Rémy, 11 ans, est atteint d'un syndrome autistique, décelé à l'âge de deux ans. Ses parents se battent sans relâche pour obtenir une scolarisation en milieu ordinaire pour leur fils. En 2022, face aux manquements de l'Éducation nationale, Neslihan et Reynald Beaufort ont décidé de porter plainte. La justice leur a tout récemment donné raison en condamnant l'État.
C'est une victoire en demi-teinte pour les parents de Rémy. Ce garçon de 11 ans est atteint d'un syndrome autistique sévère, diagnostiqué à l'âge de deux ans. Ses parents, Neslihan et Reynald Beaufort, se battent depuis des années pour obtenir sa scolarisation en milieu ordinaire à Reims (Marne), où ils habitent.
Cette année, l'école n'est pas un nouveau combat, mais un vrai moment de prise en charge. "On nous a trouvé une maîtresse qui avait des compétences, puisqu'elle s'était occupée d'une unité spécialisée pour l'autisme", explique le père, Reynald. Mais il n'en a pas toujours été ainsi.
Pour faire entendre sa détresse, Neslihan était restée plus de 15 heures au sommet d'une grue de chantier, en 2020. Deux ans plus tard, la famille avait décidé de porter plainte pour obtenir une indemnisation face à une prise en charge insuffisante de leur fils à l'école.
"Faute dans l'organisation de la prise en charge", "insuffisance des heures d'accompagnement", le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a reconnu la responsabilité de l'État dans une décision rendue le 12 mars 2024.
Il l'a condamné à verser 20 000 euros au titre du préjudice moral subi par Rémy et ses parents. "Au moins, la responsabilité de l'Éducation nationale dans le défaut de prise en charge de Rémy est reconnue comme une faute. Et une faute volontaire", souligne Reynald.
Mais la famille avait chiffré son préjudice à un niveau bien supérieur, plus de 560 000 euros. "Tous les chiffrages qu'on a pu faire de préjudice moral, des manques à gagner, des coûts des voyages en Turquie, ça n'a absolument pas été pris en compte", regrette-t-il. Lui a dû prendre sa retraite plus tôt, son épouse a dû cesser son activité professionnelle d'interprète traductrice pour accompagner leur fils.
"Payer des indemnités leur coûte moins cher que de mettre en place le nécessaire"
Neslihan est allée chercher des structures spécialisées jusqu'en Turquie, où elle a par ailleurs des attaches familiales. "Pendant un an et demi, j'ai fait l'aller-retour tous les mois, durant les vacances scolaires. Rémy a évolué, a commencé à parler et à comprendre les deux langues", raconte-t-elle.
La décision du tribunal est importante, mais la laisse partagée. "On a gagné, mais on n'a pas vraiment gagné [...] Tout ce qu'on a subi, tout ce qu'on a fait pour notre fils, ce qu'on doit continuer à faire encore, ce n'est pas reconnu."
Son mari ne pense pas autre chose. "Tant que l'État sera condamné à des sommes aussi faibles, ça ne les motivera pas à bouger." Il s'explique : "20 000 euros, ce n'est même pas le salaire à temps plein d'une personne sur une année. Payer des indemnités aux parents en passant par la justice, ça leur coûte moins cher que de mettre en place le nécessaire pour que les enfants soient bien accompagnés à l'école."
L'État est condamné, mais pour Rémy et sa famille, les difficultés demeurent. "Il faut vraiment mettre des moyens. Nous, on fait tout ce qu'on peut, mais on a besoin de professionnels qui nous aident", explique sa mère.