Face à la Norvège pour l'or olympique, le sélectionneur de l’équipe de France féminine de handball a disputé son dernier match à la tête des Bleues, après 23 ans de bons et loyaux services. Avec son record de longévité et surtout ses résultats, Olivier Krumbholz a marqué durablement le monde du sport collectif français.
Avant d’installer l’équipe de France féminine au sommet du handball mondial avec ses 15 médailles depuis 1999, Olivier Krumbholz a contribué à lancer une autre légende du sport tricolore. Le natif de Longeville-lès-Metz, où il vient encore régulièrement chercher les croissants à la boulangerie le dimanche matin, a connu une modeste carrière de joueur au Stade Messin Etudiant Club (SMEC) de 1976 à 1986. En première division tout de même et avec neuf sélections en équipe de France au compteur.
Lorsqu’il arrête sa carrière à 28 ans il prend les rênes de l'équipe féminine de l’ASPTT Metz Handball. Le jeune entraîneur amène le club promu au sommet et gagne à sa tête cinq championnats de France jusqu’en 1995. En janvier 1998 il est appelé à diriger le jeu de l’équipe de France féminine, qui naviguait dans l’anonymat jusque là. Dans l’hiver scandinave, Olivier Krumbholz amène son équipe en finale du championnat du monde 1999, et décroche sa première breloque au bout d’une finale perdue après deux prolongations contre la Norvège, meilleure nation de la planète balle en main. La consécration arrive en 2003, avec un premier titre mondial. Deux autres finales suivront en 2009 et 2011.
Faux départ
En 2013, le sélectionneur est écarté de l’équipe, officiellement pour cause de mauvais résultats aux Jeux olympiques. Olivier Krumbholz paie aussi certainement une gestion du groupe jugée trop cassante et autoritaire. Une ancienne joueuse de l’équipe se souvient avoir entendu une de ses partenaires se voir reprocher d’avoir emporté trop de CDs à écouter pendant une compétition !
Pendant trois ans le Messin ronge son frein. Il retrouve la tête de l’équipe en 2016, après l’échec de son successeur Alain Porte à maintenir l'équipe de France au meilleur niveau mondial. Olivier Krumbholz revient transformé. Fini le ton cassant. Le coach est à l’écoute du collectif. Il a appris pendant son exil et met l’équipe de France sur les rails de deux nouveaux succès planétaires en 2017 et 2023, en plus d’un titre continental en 2018. Et surtout, après une finale perdue aux JO de Rio, les Bleues ramènent l’or olympique de Tokyo, ce qui leur permet de défendre leurs titres aux Jeux de Paris 2024.
S’il ne fait pas aussi bien niveau palmarès que son homologue chez les garçons, Claude Onesta avec ses deux JO, ses trois titres mondiaux et ses trois couronnes continentales, le Messin n’a pas trop à rougir : lui aussi fait partie des cinq entraîneurs à avoir gagné tous les titres de la planète handball. L’ancien patron des Bleus a aujourd’hui la charge de la haute performance à l’Agence nationale du sport. Rigolard, il se souvient bien de son homologue lorrain : "on était à la tête de nos équipes en même temps, on se croisait souvent. Moi je voulais qu’on se mette ensemble pour porter nos revendications auprès de la Fédération mais il me laissait toujours tout seul. Et ensuite il réclamait à son tour ce que j’avais obtenu moi !"
Sa science du jeu lui a permis d'adapter en permanence l'équipe de France aux évolutions du handball depuis 25 ans. Sortie de l'anonymat, exposé médiatiquement, la France est entrée dans l'ère professionnelle sous l'autorité d'Olivier Krumbholz qui a su tirer le meilleur des nouvelles règles, et détecter régulièrement les potentiels. Certainement grâce à son épouse Corinne, ancienne joueuse professionnelle, aujourd'hui à la tête du centre de formation du Metz Handball.
Guerre de succession
A 66 ans, Olivier Krumbholz a dit qu’il prendrait sa retraite en 2024, certainement après les Jeux de Paris. Les prétendants au poste ne manquent pas, à commencer par son actuel adjoint, Sébastien Gardillou, lui aussi passé par l’équipe féminine de Metz comme entraîneur en 2010-2012. Il connaît les arcanes de la Fédération par cœur, grâce à son travail depuis 2016 au côté du Lorrain.
L’actuel coach du Metz Handball, Emmanuel Mayonnade, fait figure également de successeur idéal puisqu’il entraîne ou a entraîné une grande partie des joueuses qui composent l’équipe de France actuelle. Il a également mené la sélection des Pays-Bas au titre mondial en 2019, ce qui lui a permis de devenir le premier entraîneur français à remporter le trophée à la tête d’une équipe étrangère. Il possède une expérience des grands rendez-vous, grâce à la qualification de Metz pour les demi-finales de la Ligue des Champions ces deux dernières saisons.
Le nom de Laurent Bezeau, passé par Brest, le grand rival de Metz ces dernières saisons, circule également dans les couloirs de la Fédération. Finaliste de la Ligue des Champions en 2021, il a depuis rejoint l’Agence nationale du sport comme conseiller expert haute performance à la demande… de Claude Onesta son patron actuel, qui peut revendiquer une part importante de la réussite des sportifs français aux JO. Nul doute que sa voix rocailleuse sera encore très écoutée au moment de choisir un successeur à Olivier Krumbholz dans quelques semaines.