Plusieurs locataires ont pu regagner leurs logements de la rue de Strasbourg, à Reims (Marne). C'était ce dimanche 15 janvier, un mois après l'effondrement d'un mur-pignon au numéro 97. Non sans amertume.
Rentrer chez soi en fin de journée, c'est agréable. Rentrer chez soi après un mois d'absence forcée, c'est un soulagement.
Plusieurs des occupantes et occupants de logements de la rue de Strasbourg ont pu regagner leur foyer ce dimanche 15 janvier 2023. Un mois auparavant, un mur-pignon s'effondrait dans la cour du 97, mettant à nu plusieurs appartements et conduisant à une évacuation générale des 97 et 99.
Mais l'allégresse n'est pas générale pour ce retour. D'autres ne peuvent toujours pas revenir à la maison, et ont bien peiné à se reloger. C'est le cas de Valentin Vaucouleur, qui fait partie des cambriolés pendant son absence non-voulue. Il déclare au micro de Marjorie Le Meur, journaliste à France 3 Champagne-Ardenne, que depuis l'effondrement (qui a failli les ensevelir lui et sa compagne), les choses ont été très compliquées.
À la rue ou presque
"Citya nous a relogé en hôtel, dans le centre-ville. Le 26 décembre, on reçoit un appel de la responsable de Citya pour nous dire que l'assurance ne nous prend plus en charge : on est expulsé. Je suis reparti en catastrophe chercher les affaires à l'hôtel : super comme cadeau de Noël. On n'avait personne qu'on connaissait sur Reims. Heureusement, un cousin de ma compagne, Amandine, nous a hébergés pendant deux semaines même si ça ne l'arrangeait pas beaucoup. Mais sans lui, on ne sait pas où on aurait dormi : j'avais même appelé le 115."
"Il a fallu un peu de temps pour que les gens du 115 nous trouvent un petit studio, quartier de la Neuvillette. C'est vraiment une solution de secours pour qu'on ne soit pas à la rue. On les remercie vraiment. D'habitude, ils s'occupent des SDF, des gens en très grande précarité, et notre dossier était une première pour eux." Le studio est décrit comme un peu vétuste et faisant 20m², contre 60m² pour l'ancien appartement (visible sur la carte ci-dessous).
"Je suis surtout en colère, vraiment en colère, car on ne nous a pas directement relogés. Si je n'avais pas appelé le 115 plusieurs fois... La mairie n'a pas pu nous aider car elle n'avait pas de logement disponible. Mais le propriétaire, ou le syndic, un des deux, aurait dû être responsable et trouver. Avec l'assurance, on nous a dégagés comme des malpropres."
"Et mon propriétaire m'a dit au téléphone que ce n'était pas son problème, que je n'avais qu'à travailler pour retrouver un appartement et qu'il voulait juste proposer une nuit d'hôtel. Alors que je suis sans travail : j'avais un entretien d'embauche le lendemain de l'effondrement... C'est une horreur de me dire ça."
"On ne demandait pas des mille et des cents, juste être hébergés deux ou trois mois comme la loi l'indique. Non, on est locataires, tout s'effondre, mais personne ne nous reloge. On se sent délaissé alors qu'on a tout perdu, même notre dignité, je n'en dors plus la nuit..."
Il n'est pas prêt de récupérer ses affaires, ainsi que celles de sa compagne, restées au 97 : le syndic ne lui donne aucune nouvelle. Il a appris fortuitement que des travaux d'étayage avaient lieu, et que ses fenêtres et portes avaient été ôtées : ce qui n'a pas été volé chez eux ("on a tout perdu, ou presque") est donc exposé aux intempéries. Y compris les documents administratifs demandés par les services sociaux ou les agences immobilières.
Manque de réactivité et cambriolage
De son côté, Mathilde Legrain a pu revenir... mais pour mieux repartir. Elle gardera un mauvais souvenir de toute cette histoire. "Je n'ai plus l'impression d'être chez moi. Je devais déjà déménager fin janvier ou début février. Donc tout ça a tout accéléré. J'ai déjà déménagé. Il me reste à ranger et nettoyer ici, puis rendre l'appartement. Ensuite, l'histoire sera finie pour moi au 97 du rue de Strasbourg."
"Tout s'est accéléré à cause de cette menace d'être cambriolé de nouveau. On n'était pas sûr de la sécurisation du bâtiment. On a donc très vite sorti nos affaires, on n'avait pas envie qu'elles restent ici, en insécurité. Dès que j'ai trouvé un nouvel appartement, on a déménagé en deux heures de temps. On a tout vidé, je n'avais plus envie de vivre ici. Je suis soulagée. J'ai hâte de pouvoir rendre les clés et de ne plus revenir ici."
Le cambriolage a laissé des traces durables, plus que l'effondrement en lui-même. "Quelques jours après, le syndic nous a appelé pour nous dire que des appartements avaient été visités. Il y a eu des soucis de communication : on m'a dit que mon appartement n'avait pas été cambriolé."
"Finalement, quand on a enfin pu y aller quelques jours après, il y avait un trou énorme dans la porte car ils n'avaient pas réussi à l'ouvrir. Ils étaient revenus car ça n'avait toujours pas été sécurisé. Tout était sens dessus dessous : pots de fleurs renversés, café répandu partout. Chez les voisins, je sais qu'ils ont bu tout l'alcool et mangé les chocolats. On sent qu'ils ont eu le temps, et qu'ils l'ont pris. Personne n'était là pour les déranger. Le lien avec le syndic a donc été un peu tendu par moments", euphémise la future ancienne locataire.