Tableau par IA ou œuvre d’art ? Jusqu’au 18 décembre, l'exposition ZizanIA propose de trouver quels tableaux ont été réalisés par des étudiants ou générés par des intelligences artificielles. Une exposition surprenante, à voir dans l’une des bibliothèques de l’université de Nancy.
Et vous, allez-vous aussi tomber dans le panneau ? 18 œuvres sont exposées jusqu'au 18 décembre, en ligne et dans la bibliothèque de Lettres de l’université de Nancy (Meurthe-et-Moselle). Leur particularité : elles sont soit réalisées en grande partie par des étudiants de l'Ensad (Ecole nationale supérieure des Arts Décoratifs), soit entièrement générées par des intelligences artificielles avec des étudiants ingénieurs.
"Le point d'ancrage, c'est l'IA.Tout le monde parle de l'intelligence artificielle, et elle prend de la place dans la société. Nous voulions en profiter pour en faire une piqûre de rappel, histoire de dire qu'il existe des livres, des documents scientifiques, un arbitre de la validité de la documentation", détaille Damien Perez, bibliothécaire chargé des initiatives numériques au sein de la mission Cultures de la direction de la documentation de l'université de Lorraine.
Ces IA comme on les appelle aussi, sont des programmes accessibles au grand public. Elles permettent notamment de créer des textes, ou plus insolite même, des chansons. C’est le cas par exemple de ChatGPT, dans sa version gratuite. Dans cette exposition ZizanIA, les participants ont en revanche eu recours à des versions grand public, mais dans leur version payante. Elles donnent accès à plus de fonctions. Le résultat : des tableaux qui réussissent parfois à tromper l’œil. Même celui des plus avertis.
Des tableaux ou des productions par intelligences artificielles
Le petit jeu commence avec ces deux créatures, que vous pouvez voir tout en haut de cet article. Derrière ces deux productions, l’une d’elles est celle d’un étudiant. 12 d’entre eux et d’entre elles ont été impliqués dans ce projet. "Ces étudiants devenus artistes d’un jour ont travaillé avec les IA. Ils avaient un cahier des charges, dans lequel se trouvaient des prompts. Ce sont des mots-clés qu’ils devaient inclure dans le programme, pour générer l’œuvre", indique Damien Perez.
Des étudiants qui ont apprécié de concevoir l’exposition et qui accueillent plutôt avec bienveillance l’arrivée de l’intelligence artificielle, dans leurs vies. "Ce qui est dingue, c’est qu’ils ne sont pas inquiets du tout. On a pu dire que l’apparition de la photo allait tuer la peinture, que le phonogramme allait tuer le spectacle vivant. Mais là, les étudiants se sont dit que l’IA est arrivée et qu’elle n’allait pas être une menace. Certains l’ont intégrée à leur travail, et deux des trois artistes participants s’en sont même servis comme d’un outil de travail à divers niveaux", relate ce bibliothécaire de l'université de Lorraine.
Cet outil de travail a permis de réaliser entièrement une partie des productions, avec certaines limites : "Cela nous intéressait de voir si l’IA allait reproduire toutes les caractéristiques des œuvres. Sur l’une d’entre elles, elle n’a rien compris : ni sur la thématique, ni sur la construction. Nous voulions passer par le prisme de l’art, pour explorer toutes les problématiques de l’IA. Cela interroge notamment sur l’image, la représentation du monde mais aussi le talent : elle peut générer des images rapides, simples et intuitives, sans passer par un apprentissage, du moins pour les IA grand public non payantes."
Un tableau sur lequel l’intelligence artificielle est passée à côté, que nous ne vous dévoilerons pas, histoire de ne pas divulgâcher les œuvres à découvrir. En revanche, si vous êtes aussi perspicaces et joueurs que l’est le rédacteur de cet article, voici un autre avant-goût de cette exposition.
Pour la réponse, rendez-vous sur place. Sinon, si (et seulement si) vous n’en pouvez vraiment plus, cliquez ici.
L’originalité mais aussi de la réflexion
Au-delà des trois étudiants ingénieurs et des six étudiants de l’Ensad, trois artistes ont participé à cette exposition. "Une artiste russe en résidence, une enseignante-photographe mais aussi une plasticienne", précise Damien Perez. Sans oublier quatre enseignants-chercheurs de l’université de Lorraine. Une expertise importante, comme le précise ce bibliothécaire chargé des initiatives numériques au sein de la mission Cultures de la direction de la documentation de l'université de Lorraine.
"On peut voir sous chaque œuvre le point de vue des étudiants impliqués dans le projet, pour savoir ce qu’ils pensent des intelligences artificielles. Il y a aussi celui d’enseignants qui travaillent avec ces IA, mais aussi ceux de professeurs d’art ou encore de droit. C’est intéressant sur ce dernier point, puisqu’il interroge sur le statut légal de ces images qui sont générées par intelligence artificielle. Le but est de faire une analyse à 360 degrés de l’IA, appliqué au domaine de l’art", ajoute-t-il.
Une réflexion qui implique encore le public, à en croire cette anecdote amusante que relève Damien Perez : "Nous avions organisé une table ronde avec tous les acteurs de cette exposition, pour pouvoir en discuter en direct. Pour terminer sur une note plus légère, une loterie avait été organisée pour le public. Les participants pouvaient gagner une œuvre. Quand il s’agissait d’une œuvre d’un étudiant, le gagnant recevait ce vrai lot. À l’inverse, quand il s’agissait d’une œuvre par intelligence artificielle, nous leur remettions une photocopie de cette production."
De l’interaction avec le public jusqu’au bout, pour cette exposition qui se poursuivra aussi dans d’autres bibliothèques de l’université de Lorraine.