Antje Lenz est une européenne, une habitante de Strasbourg, originaire d'Allemagne de l'Est. Le 3 octobre 1990, les deux Allemagne étaient réunifiées. 30 ans après, que reste-t'il de cette division et de la RDA ? L'unité allemande est elle faite ?
Antje Lenz est née dans une petite ville à 70 km de Rostock, dans le Mecklenburg-Vorpommern, dans l'ex Allemagne de l'Est. Elle habite aujourd'hui à Strasbourg et elle travaille pour la ville de Kehl. Tous les jours, elle traverse le Rhin, sa fille est scolarisée dans une école bilingue.
"Je me sens européenne. Cela fait 30 ans qu'a eu lieu la réunification allemande, et c'est quelque chose de très positif pour moi. Ma famille habite encore à l'Est de l'Allemagne. Pour eux, et parce qu'ils sont aussi plus âgés, c'est autre chose. Moi je peux dire que je suis une européenne avec des racines est-allemandes."
Quand le mur qui sépare l'Est de l'Ouest tombe, Antje Lenz a 14 ans. Elle passe son Abitur (baccalauréat) puis part faire des études de gestion à Rostock et à Stralsund.
L'entr'aide
De la RDA, elle se souvient de peu de choses. Les pionniers (sortes d'organisations scouts quasi obligatoires) et les ateliers de travail les après-midis. "Nous parlions de politique mais nous faisions plein de choses, de la couture et surtout nous nous entraidions. Ce qui me reste, c'est cette aide des uns envers les autres, c'était quelque chose qui me plaisait bien."Après ses études, Antje Lenz s'installe dans le Bade-Wurtemberg, Freiburg, puis Kehl, et enfin Strasbourg. Son mari vient de l'Est, comme elle. Leur fille grandit dans le système scolaire allemand à Kehl, ouest-allemand donc, avec une sélection des élèves très jeunes, dès la cinquième classe (équivalent du CM2 français).
"Ici les élèves sont séparés les uns des autres très tôt. En RDA, tout le monde allait ensemble jusqu'à la dixième classe (équivalent de la seconde en France), on s'aidait les uns les autres pour y arriver, et après on pouvait avoir des parcours différents."
"Tout n'était pas mauvais"
Antje Lenz ne regrette pas la RDA. Elle trouve par contre dommage que "beaucoup de choses ont été cataloguées "mauvaises" parce que venant de RDA, sans distinction. Alors que les crèches et les écoles ouvertes toute la journée ont permis aux femmes de pouvoir travailler. Et finalement, à l'Ouest, enfin on y arrive ! On a perdu du temps, on aurait pu garder certaines choses.""Alors bien sûr que grâce à la chute du mur, j'ai pu faire plein de choses qui n'auraient pas été possibles en RDA : voyager, découvrir plein de pays... et puis plein de choses sont aujourd'hui meilleures et plus confortables."
L'unité allemande
Le Bade-Wurtemberg est très loin de l'ancienne frontière qui séparait les deux Allemagne. "Au début, j'étais très exotique pour les allemands d'ici, certains me demandaient si nous avions des douches à l'Est ! Nous ne vivions pas mal, il y avait très peu de choix surtout : une sorte de café, une sorte de lait."Mais les choses ont changé peu à peu, et "maintenant les gens d'ici posent des questions et s'intéressent à l'Allemagne de l'Est. Je connais beaucoup de gens qui passent leurs vacances sur la Baltique ou à Berlin, au fur et à mesure c'est devenu évident et très normal. Les différences se gomment peu à peu."
"Erinnerungskultur"
Pour ne pas oublier leurs racines est-allemandes, Antje et son mari racontent à leur fille de 7 ans beaucoup de choses, "pour qu'elle n'oublie pas comment c'était la RDA, et ce que ça voulait dire d'être allemand de l'Est. C'est une mémoire que nous ne voulons pas voir disparaître."Une exposition de photos prises en RDA par Harald Hauswald sont à découvrir à la MISHA, en partenariat avec l'Institut Goethe de Strasbourg. Le photographe, Harald Hauswald photographiait les gens, tous les gens, ce qui lui a valu des ennuis avec les autorités.
"Les photographies de Hauswald façonnent l’image que nous avons de la RDA avant sa chute et font régulièrement l’objet d’expositions dans le monde entier", trouve-t'on exposé sur une biographie du photographe dans l'exposition. Il fait partie de l'agence de photographes Ostkreuz. Les textes de l'expostion sont de Stephan Wolle et reprennent des thématiques chères au photographe. L'exposition reste à la MISHA jusqu'au 30 octobre 2020.