Un rassemblement inédit est prévu lundi 17 octobre à Nancy (Meurthe-et-Moselle) pour protester contre le projet de réforme de la police judiciaire. Cette réforme, controversée, propose de placer tous les services de police à l’échelle d'un département.
Le syndicat de la magistrature, l'union syndicale des magistrats et l'association française des magistrats instructeurs appellent à des rassemblements devant les tribunaux judiciaires de plusieurs villes, dont Nancy (Meurthe-et-Moselle), lundi 17 octobre, entre midi et 14 heures. Ils protestent contre le projet de réforme de la police judiciaire porté par Gérald Darmanin, le ministre de l'Intérieur. Selon plusieurs syndicats et organisations professionnelles de magistrats, ce projet est "de nature à porter gravement atteinte à l'efficacité des enquêtes et à l'indépendance de la justice".
"Les procureurs sont inquiets des effets de cette réforme qui vise à fondre des services d’enquête relevant de la seule autorité des magistrats du parquet et des juges d’instruction quant aux enquêtes qui leur étaient confiées, dans la sécurité publique placée à titre principal sous l’autorité administrative", explique François Pérain, procureur de la République de Nancy.
Cette réforme propose de placer tous les services de police à l'échelle du département, dont la PJ, sous l'autorité d'un seul directeur départemental de la police nationale (DDPN), dépendant du préfet.
Stephane M. est le vice-président de l’Association Nationale de Police Judiciaire. Il est enquêteur à Nancy (Meurthe-et-Moselle), à la police judiciaire. "On se rend compte que l’on risque de dépendre d’un seul directeur. Il fera de la gestion et nous serons sous les ordres du préfet, ce qui pose un problème entre le judiciaire et l’administratif. La police judiciaire est une direction indépendante. On ne veut pas dépendre du préfet et de sa main mise sur la judiciaire".
Une mobilisation inédite
Cela "risque de nous faire perdre notre indépendance. Derrière tout cela il y a un intérêt budgétaire, un seul responsable pour gérer la délinquance du quotidien", poursuit Stéphane M. "Il y a des risques sur les enquêtes de la criminalité organisée",
Les magistrats, eux aussi concernés par le plan de réorganisation de la police, s’associent aux critiques formulées par les fonctionnaires. En effet, avec cette réforme, la PJ redoute surtout d’y perdre son mode de fonctionnement.
La PJ a vocation à traiter le haut du spectre de la délinquance.
François Pérain, procureur de la république de Nancy.
Selon François Pérain, "la PJ a vocation à traiter le haut du spectre de la délinquance (délinquance organisée, affaires criminelles complexes, délinquance concernant plusieurs départements voire transfrontalière..). Nous craignons qu’en cas de fusion, les enquêteurs de la PJ soient happés par la délinquance du quotidien dont le traitement génère des délais d’enquête particulièrement longs depuis quelques années".
De leur côté, les magistrats des juridictions inter-régionales spécialisées en matière de grande criminalité organisée et de grande délinquance financière ont fait part de leur vive inquiétude. "Le projet ne nous apparaît pas garantir la préservation des missions de la police judiciaire qui sont indispensables à la conduite et à la résolution des affaires de criminalité organisée parmi les plus complexes, graves et sensibles, notamment en matière de cybercriminalité".
Lundi, à Nancy, des magistrats ainsi que des avocats devraient se joindre au rassemblement des policiers.