Le ministère de l’économie a donné jeudi 14 août 2020 son accord au britannique Liberty Steel pour racheter l’usine France Rail d’Hayange. 450 emplois sont en principe sauvés. Echaudés par les précédents repreneurs, les syndicats sont en colère, ils auraient voulu être consultés.
Dans un communiqué de presse, Bercy a annoncé ce jeudi 14 août 2020 dans la soirée, qu’il donne son autorisation au groupe britannique Liberty Steel pour acquérir France Rail Industry basée à Hayange. Il confirme ainsi le choix du tribunal de commerce de Strasbourg pris il y a trois semaines.
Si les 450 salariés sont enfin fixés sur leur sort, cette nouvelle, apprise par la presse, ne ravit pas les syndicats, qui sont plutôt remontés. En effet, selon l’intersyndicale que nos avons contactée, un rendez-vous était prévu avec un représentant du ministère fin du mois d’août pour faire le point sur les garanties d’investissement et d’emploi promis par le groupe britannique.
Des syndicats déçus et en colère
Echaudés par les échecs des repreneurs successifs, les syndicats avaient sollicité le ministère de l’économie pour une réunion qui devait avoir lieu le 24 août. Pour Djamal Hamdani, c’est un peu une trahison. L’ensemble des syndicats souhaitaient avoir de solides garanties quant au plan d’investissement et de reprise. Ils estiment qu’on leur a coupé l’herbe sous le pied.Les syndicalistes craignent que le nouveau repreneur en profite pour en tirer des bénéfices avant de fermer à son tour. L’usine mosellane, qui fabrique des rails pour la SNCF, a déjà été rachetée à plusieurs reprises ces dernières années. En 2016, c’est le groupe British Steel qui acquiert l’usine auprès de Tata Steel, pour faire faillite trois ans plus tard. Le repreneur du groupe britannique, le chinois Jingye ne souhaite pas lui conserver Hayange. L’usine a pourtant un carnet de commande rempli, signé pour 9 ans depuis 2015 avec la SNCF.Encore une fois on ne nous a pas consultés, alors que nous connaissons bien mieux le dossier que Paris. Nous n’admettons pas que l’on parle de nous, pour nous, sans nous !
La mairie vigilante sur les emplois
Même déception du côté de la mairie, où le maire RN , Fabien Engelmann s’est battu pour la survie du site. Il avait défendu l’idée d’une participation de l’Etat au capital, ce qui aurait permis de garantir, selon lui, la viabilité du site.Contacté, le délégué interministériel aux restructurations, Marc Glita, a expliqué "qu'un actionnaire minoritaire n'a pas beaucoup le droit à la parole, alors que la nouvelle Loi monétaire et financière donne au gouvernement des moyens de contrôle et d'action plus importants lorsqu'il s'agit d'investissements étrangers dans des secteurs stratégiques".Nous serons vigilants sur l’emploi, notamment celui des intérimaires et des sous - traitants, afin qu’il n’y ait pas de licenciements comme ce fut le cas ailleurs avec Arcelor Mittal.
Ce qui inquiète par ailleurs les syndicats, c’est que Liberty Steel emporte dans le même paquetage également l’usine sidérurgique Ascoval à Saint Saulve (Nord) qui doit être complémentaire, mais qui est menacée par la faillite.
Je salue l’implication remarquable des salariés et continuerai de suivre la mise en œuvre du projet industriel porté par Liberty et le respect des engagements pris pour donner un avenir industriel de long terme à ces deux sites essentiels pour notre #industrie sidérurgique. https://t.co/5m1qT3mAxy
— Agnès Pannier-Runacher (@AgnesRunacher) August 14, 2020
Bercy est confiant
Du côté de Bercy on rappelle que c'est bien la chambre de commerce du Tribunal de Grande Instance de Strasbourg qui a fait le choix du repreneur, même si c'est le ministère qui a mené les négociations. Il rappelle que Liberty Steel s'est par ailleurs engagé à investir 10 millions d'euros de fonds propres dans le capital, et 50 millions d'euros dans un prêt pour investir, notamment sur le site d'Hayange, sur la base d'une liste précise.Par ailleurs, le gouvernement a demandé à Liberty Steel de garantir les commandes à hauteur de 340.000 tonnes d'acier, en d'autre terme d'assurer les achats nécesaires au maintien de l'activité des deux usines.
Pour le ministère de l’économie, lier l'avenir d'Ascoval et celui de Hayange est plutôt une bonne chose, et cela doit permettre d'assurer la pérennité des deux sites. Selon Bruno Le Maire, « cette reprise est une étape importante d’un plan de long terme pour trouver des débouchés stables au site Ascoval et ainsi lui permettre de retrouver un équilibre économique. Elle permet également de sécuriser les approvisionnements en matière première du site de Hayange, principal fournisseur de rails de la SNCF, qui dépendait jusqu’ici principalement d’un site situé hors de l’Union Européenne ».
Le ministère souhaite ainsi créer une filière intégrée de production de rails à partir d’acier recyclé peu émetteur de CO2, dans une logique d’économie circulaire, les rails usagés de la SNCF étant refondus par Ascoval et mis en forme par France Rail Industry.
Mais les syndicats ne partagent pas l’enthousiasme de Bercy, ils restent très prudents et souhaitent toujours obtenir une commission tritpartite incluant les instances syndicales, l’Etat et le repreneur, afin que cette reprise ne soit pas un nouveau fiasco dans quelques années. Marc Glita, délégué interministériel en charge du dossier s'est dit prêt à les recevoir pour en discuter.Je continuerai de suivre la mise en oeuvre du projet industriel porté par le groupe Liberty et le respect des engagements pris pour donner un avenir industriel de long terme à ces deux sites essentiels pour notre industrie sidérurgique.