À 16 ans, cette lycéenne unijambiste a gravi le Kilimandjaro à 5 800 m : "on a beaucoup pleuré"

C'est un défi incroyable. Une lycéenne de Reims (Marne), atteinte d'un handicap, amputée d'une jambe, a gravi avec plusieurs camarades de sa classe et des enseignants le sommet du Kilimandjaro. Une ascension vertigineuse empreinte de solidarité.

Ils ont beaucoup pleuré. L'émotion d'un défi hors du commun remporté malgré les aléas. Le 17 juillet, une équipée de 14 personnes, dont huit jeunes, du lycée Saint-Jean XXIII de Reims s'est hissée au sommet du Kilimandjaro (Tanzanie) à la frontière nord du Kenya, à 5 895 mètres d'altitude. Parmi eux, Lise, 16 ans (elle en aura 17 en septembre), amputée d'une jambe. Face à elle, ce stratovolcan qui possède trois cratères différents, un lieu iconique en Afrique. 

L'idée de montrer que rien n'est impossible, malgré le handicap, est venue du directeur de l'établissement scolaire. "Cette jeune fille a toujours le sourire. Elle a subi l'ablation de la jambe gauche suite à une maladie foudroyante à l'âge de six mois. Mais elle participe aux cours de [sport], elle est toujours dans la dynamique." 

Un directeur heureux et très ému après la réussite de ce défi au sommet entre neige et glace. "C’est un périple qu’on prépare depuis un an, raconte Marc Besancenez, joint par téléphone, depuis le bus du retour au camp de base. Il y a cinq jours, on est rentré dans le parc national, pour une belle ascension. On a eu de la chance avec la météo, c'est un facteur de réussite. On est arrivé au sommet du Kilimandjaro en cinq jours, dont un jour d’acclimatation. On est monté à 5 895 m. On était 14, dont huit élèves, dont Lise, une élève porteuse de handicap, unijambiste". Un rêve éveillé sur le fameux pic enneigé qui domine tout le continent africain.

Une performance, car jamais un établissement scolaire n’est allé aussi haut. "On était six adultes, mais l’ensemble de l'équipée, c’est 70 personnes qui ont contribué à la réussite du projet". 

Ressenti -30° au sommet

L'ascension n'a pas été de tout repos. "Jusqu’à 4 700 m au camp de base, ça s'est bien passé, mais le dernier jour, c’était extrêmement difficile, chacun a vaincu la montagne. Il faisait froid. En haut, on était à moins dix degrés au thermomètre, avec un ressenti de moins trente. Sur une pente raide, Lise, ne pouvait pas marcher avec sa prothèse, elle était en joëlette, avec neuf personnes pour la faire monter".

 

Une fois au sommet, admirant le fameux toit de l'Afrique. L'émotion est encore montée d'un cran. "Quand on est arrivé, tout le monde était en pleurs, les nerfs ont craqué. Chacun est allé au bout de ses capacités. On était porté, on s’est pris dans les bras. C’était un moment extraordinaire. Lise a mesuré l’intensité du groupe, le fait qu'on soit soudé, la cohésion. Pour l’emmener au plus haut. Chacun à sa façon méritait d’être en haut. C’était un challenge. C’est la 5ᵉ fois seulement qu’une joëllette atteint le sommet, et Lise est la première lycéenne française en situation de handicap à atteindre le sommet". 

"Quand on arrive sur le cratère du Kilimandjaro, c'est fabuleux. On a marché une heure trente pour atteindre le pic. Il faisait froid, on était à bout, le moment était pénible. Puis, on a vu le panneau, la joie arrive d'un coup. Une fois devant le panneau, on est resté pour la photo, et on est vite reparti pour ne pas se mettre en danger. Pour éviter les œdèmes. Le manque d’oxygène est un facteur de risque, on frôle l'étourdissement, on ventile, on va chercher dans nos capacités respiratoires, on tente de capter l’oxygène, réduite de 50 % effort, c'est un supplice, même pour faire son lacet. La tête est vaseuse".

 

"Ça m'a fait grandir"

Au sein du groupe, un médecin urgentiste originaire de Reims, et une équipe de porteurs munis d'oxygène, avec des systèmes de pressurisation. Sécurité oblige.  "On a mis huit heures pour monter et deux heures pour descendre, avec des pierres en nombre. On roule sur les cailloux, rembobine le directeur. Ensuite, on a rejoint le camp de base avec 3 000 m de dénivelé négatifs. On a fini aujourd’hui (19 juillet) à la porte du parc".

Dans le bus qui la transporte en Tanzanie, Lise est entourée de ses camarades. Elle a pris le temps de confier son ressenti à France 3 Champagne-Ardenne, qui l'avait rencontrée lors de sa préparation. "Je suis fière d’avoir réussi, on est heureux d'avoir été au bout de ce rêve. Quand je suis arrivée en haut, j’ai pleuré d’être arrivée. J’ai franchi une montagne dans ma tête, ça m’a fait grandir, ça m'a donné une autre vision de la vie, en communauté, une nouvelle culture". 

Pour graver ce souvenir à jamais, un reportage vidéo sera réalisé, un livre sera publié. "On va en parler aux élèves, et montrer que tout est possible. Ça me fait plaisir, je suis reconnaissante, mon groupe m’a aidé, quand je n’allais pas bien, à prendre confiance en moi. J’ai un peu douté, quand on a les premiers jours, on s’est dit que ce n’était pas facile, mais on s’entraide tous, je suis contente". Lise n'a pas encore eu sa famille au téléphone". Nul doute qu'elle aura des choses à leur raconter.   

"Ce que je dirai, c'est qu'il ne faut jamais rien lâcher, si on y croit on y arrive".

Lise

Lycéenne à Reims, amputée d'une jambe

Le programme des jours à venir fait rêver, vu de la Marne, dont le groupe est originaire. "On va profiter d’être près des réserves tanzaniennes pour voir des animaux dans un parc naturel. Ensuite, on va être en immersion avec des Massaïs, avant de rencontrer une peuplade primitive qui communique seulement avec des claquements de langues, c’est une surprise". Le retour à Reims est prévu le mercredi 24 juillet à l’aube.

VIDÉO : protection de la prothèse de Lise avant de s'installer dans la joëllette

L'exploit de Lise au sommet du Kilimandjaro malgré l'amputation d'une jambe. ©Quentin Furic

Solidarité, courage, persévérance, force du groupe, sont les valeurs qui ont le plus marqué les participants. "La valeur principale, c’est de mettre en avant le handicap, de montrer que tout est possible", conclut le directeur. "Le slogan, 'on a tous une montagne à gravir' a pris tout son sens. On se reconnaît tous dans l'entraide au sein de l'équipe, avec le dépassement de soi. Rappelant que le taux de réussite de cette ascension hors norme est de 40 % seulement. On est arrivé à 14, dont six jeunes, soit 100 % d'arrivée. Je suis un directeur très fier". On le comprend. 

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