Dès la fin de leur activité sur décision du Premier Ministre Edouard Philippe, une vingtaine de restaurateurs de Thionville se sont organisés pour chacun à leur tour livrer 50 repas chaque jour aux soignants de l'hôpital de Bel-Air: c'est leur façon à eux d'encourager le personnel hospitalier.
Adil Soudani ne mâche ni ses mots, ni son enthousiasme.Ce restaurateur très connu des gastronomes mosellans n’a pas hésité longtemps avant de se lancer dans l’aventure: "le samedi soir j’ai entendu le Premier Ministre dire qu’il fallait fermer nos établissements, ok… Mais moi dès le dimanche matin je me faisais déjà chier! Alors j’ai créé un groupe sur Facebook: #merendreutile parce que je ne voulais pas rester inactif face à la situation, explique le cuisinier tout en saupoudrant d’épices les morceaux d’agneaux qui vont rejoindre le four. "Et rapidement j’ai reçu l’appel d’une infirmière de Bel-Air qui m’a demandé s’il était possible de préparer des plats chauds pour les soignants, parce qu’ils devaient se contenter de sandwiches la plupart du temps. J’ai pris mon téléphone, j’ai appelé mon confrère Lionel Gallois et c’était parti".
Réseau
En deux heures, les deux complices réunissent autour d’eux une vingtaine de restaurateurs de Thionville et des environs. Adil fait marcher son réseau, reçoit de la marchandise offerte par ses fournisseurs, mais aussi par les boulangers et les maraîchers du coin, et même sa famille s’y met: sa femme et ses enfants, Inès et Elias, investissent la cuisine pour confectionner des tiramisus!Depuis, quand il n’est pas au piano, il est sur les routes toute la journée pour récupérer des denrées, du chocolat, des yaourts… Qui viendront agrémenter les plateaux repas. "On a dû s’adapter, parce que la restauration collective c’est une autre monde. Quand on s’est pointé le premier jour à l’hôpital, on a dû apprendre tout de suite les contraintes de température, de stockage etc.", explique Frédéric Sichet, un ami de la bande, directeur d’un grand magasin dans le civil, et responsable bénévole des livraisons avec son camion frigorifique: "je bosse dans la grande distribution, je suis ni infirmier ni médecin, mais je veux me rendre utilise également, alors les livraisons je sais faire".
Bénévole
"On a pris un coup de massue sur le crâne avec la fermeture de nos établissements c’est sûr, et quand on a fait les paies de mars, on s’est tous demandé comment on allait faire pour survivre. Mais on a vite mis ça de côté pour se remettre au piano et se rendre utile. Déjà ça nous permet de garder la main, et ensuite c’est notre façon à nous les professionnels de la restauration, d’applaudir les soignants, de leur témoigner notre reconnaissance et notre soutien", témoigne Lionel Gallois, chef d’un restaurant très connu de Thionville. C’est lui qui a mis à disposition de tous ses confrères sa cellule de refroidissement rapide, qui permet de maintenir les plats à 4°, la norme dans la restauration collective. C’est de chez lui que partent toutes les livraisons, après un expresso vite avalé, pour livrer à 11h30 pile tous les matins à Bel-Air.Quand Fred arrive à l’hôpital, il est attendu comme le Messie : "c’est quoi au menu aujourd’hui ?" est la première phrase qui l’attend, et tout de suite après "merci pour ce que vous faites".