : bijoux, livres, jouets, vêtements, meubles, livres, capsule de champagne, absolument tout est à vendre.
En raison de la pandémie de Covid, cela faisait deux ans que le quartier n’avait pas connu une telle affluence. Ce retour fait du bien pour le moral, mais surtout pour le porte-monnaie des vendeurs et des acheteurs. Car l'époque est aux économies. Carburant, énergie, produits alimentaires, depuis plusieurs mois les dépenses des ménages grimpent. D’après l’INSEE (Institut national de la statistique et des études économiques) l’inflation générale a augmenté de 4,5% en seulement un an. Alors forcément, les vide-greniers deviennent encore plus attractifs. Vitaux, pour certains.
Au milieu du brouhaha des passants, Abdel cherche la bonne affaire. Après plusieurs hésitations, il décide de s’arrêter à un stand. Les vêtements pour enfants semblent attirer son attention. Après une fouille minutieuse et une négociation rapide, le voilà reparti avec trois pantalons pour ses jumeaux. L’opération ne lui a coûté que 6 euros. « C’est vraiment intéressant surtout pour des pantalons qui n’ont presque jamais été portés. Je me suis fixé un budget de 20 euros maximum. Je ne peux pas me permettre de dépasser ce montant. »
Traquer les économies
Salarié dans l’industrie, Abdel gagne 1 400 euros nets par mois. Sa femme n’a pas encore trouvé de travail. « Même si on ne se plaint pas, depuis plusieurs années, c’est de plus en plus difficile. Sur mon salaire, je dois enlever 200 euros pour l’essence, 300 euros pour rembourser un crédit et 500 euros pour le loyer. Les fins de mois sont compliquées ». Pour faire face, le père de famille traque les économies : "Je regarde toujours sur Internet pour savoir quand un vide-greniers aura lieu à côté de chez moi. C’est devenu une habitude ».
À quelques pas de là, un jeune couple sillonne les allées. Karim et Sabine sont eux aussi à la recherche de « bonnes affaires ». Dans ses bras, la mère de trois enfants tient un t-shirt de marque payé 25 centimes. « Je viens au souvent aux vide-greniers. J’achète, je vends, je suis une adepte. » S'ils s’en sortent financièrement, la jeune femme avoue faire des concessions au quotidien : « Maintenant, on réfléchit à deux fois avant de sortir ou d’acheter des choses pour nous. Pour le carburant par exemple, on essaye d’optimiser nos déplacements pour rentabiliser au maximum l’essence. »
Si les vide-greniers attirent les consommateurs, ils sont aussi avantageux pour les vendeurs. Dans l’allée parallèle, Patrick et Laurence attendent patiemment sur leurs chaises pliantes les prochains acheteurs. C’est leur première brocante à Châlons-en-Champagne (Marne). Ils ont réussi à vendre pour 150 euros d’affaires en tout genre : « Cela nous fait un petit pécule et puis cela permet aux gens de repartir avec des objets sympas", explique Patrick.
Un peu en retrait Laurence rajoute : « Avec cet argent, on va pouvoir se payer deux ou trois restaurants, se faire plaisir parce que c’est un peu juste avec nos deux retraites. Moi, je gagne 900 euros par mois. » Et le couple de retraités ne compte pas s’arrêter là. Ils envisagent déjà de participer au prochain vide-greniers qui aura lieu le 30 avril prochain.
Nouvelle hausse des prix attendue
Patrick, Laurence, Sabine et les autres vont devoir multiplier les astuces, dans les mois qui viennent. Selon l’estimation provisoire réalisée en fin de mois par l'Insee, les prix à la consommation augmentent de 3,6 % en février 2022, après +2,9 % le mois précédent. "Cette hausse de l’inflation résulterait d’une accélération des prix de l’énergie, des services, des produits manufacturés et de l’alimentation. La légère baisse des prix du tabac sur un an serait la même qu’en janvier", précise l'Insee.
Sur un mois, les prix à la consommation augmentent de 0,7 %, après +0,3 % en janvier. "Je pense désormais que la hausse des prix en France sera vraisemblablement deux fois plus forte, aux alentours de 5 à 8 %», prédit Michel Biéro. Le principal dirigeant de Lidl en France, interrogé par nos confrères d'Aujourd'hui en France, s'attend à des difficultés sur l'approvisionnement en poulets et en œufs. Résultat de la guerre en Ukraine, grand producteur de poulets et d'aliments pour les animaux.