C'est le cœur gros que le gérant du Palace, le seul cinéma de la cité sparnacienne, est contraint de fermer ses portes à partir du 28 juillet.
"Nous serons fermés à partir du 28 juillet au soir, jusqu'à ce que ça aille mieux." Au téléphone, le directeur du Palace, le cinéma d'Epernay, garde une voix enjouée. "Je suis un garçon plutôt optimiste, j'essaie de voir à demain, dit-il posément. Si on voit que les feux passent au vert, on a la réactivité pour rouvrir en deux jours." Ce lundi 27 juillet, le cinéma le Palace a annoncé sa fermeture temporaire jusqu'à ce que la situation le permette. Avec une fréquentation très inférieure aux années précédentes, la structure perd trop d'argent pour rester ouverte. "Nous avons beaucoup de frais fixes, comme la climatisation, l'électricité, le nettoyage des salles", énumère Daniel Castaner.Il faut dire que depuis la réouverture le 22 juin dernier, les cinéphiles ne se sont pas bousculés pour revenir dans les salles obscures. Celles d'Epernay ont vu un félchissement de -70% durant les semaines qui ont suivi le 22 juin, pour arriver à -80% la semaine dernière. "D'habitude, on oscille autour des 175.000 entrées par an, soit le double de la moyenne nationale, ce qui est très bon", se félicite le Sparnacien. A tel point que sur les réseaux sociaux, les messages de sympathie sont nombreux. Après avoir annoncé la nouvelle sur Facebook, les gérants ont reçu une centaine de commentaires, de soutien pour la plupart : "J'avais hâte de pouvoir aller au cinéma, mais je vais devoir attendre, écrit une internaute. Bon courage pour la suite et j'espère vous revoir bientôt" ou encore "Bon courage à vous, il faut tenir le coup et on espère voir de nouveau vos salles pleines à la rentrée !!" témoigne une autre.
Un après confinement difficile et peu de sorties alléchantes
Les temps sont difficiles pour les cinémas en France. La faute aux têtes d'affiches étrangères, dont les sorties ont été repoussées à la rentrée voire à l'automne prochain. Ajouté à cela, des sorties françaises peu présentes dans les médias. "L'été 85, Scouby ! et d'autres sont présents en salles mais il n'y a pas assez de sorties inédites pour attirer les spectateurs au cinéma", explique la Fédération nationale des cinémas français (FNCF). Toujours selon cette fédération, le cas du Palace est loin d'être isolé : en moyenne, la fréquentation des cinémas en France est estimée à -70%."Même au sein des plus gros circuits… tout le monde est très inquiet. Si la situation s'éternise sans plan de soutien, ce n'est pas que le cinéma d'Epernay qui va fermer, beaucoup suivront", regrette le directeur du cinéma du centre-ville de Reims, Opéraims, qui constate également une forte baisse de fréquentation dans la cité des sacres.
"Il ne suffit pas simplement d'ouvrir, il faut aussi proposer des films qui plaisent au public", assure Daniel Castaner. Nous proposons pourtant Madre, un film espagnol magnifique, qui aurait fonctionné habituellement. On attendait plus d'un film plus grand public comme Divorce, de Mickael Young, mais il y a beaucoup moins de promotion qu'habituellement." Seulement, après plus de 5 millions d'euros de coûts de rénovation l'année passée et un système économique indépendant, rester ouvert coûte près de 60.000 euros par mois de charges.
Les deux directeurs constatent également un effet "post-confinement". "Il y a des gens, qui malgré le protocole sanitaire, disent qu'ils ne veulent pas se retrouver une salle close. Après un confinement de trois mois, d'autres ont envie d'extérieur, de voir la famille ou de faire la fête", affirment les deux directeurs.
A Reims, le directeur de l'Opéraims a décidé de maintenir son établissement ouvert mais en réduisant les plages d'ouverture. Habituellement accessible de midi à minuit (cela dépendait des séances), l'établissement accueille désormais les visiteurs entre 14h et 23h. "Cette année, je n'ai pas embauché de saisonnier et le personnel en congé n'est pas remplacé", explique Stéphane Rezki. Et le Rémois de trancher : "On n'imagine pas cesser le service qu'on propose. Même si la fréquentation n'est pas au rendez-vous. C'est un choix." Selon la FNCF, jamais les cinémas français n'avaient enregistré pareille chute de fréquentation en 120 ans d'existence.