Terre de combats pendant la Première Guerre Mondiale, la région compte le plus grand nombre de nécropoles nationales sur son territoire. On y trouve parfois des personnalités, comme à Verdun (Meuse), où sont enterrées sept célébrités. Elles sont pourtant restées inconnues.
A l’est de Verdun (Meuse), la nécropole nationale du Faubourg Pavé et ses 5722 tombes. Au cœur de cet ancien cimetière militaire, où étaient enterrés les soldats tués entre 1914 et 1918 dans le secteur, une grande croix. A son pied sont regroupées les tombes de sept soldats inconnus… qui auraient pu être inhumés sous l’Arc de Triomphe à Paris.
L’histoire de ces sept inconnus commence au lendemain de la Grande Guerre. La France sort exsangue du conflit avec un million 400.000 tués. Mais seuls 960.000 corps ont pu être inhumés. Plus de 350.000 manquent à l’appel.
Nicolas Czubak est le responsable du pôle Histoire et Médiation au Mémorial de Verdun. "À l’issue de la première guerre mondiale, on estime qu’en France les deux-tiers des familles ont perdu un proche pendant le conflit. Et parmi eux beaucoup sont portés disparus, ou sont inconnus. En effet on estime que pendant toute la première guerre mondiale 65 à 70 % des soldats sont morts par l’artillerie. Des obus qui ont explosés partout, à droite à gauche, ce qui fait que on a eu énormément de portés disparus sur le champ de bataille. Pour les familles c’est quelque chose qui va être terrible car pour faire son deuil il faut une tombe".
Sept "recalés de l’Histoire"
Dès 1916 naît l’idée de donner une sépulture nationale à un combattant anonyme pour permettre aux familles de disparus de faire leur deuil. En espérant que ce soldat soit leur fils, leur père ou leur mari.
Le choix de ce Soldat Inconnu doit se faire à la veille du 11 novembre 1920 à Verdun, ville qui symbolise la résistance de la nation française. Cédric Schwindt est le directeur de l’Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre de la Meuse. "En l’absence de plaque matricule pour un soldat dont on est formellement sûr, pour un soldat c’est avant tout son uniforme et tous ses artefacts de militaires qui permettent de l’identifier, son armement, ses chaussures. C’est la seule chose dont on est réellement sûre".
J’ai pensé additionner les chiffres de mon régiment le 132, faisant partie du sixième corps d’armée, j’ai pensé à désigner le sixième corps.
Auguste Thin.
Le choix du Soldat Inconnu a lieu le 10 novembre 1920 à la Citadelle de Verdun. Une cérémonie aujourd’hui reproduite en réalité augmentée. Elle montre comment le soldat Auguste Thin, a désigné celui qui allait reposer sous l’Arc de Triomphe, à Paris.
Le cercueil ainsi désigné quitte ensuite la Citadelle, traverse les rues de Verdun sous le regard de veuves et d’orphelins. Puis il rejoint la gare où l’attend un train en partance pour Paris. Auguste Thin : "j’ai déposé mon bouquet sur le sixième cercueil. J’ai pensé additionner les chiffres de mon régiment le 132, faisant partie du sixième corps d’armée, j’ai pensé à désigner le sixième corps".
Les sept autres Inconnus sont veillés toute la nuit à la Citadelle. Puis rejoignent le cimetière du Faubourg Pavé où ils sont inhumés au pied d’une grande croix en bois. "Les soldats sont toujours liés à leur camarade, le sixième qui lui est sous les lumières de la république à Paris. Et pour nous meusiens ça nous contente tout à fait", explique Cédric Schwindt.
Le 11 novembre 1920, un article s’interrogeait sur le destin de ces sept "recalés de l’Histoire". Candidats à la reconnaissance infinie, ils n’auront, quoi qu’il en soit, pas connu l’éternel oubli.