Depuis quelques mois, Vitry-le-François est sous le feu des projecteurs. La ville a même été citée dans une étude américaine comme symbole de la "décroissance urbaine", un concept né dans les années 1970. Nous avons voulu aller nous en rendre compte par nous-mêmes.
A première vue, la ville de Vitry-le-François ne laisse pas au visiteur un souvenir mémorable. Nous n'y allons d'ailleurs que peu souvent faire des reportages. Pourtant après bon nombre de reportages et d'articles (dont celui publié sur le site de Mediapart) faits sur le thème d'une ville qui serait symbole de la "décroissance urbaine", nous voulions en savoir plus.
14 % de logements vacants
C'est tout d'abord un constat sans appel : ces 30 dernières années, cette commune de la Marne a perdu des habitants de façon irrémédiable. Comme beaucoup de villes de cette taille, elle a dans les années 60 et 70 vu des tours émerger qui, à l'époque, constituaient une révolution en terme d'habitat. Les mêmes tours bleus, roses ont aujourd'hui perdu de leur superbe. Selon la mairie, 14 % de ces logements seraient vacants.De 20 000, la ville est passée à 13 000 habitants. Un constat qui fait mal mais qui s'explique facilement par la disparition des industries que la ville a connues.
Le jour de notre reportage, un vendredi d'hiver, ciel gris avec un peu de neige encore, nous avons rendez-vous avec le directeur de cabinet de la mairie. Au programme de la visite : un chantier de nouveaux logements au coeur du quartier du Hamois, là où tous les efforts sont concentrés, la rencontre avec des associations de quartier, l'émergeance d'une start-up dans le secteur des nouvelles énergies.
Ce qui frappe tout d'abord, c'est l'optimisme de la municipalité qui affiche à la fois un discours progressiste mais conserve une part d'humilité dans le projet de rénovation urbaine. L'expression de "décroissance urbaine" n'est d'ailleurs pas reprise par les différents acteurs qui participent à ce mouvement.
Nouveau quartier
Le quartier du Hamois est un quartier populaire où les habitants ont leurs habitudes. Ce matin-là, une association de quartier part au-devant des habitants :
Il faut expliquer la façon dont les choses vont évoluer. Pas si simple quand des gens vivent ici depuis 40 ans et qu'on leur dit qu'ils vont devoir déménager.
Quitter des tours de 10 à 15 étages, vieillissantes pour gagner des habitations à "taille humaine", c'est un vrai progrès. Au Hamois, la municipalité nous fait visiter un chantier en construction, les futurs logements qui seront destinés aux gendarmes de la future gendarmerie du quartier, des habitations aux dernières technologies en terme d'isolation et d'énergie grâce à un système énergétique décentralisé, une sorte d'autonomie en la matière.
Vitry, symbole de la décroissance ?
Vitry a des projets un peu fous qui lui valent d'être distinguée. Étonnante rencontre avec le PDG d'une petite start-up qui ne cache pas son ambition : que d'ici 2 ou 3 ans, des véhicules roulent dans les rue de la ville avec de l'hydrogène. A l'écouter, cela paraît si simple, la mairie porte le projet.
Tout cela a évidemment un coût : 150 millions d'euros. Le maire PS de la ville croit dur comme fer dans son projet. Jean-Pierre Bouquet affiche un optimisme sans limite. Pour lui, il s'agit d'accompagner un mouvement de rénovation respectueux des gens en ne cédant pas à la morosité ambiante.
Voir notre reportage en "immersion"
La décroissance c'est quoi ?
C'est un concept, né dans les années 70, qui revendique le fait que la croissance peut être nocive pour l'humain. A cette époque, la crise est double : écologique et économique.Des chercheurs et militants pointent du doigt la surproduction et la surconsommation. Il s'agit donc d'essayer de vivre mieux et de préserver la planète. Les porteurs du concept estiment que le politique est primordial car il doit dominer l'économie.
L'aspect écologique reste important aussi car il est évoqué la nécessité de moins rejeter de CO2 et aussi de moins travailler. Même si cela semble un peu idéaliste, ce mouvement a de nombreux adeptes dans le monde.