C’est une voix dissonante au sein d’un organe traditionnellement ancré à droite. Gilles Caumont est président du MEDEF54, co-fondateur de la startup Lorn’Tech, et gérant de la société informatique Adista. Sans se prononcer sur la dimension politique de cette loi largement contestée à gauche, il déplore ses conséquences sur l’économie française. Explication en trois questions.
Gilles Caumont, président du MEDEF54, co-fondateur de la startup Lorn’Tech, et gérant de la société informatique Adista estime que la loi immigration n'est pas à la hauteur des enjeux. Sans se prononcer sur la dimension politique de cette loi largement contestée à gauche, il déplore ses conséquences sur l’économie française. Explication en trois questions.
Pourquoi la loi immigration dérange le patronat ?
Cette loi immigration nous gêne, car elle ne prend pas en compte le problème qui est celui du recrutement et de la disponibilité des salariés. Or ces travailleurs seront nécessaires dans les années qui viennent si on veut avoir un équilibre entre le nombre d’actifs et le nombre de retraités. Et il se trouve que c’est la base notre modèle économique.
Aujourd’hui, les mesures de régularisation vont concerner 7 à 10 000 personnes par an, ce qui est à la marge quand on sait qu’il y a en France à peu près 30 millions d’actifs. Donc 10 000 personnes de plus ou de moins ne changent pas grand-chose à l’affaire.
Il faut trouver les salariés dont l’économie française a besoin pour assurer les objectifs en termes de croissance et de développement ; pour ça, il faut une réflexion globale sur l’immigration. Pourquoi pas une "immigration choisie" comme certains pays le font depuis longtemps, comme le Canada par exemple.
Quel sera l’impact de cette loi sur l’économie française ?
Les rapports du COR (Conseil d’Orientation des Retraites) qui avaient été publiés lors de la réforme des retraites, montrent qu’il faudrait entre 3 et 4 millions de salariés supplémentaires par rapport à ce qu’apporte la démographie, aux alentours de 2050. Ces personnes, il faudra bien qu’elles viennent de l’étranger. Aujourd’hui, ce problème n’est absolument pas anticipé. Ça va mettre en péril l’équilibre entre le nombre d’actifs et le nombre de retraités très rapidement, à partir de 2030, 2035.
Cette loi est complètement insuffisante et pas à la hauteur du sujet. C’est une loi sociétale mais pas une loi économique ; on n’a traité que la moitié d’un problème qui se reposera dans 2, 5 ou 10 ans, c’est inéluctable.
Est-ce qu’il a des besoins spécifiques en Lorraine ?
La Lorraine est une terre d’immigration, si on n’avait pas eu les Italiens par exemple au début du siècle, l’économie Lorraine ne serait pas ce qu’elle est. Aujourd’hui, ils sont parfaitement intégrés et il n’y a plus de "traces négatives" de cet apport d’étrangers. Donc l’immigration, ça fait des siècles et des siècles que ça existe, et ça continuera d’exister. Au niveau local, on est assez représentatifs de la nation, il y a des métiers en tension, notamment les métiers qui nécessitent de la main-d’œuvre comme la restauration, le service à la personne, il y a des pénuries également dans le secteur de l’industrie, c’est un problème conjoncturel de démographie qui ne fera que s’amplifier, ici, comme dans le reste du pays.