Un homme de 20 ans a été tué jeudi soir et une femme de 19 ans séquestrée, agressée sexuellement et violée dans la nuit de jeudi à vendredi. Elle a finalement été libérée par son ravisseur le vendredi matin. L'individu a été interpellé vendredi dans la soirée.
Une affaire sordide et d'une violence rare. Ce dimanche 30 mai, le procureur de la république Matthieu Bourrette et le commandant du groupement de la Marne et de l'ex-Champagne-Ardenne, Bruno Louvet, ont tenu une conférence de presse concernant le meurtre d'un homme de 20 ans jeudi soir, ainsi que du rapt et des sévices sexuels endurés par la petite amie du défunt, âgée de 19 ans. Le suspect, âgé de 41 ans, a été interpellé le 28 mai et a reconnu les faits.
Le procureur a ouvert une information judiciaire pour meurtre en récidive (il a été condamné pour un délit passible de 10 ans d’emprisonnement en 2002 pour détention de produits stupéfiants), viols, enlèvement et séquestration, agressions sexuelles, vols en récidive. Il encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Il a également demandé son placement en détention provisoire. France 3 Champagne-Ardenne fait le point sur les faits qui se sont déroulés depuis jeudi soir.
Du meurtre à la libération de la jeune femme
Il est environ 20 heures ce jeudi quand le couple se pose sur un parking. Les étudiants se demandent ce qu'ils pourraient bien faire de leur soirée. C'est alors qu'un individu en berline noire les interpelle, leur demandant s'ils savent où l'on peut "acheter du shit". Il descend de son véhicule, armé d'un fusil. Le conducteur tente de démarrer, sans succès. L'homme armé oblige alors le jeune homme à quitter l'habitacle et intime l'ordre à la jeune femme de monter dans le coffre de sa voiture. Son ami tente de s'interposer. Le quadragénaire lui tire dessus et menace la jeune femme avec son arme. Elle monte dans le coffre. Son ami décédera dans la soirée, après l'arrivée des secours.
Dans le coffre, l'étudiante a conservé son téléphone portable sur elle, ce qui lui permet de prévenir les pompiers et sa mère. Après une dizaine de minutes, la voiture s'arrête. Le conducteur a compris. Il s'arrête à Tramery et jette son téléphone au loin.
Il installe ensuite la jeune femme à l'arrière de la voiture, genoux ligotés par sa ceinture, mains liées avec un t-shirt. Il lui explique qu'il sort de prison et cherche "une fille à qui faire l'amour". Elle comprend alors qu'elle doit le faire parler pour éviter qu'il ne passe à l'acte. Cela fonctionne dans un premier temps. Il se confie à elle tout au long de la nuit, évoque sa famille, ses vacances, ses incarcérations, sa vie amoureuse, avant d'ajouter "qu’il se sentait obligé de la violer, car il n’avait pas tiré sur son copain pour rien".
Pendant tout ce temps, il boit de la vodka orange, fume des joints et prend "sans doute" des produits de substitution. Il lui promet qu'il la libèrera après 5 heures, une fois qu'il aura pu voler de l'essence. Le temps passe, et aux alentours de 6 heures, alors que la victime espère être libérée, il commence à l'agresser sexuellement et à la violer. "Elle cherchait à se soustraire à ces agressions sans succès, et le rappel de sa jeunesse, son souhait de ne pas tomber enceinte ou de ne pas avoir de maladie sexuellement transmissible n’émouvaient en rien son agresseur, qui lui répondait qu’elle « le faisait chier »", raconte le procureur.
La jeune femme est finalement libérée au rond-point de Gueux, village de la Marne, un peu avant 10 heures. Son agresseur lui laisse une couverture et son téléphone, pour qu'elle puisse prévenir sa mère. Ce qu'elle fait. C'est d'ailleurs grâce à cet appel qu'il sera identifié et interpellé. Une fois libérée, la jeune femme se dirige dans la gendarmerie, située à deux pas.
L'individu interpellé est un multi-récidiviste qui a reconnu les faits
Les recherches ont rapidement mené les enquêteurs sur la piste de Rudy C., âgé de 41 ans, toxicomane multirécidiviste. Il a été condamné à 27 reprises entre 1998 et 2018, essentiellement pour des faits de vols, ou vols aggravés, infractions routières, et plus ponctuellement pour des faits de violences, ou d’enlèvement. Sorti de détention en mars 2020, il venait de purger une peine de deux ans d’emprisonnement prononcée par le tribunal correctionnel de Châlons-en-Champagne en août 2018. "Il n’était sous le coup d’aucun sursis avec mise à l’épreuve, d’aucun sursis probatoire et ne faisait pas l’objet d’un suivi judiciaire. Aucune peine n’était à mettre à exécution", a précisé le procureur.
Il est interpellé le vendredi en début de soirée et a immédiatement reconnu l'intégralité des faits, à l'exception de l'intention d'homicide. Il est placé en garde à vue pour meurtre, enlèvement, séquestration avec libération volontaire avant le 7e jour, agressions sexuelles et viols, vol, s’agissant du véhicule et des armes (le véhicule et les armes ont été volés quelques jours plus tôt dans l’Aisne). Pas moins de 140 gendarmes ont été déployés, dont ceux appartenant au GIGN, "compte tenu de la détermination de l'individu", précise le commandant Louvet. Un hélicoptère a également été déployé.
La "mauvaise rencontre au mauvais endroit au mauvais moment"
Ce sont les mots employés par le procureur. Les victimes et l'individu interpellés ne se connaissaient pas avant les faits et leur rencontre est le fruit du hasard. Durant sa garde à vue, le "prédateur" a expliqué alors qu'il était "en chasse d'une fille", qu'il était passé à côté du couple en voiture. C'est alors qu'il repère l'étudiante et décide de faire demi-tour et de charger le fusil. Concernant le meurtre du jeune homme, il affirme que c'est un accident. Qu'il l'a bien menacé avec une arme et a tiré à deux reprises. D'abord pour lui faire peur, "puis comme cela ne suffisait pas, une deuxième fois dans le ventre. Il indiquait avoir tiré au niveau du ventre, pensant que la blessure n’était pas grave s’agissant de plombs, et que le monde qui se trouvait à proximité allait venir le secourir", a détaillé le procureur.
Il dit avoir agi "par pulsion" et avoir pensé à se rendre après les faits, sachant qu’il allait être retrouvé en ayant donné à sa victime son propre téléphone. Durant sa garde à vue, il s'est lui-même qualifié de "dingue, de gentil et de méchant". Toxicomane depuis l'âge de 13 ans, il a confié aux enquêteurs avoir été victime de violences durant son enfance. Il a quitté le domicile familial à 12 ans et vécu en foyer jusqu'à sa majorité.
Les deux victimes, des étudiants sans histoire
Le jeune homme décédé était âgé de 20 ans. L'étudiant était un musicien spécialisé dans le rap, selon l'Union. Quant à sa petite amie, le procureur et les gendarmes la qualifient de jeune fille "brillante" en double cursus à l'université de Reims. "Elle faisait l’objet d’un sang-froid impressionnant tout au long de la nuit, et fournissait de très nombreux détails au cours de son audition, a indiqué le magistrat, tous par la suite corroborés, qui ont aidé à la manifestation de la vérité."