Le lorrain Théo Curin, nageur handisport, Malia Metella, vice-championne olympique et Matthieu Witvoet, éco-aventurier lancent une campagne de financement participatif en ligne pour leur projet de traversée à la nage du lac Titicaca, au Pérou, en une dizaine de jours en novembre 2021.
Théo Curin, nageur paralympique, est un peu monsieur 100.000 volts. Il n'arrête pas. Entre ses entraînements, ses conférences et ses collaborations télévisuelles, il est partout.
Mais cela ne lui suffit pas. Alors, il se cherche d'autres défis à relever. Cette énergie, il la puise dans son amour de la vie. "Il a choisi de transformer sa vulnérabilité en une force et de contribuer à faire évoluer les regards sur le handicap". C'est ainsi que, pendant le premier confinement, est née l’idée folle d’une traversée "surtout pas là où quelqu’un d’autre l’aurait déjà réalisée". On oublie donc la Manche…
Pourquoi pas le Lac Titicaca ? Un lac perché, un peu comme l'idée, à plus de 3.000 mètres d’altitude, le plus haut lac navigable du monde entre Pérou et Bolivie, 175 km de long. Il couvre 8.340 km². L’eau est à 10 degrés.
Trio de passionnés
Voilà qui pourrait être à la mesure de l’idée qu’on se fait d’un défi. En tout cas du point de vue de Théo Curin. Le Lorrain ne sera pas seul à se jeter à l'eau. C'est un trio qui va plonger dans les eaux froides du lac Titicaca. Malia Metella, nageuse, vice-championne olympique et cinq fois championne d'Europe, et Matthieu Witvoet, éco-aventurier, qui a déjà réalisé la traversée du détroit de Gibraltar à la nage font partie de l’aventure.
Financement participatif écoresponsable
Le radeau que nous allons tracter pour y passer les nuits et stocker de la nourriture n’est fait qu'avec des matériaux recyclables et recyclés.
Pour Théo, une campagne de financement participatif, c’est une façon d’embarquer le plus de monde possible dans cette aventure.
"On pourra donner des nouvelles aux gens et partager l’aventure avec eux. Les personnes qui vont nous aider avec cette cagnotte, c’est aussi leur défi." Il faut financer une partie de cette action qui sera aussi solidaire et éco-responsable.
"Je ne voulais pas me lancer un simple défi sportif personnel. On partage ce projet avec Maya et Matthieu. Le lac Titicaca est de plus en plus pollué. Les populations locales en souffrent. Alors, on veut sensibiliser à cela. On doit, nous aussi, être irréprochables. Le radeau que nous allons tracter pour y passer les nuits et stocker de la nourriture n’est fait qu'avec des matériaux recyclables et recyclés. On essaie de mettre en place d’autres opérations pour soutenir la population locale." Solidaire, aussi, parce que ce défi se relève à trois, et même plus, puisque médecins et préparateur physique sont tout aussi investis.
On est entre de l’excitation et un peu de peur.
À quelques mois de l’événement Théo, qui pourtant n’a peur de rien, nous confie : "On est entre de l’excitation et un peu de peur. Plus on se rapproche du défi et plus on se dit : mais quelle idée on a eue ? En même temps, c’est un pur bonheur quand on voit que cela devient vraiment concret."
Entraînement quotidien, chacun de son côté, car ils sont difficiles à réunir avec leur agenda respectif. A quoi, il faut ajouter les restrictions liées à la pandémie de Covid-19, rien n'est simple. Mais ils se retrouvent une fois par semaine.
"On essaye de se retrouver pour faire un entraînement en eau libre. On abandonne la piscine et on va dans un étang en région parisienne pour nager dans des eaux froides actuellement entre 6° et 8°. On se rapproche des conditions du lac Titicaca. Piscine, milieu naturel et préparation physique trois fois par semaine. C’est costaud, mais nécessaire pour se laisser le plus de chances d’atteindre notre objectif."
Pour son entrainement Théo peut compter sur Bilal Bourazza préparateur physique, mais aussi préparateur mental, un point à ne pas négliger dans ce type d'aventure.
Le lac Titicaca, jamais je ne pourrai le traverser tout seul.
"En ce moment, on est dans une période un peu difficile. C’est un message d’espoir qu’on veut envoyer en particulier aux jeunes. Il y en a de plus en plus qui me suivent et je vais leur montrer qu’on peut, en s’associant et en s'entraidant, faire de belles choses. Le lac Titicaca, jamais je ne pourrai le traverser tout seul. Mais avec mes amis et le staff cela devient possible. Donc le message est : faites-vous confiance et faites confiance à votre famille à vos amis et vous pourrez réaliser vos projets. Croire en ses rêves, c’est le message que j’ai envie d’envoyer."
L'eau pour se dépasser
Théo aura 21 ans dans quelques jours. Il est né à Lunéville. À six ans, il est victime d'une méningite bactérienne à méningocoque. Une maladie terrible qui a eu pour conséquence l’amputation de ses quatre membres.
"Tu ne peux plus rien faire comme avant... Manger, te lever, te brosser les dents, il a fallu tout repenser comme si une nouvelle vie commencerait."
En 2006, sa mère lui fait rencontrer Philippe Croizon, lui aussi amputé de ses quatre membres. Il multiplie les exploits sportifs et s'apprête à réaliser la première traversée de la Manche par un nageur handisport. C'est le déclic pour Théo.
"Il m’a proposé de le rejoindre dans la piscine alors que j’avais peur de l’eau. Je suis reparti immédiatement, car c’est l’élément que je détestais le plus. Je suis sorti vraiment frustré de n’avoir pas pu lui montrer que j’étais capable de faire comme lui. Du coup, j’ai décidé en rentrant à la maison de m’inscrire dans un club handisport où j’ai fait mes premières longueurs. Rapidement, j’ai commencé à apprécier cet élément porté par l’envie de me dépasser et de me fixer des objectifs…"
Depuis, Théo n'a plus jamais quitté les bassins. Il devient très vite l’un des grands espoirs français de la natation handisport. Il nage quatre heures par jour. À 16 ans, seulement, en 2016, il est à Rio pour les Jeux Paralympiques.
"Dans l’eau, je me sens comme tout le monde. Je suis moi tout simplement. J’ai une sensation de liberté, de légèreté."
Si tout va bien, tout début novembre 2021, Théo, Malia et Matthieu seront au bord du lac Titicaca avec leur radeau, prêts pour cet incroyable défi, 122 kilomètres à la nage.
Une traversée qui devrait leur prendre une dizaine de jours.