Après 23 ans d'exercice dans l'établissement, le médecin qui soignait le tétraplégique Vincent Lambert a raccroché sa blouse blanche ce jeudi 28 août 2014. Eric Kariger, qui dirigeait le service des soins palliatifs, explique qu'il ne supportait plus la pression autour du cas de son patient.
"A un moment j'ai franchi mes limites". Eric Kariger s'est confié au micro de Thomas Sotto dans la matinale d'Europe 1. Le médecin part travailler dans un établissement privé, alors que le cas de Vincent Lambert, ce jeune homme en état de conscience minimale, n'est toujours pas réglé. En juin, la Cours Européenne des Droits de l'Homme a suspendu en juin l'arrêt des soins décidé par la justice française.
Cela ne méritait pas que j'y laisse ma peau
"Je me suis retrouvé à avoir de vilaines pensées. Je me suis dit que ça allait trop loin. J'ai eu beaucoup de menaces de mort" poursuit le docteur rémois. "Je suis allé jusqu'à mes limites, voire au-delà. Je ne regrette rien : ce combat de respecter un patient, en faveur d'une certaine médecine qui ne s'obstine pas, je ne regrette pas de l'avoir conduit mais je crois que cela ne méritait pas que j'y laisse ma peau".
La mort n'est pas un échec médical
A la question de Thomas Sotto, qui lui demandait si il était un militant de l'euthanasie, il a répondu : "Si je devais me qualifier je me qualifierai volontier de pro-life. Mais je n'ai jamais été intégriste. Je me sent mieux parmi les modérés (...) donc oui je suis un défenseur de la vie, mais je suis aussi déontologiquement contre l'acharnement thérapeutique, lorsque le sens de la vie a atteint sa limite, la médecine doit laisser mourir. La mort n'est pas un échec médical, la mort fait partie de la vie, et tout médecin qui ne reconnaît pas ça serait dangereux pour ses pairs."
Ecoutez l'intégralité de l'interview que le docteur Eric Kariger a accordé ce vendredi 29 août à Europe 1.
Dr Kariger : "La mort n'est pas un échec, elle... par Europe1fr
Depuis que l'affaire Vincent Lambert avait éclaté, Eric Kariger s'était retrouvé tiraillé entre ses convictions profondes et sa conscience professionnelle. Lui même catholique pratiquant et membre du parti de Christine Boutin, il s'est retrouvé opposé aux parents de Vincent Lambert. Ce couple de catholiques traditionnalistes s'oppose à l'arrêt des soins.
Mais la famille du patient est déchirée : Rachel Lambert, l'épouse du tétraplégique s'est prononcée plusieurs fois en faveur de l'euthanasie passive, expliquant qu'elle avait déjà échangé sur la fin de vie avec son époux et que c'est la solution que Vincent Lambert aurait souhaité pour lui-même. Le jeune homme est hospitalisé depuis 2008 suite à un grave accident de la route.