Gabriel Attal, le Premier ministre en campagne (Renaissance-Ensemble) pour les législatives, a promis la fin des "frais de notaires" pour les primo-accédants à la propriété. Mais supprimer ces "frais de notaire", c'est diminuer d'autant le budget des départements. La décision agace les notaires et Jean-Marc Roze, président du conseil départemental de la Marne.
On les appelle les "frais de notaire", mais il s'agit surtout de taxes. Dans le programme présenté par Gabriel Attal (Renaissance-Ensemble) le 19 juin, en vue des élections législatives, la mesure qui a fait le plus de bruit est celle qui concerne ce montant payé par les propriétaires lors de l'acte notarié. "Pour les Français de classes moyennes qui souhaitent accéder pour la première fois à la propriété, nous exonérerons les frais de notaires en cas d’achat d’un logement jusqu’à 250 000 euros", a annoncé le chef de la majorité présidentielle.
Une compensation sera mise en place pour les départements qui bénéficient des droits de mutation liés aux transactions immobilières. "La mesure bien sera financée, précise, pour rassurer, le parti de la majorité. L’idée, c’est que ce soit compensé par l’Etat. Sans perte pour les départements".
Mais il faut être précis. "Sur un bien immobilier de 250 000 euros, un acheteur va payer 19 000 euros de frais de notaire" explique Baptiste Delloye, de la commission communication de la chambre des notaires à Reims (Marne), "sur cette somme, la plus grande partie, environ 14 500 euros (les droits d'enregistrements) sont des taxes versées aux collectivités locales, principalement les départements (environ les trois quarts de cette somme)." Ces taxes portent, comme toujours, un nom un peu barbare : les droits de mutation à titre onéreux. Et Baptise Delloye précise que "seuls 2 900 euros sont versés au notaire". En clair, "dans une vente immobilière, le montant des sommes reversées à l’Etat peut atteindre 4/5ème de ce qui est payé par l’acheteur", apprend-on sur le site des notaires.
Donc le cadeau de Gabriel Attal, évoqué lors de la présentation de son programme en vue des élections, serait financé par les départements. Et l'impact pourrait être très important puisque ces collectivités sont essentiellement financées par deux taxes : ces fameux droits de mutations et une partie de la TVA (reversée par l'État). Dans les deux cas, le département ne peut pas choisir d'augmenter ou de diminuer ces taxes, il n'a aucun contrôle sur ses recettes.
"Catastrophique" pour le budget des départements
Quand on évoque ce coup de canif promis par le Premier ministre dans le budget des départements, avec le président du département de la Marne, il n'a même pas l'air en colère. Jean-Marc Roze est résigné. Il lance : "Mais c'est comme d'habitude ! C'est catastrophique ! Notre budget est déjà touché par la baisse des ventes de l'immobilier". Touché, et pas qu'un peu ! "En 2022, alors que l'immobilier était au plus haut, les droits de mutation représentaient 103 millions pour la Marne. Cette année, ils ne représenteront que 73 millions." Une baisse d'un tiers.
Et si Jean-Marc Roze parle "d'habitude" c'est parce que ça n'est pas la première fois que le gouvernement prend des mesures qui sont, en dernier ressort, payées par la collectivité qu'il préside : "Quand le gouvernement annonce qu'il ne faut pas que les bénéficiaires du RSA supportent l'inflation et qu'il faut augmenter cette aide de 4,5%, nous le faisons, mais dans la Marne, le RSA c'est 100 millions d'euros par an. Une augmentation de 4,5% c'est quatre millions et demis d'euros en plus chaque année à payer."
Et encore, le département de la Marne s'en sort bien. "Aujourd'hui, la moitié des départements sont dans le rouge. Heureusement, ça n'est pas notre cas." Jean-Marc Roze sait que la situation de ses collègues peut être parfois bien plus difficile.