Stéphane Lang, conseiller départemental LR, est opposé à la vente du domaine de Commétreuil, près de Reims dans la Marne, par le conseil départemental à un porteur de projet qui veut y installer un hôtel. Alors qu'il a appris qu'il devrait ne plus siéger dans l'instance qui gère le domaine, il dénonce une décision "antidémocratique".
La vente du domaine de Commétreuil, dans la Marne, continue de provoquer des remous. Le domaine installé à quelques kilomètres de Reims, sur la commune de Bouilly est pour l'instant la propriété du Parc naturel régional (PNR) de la Montagne de Reims.
Pendant des années, la bâtisse datant des années 1920 a hébergé un centre d'initiation à la nature. En 2021, il a été acté de vendre le domaine, fermé au public en 2013, pour 1,9 million d'euros à un investisseur privé, qui souhaite y ouvrir un hôtel-restaurant de 75 chambres et 110 couverts.
"Je veux que les enfants puissent en profiter"
Stéphane Lang, conseiller départemental Les Républicains, multiplie les actions médiatiques et judiciaires pour tenter d'empêcher cette vente. "Je veux que cela reste dans le domaine public et que les enfants puissent toujours en bénéficier pour découvrir notre biodiversité", rappelle l'élu, que nous avons joint ce mercredi 18 décembre.
Il vient d'apprendre par courrier que le président du conseil départemental ne souhaitait plus qu'il siège au sein du comité syndical du PNR, instance qui compte 90 membres et où il représente le Département avec cinq autres collègues. Dans cet écrit, daté du 11 décembre et dont nous avons pu consulter une copie, le président de l'assemblée marnaise indique que "ce changement [lui] semble nécessaire pour préserver l'intérêt départemental et prendre en compte le contexte politique local".
"Je suis estomaqué de voir que le président du Département souhaite m'exclure parce que j'empêche cette vente", s'insurge Stéphane Lang. "Je trouve vraiment anormal qu'on m'exclue parce que ma position gêne. Je pense que chaque représentant du Département peut avoir ses convictions. Chacun se bat pour ses convictions, j'ai les miennes. Et je pense que ce n'est pas la bonne solution d'exclure ceux qui ont d'autres convictions", poursuit-il.
Je trouve vraiment antidémocratique de m'exclure, alors que je défends des convictions qui représentent une grande part de notre population, j'en suis persuadé.
Stéphane Lang, conseiller départemental LR de la Marne
Alors que le courrier évoque la préservation de l'intérêt départemental, Stéphane Lang réplique : "L'intérêt du département n'est pas pour moi de construire des hôtels de luxe, mais plutôt d'aider à l'éducation de nos jeunes." Pour rappel, le projet envisagé sur le site nécessiterait une vingtaine de millions d'euros d'investissements, mais serait totalement financé par l'investisseur, sans aucune implication financière du conseil départemental.
"Il représente le Département, et non pas sa propre personne"
Jean-Marc Roze, président du conseil départemental de la Marne, n'a évidemment pas la même lecture des choses que Stéphane Lang. "C'est un homme que je respecte et qui a le droit d'avoir ses opinions. Mais il se trouve que pour ce qui concerne sa représentation au sein du PNR, il représente le Département, et non pas sa propre personne", rappelle l'élu divers droite.
"Je lui ai signifié plusieurs fois verbalement, il ne m'a pas écouté. À un moment donné, je tiens à ce que les représentants du Département portent la voix du Département au sein du PNR."
Jean-Marc Roze rappelle que "l'assemblée départementale s'est prononcée très largement il y a longtemps sur la cession [du domaine de Commétreuil] pour la construction d'un hôtel, laissant d'ailleurs une cinquantaine d'hectares libres pour la promenade."
Un représentant d'une institution comme le conseil départemental, doit avoir une position certes libre, mais une position honnête qui représente bien l'avis du Département et non pas un avis personnel.
Jean-Marc Roze, président divers droite du conseil départemental de la Marne
Le porteur de projet, l'entrepreneur Edouard Daehn, nous assurait il y a un an que le domaine resterait ouvert au grand public. "Nous avons juridiquement le devoir de laisser le lieu ouvert. Ça fait partie des impondérables de notre projet. On peut venir prendre un café, on peut venir se balader sur place. On va organiser plein de choses. Notamment avec la commune de Bouilly, on a des idées d'interaction entre l'école et le jardin en permaculture que l'on va créer", nous expliquait-il.
La colère du parc de la Montagne de Reims
Du côté du parc de la Montagne de Reims, où le domaine de Commétreuil est implanté, la prise de position de Stéphane Lang a fait réagir la direction, pourtant discrète jusque là. "On déplore que Monsieur Lang se présente comme défenseur des enfants, précise Olaf Holm, directeur du syndicat mixte du parc de la Montagne de Reims. Car on constate qu’il a voté pour le projet de Pierre-Emmanuel Taittinger, qui prévoit de grillager le domaine avec les forêts avec un droit d’entrée payant. Il voulait aussi installer des éco-lodges payants et des cabanes dans des zones protégées".
"Stéphane Lang parle de Commétreuil, reprend le directeur du parc régional, mais il ne soutient pas les actions qui favorisent l’accès à 550 km de chemins de randonnée de manière gratuite, avec un accès en transports en commun. Il est obnubilé par Commétreuil. Or, le parc réalise de nombreuses actions au service du territoire, au service des enfants. On n'a rien dit jusque là, mais cette fois, sincèrement, c’est trop. Il faut remettre l’église au milieu du village. Nos compte-rendus en font mention, on estime que sa vision n’est pas transparente".
Selon la direction du parc de la Montagne de Reims, Stéphane Lang a voté pour un projet commercial. "Avec des chambres plus chères que le projet proposé. Un hôtel de luxe qui ne permettra pas l’accès à tous".
"Il nous met des bâtons dans les roues, il manque d’objectivité. Il a aussi défendu des projets qui voulaient raser le site, avec une autre structure. Donc, il faut arrêter, il n’est même pas venu cette semaine au comité syndical".
Du changement en 2025
La modification de la liste des représentants du conseil départemental de la Marne au sein du comité syndical du PNR sera soumise au vote lors de la prochaine séance plénière, le 31 janvier prochain. Le ou la remplaçante potentielle n'a pas encore été choisi par Jean-Marc Roze.
La vente, elle, n'a toujours pas été finalisée. Après une délibération du PNR, votée en mars 2021, une promesse de vente a été signée en octobre 2023. "Je pense que dans quelques mois, ce sera décidé", nous a précisé le président du conseil départemental."