Sauer-Pechelbronn : après le pétrole, une cité des énergies

Au nord de l'Alsace, il y a du pétrole. Le musée de Merkwiller-Pechelbronn, qui raconte l'histoire de son extraction, devrait bientôt être déplacé et agrandi. Pour devenir, d'ici quelques années, une cité des énergies, dédiée également aux énergies renouvelables.
 

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Le musée du pétrole de Merkwiller-Pechelbronn, dans le Bas-Rhin, surprend le visiteur qui vient pour la première fois, car il est tout petit, mais très riche en informations. On y découvre les particularités géologiques de ce gisement pétrolifère, à une cinquantaine de kilomètres au nord de Strasbourg, entre Haguenau et Wissembourg, et surtout l'histoire de son extraction dans ce secteur. Mais les deux petites pièces du musée sont largement insuffisantes pour contenir et présenter l'ensemble des collections, et l'association des Amis du musée du pétrole, qui fournit une bonne partie des guides, a besoin d'être soutenue. Depuis quelques années, la communauté de communes Sauer-Pechelbronn, en lien avec le Parc des Vosges du Nord, réfléchit à l'avenir du musée, et voudrait, à terme, créer une véritable "cité des énergies", qui présenterait non seulement l'histoire du pétrole dans la région, mais également les énergies renouvelables.


Le plus vieux gisement du monde exploité depuis des siècles

Dès 1498, l'historien humaniste Jakob Wimpheling signale la présence d'huile de pétrole en Alsace du Nord. Ce liquide graisseux servait de lubrifiant, mais aussi de remède pour soigner les plaies et combattre les parasites de la peau. Assez lourd et visqueux, le pétrole brut alsacien ne jaillit pas du sol. Il est présent dans le sous-sol, souvent mêlé à du sable, et affleure parfois à ras de terre. Au début du 18e siècle, le gisement est exploité à ciel ouvert, puis dès 1741, une société est créée – probablement la plus ancienne société pétrolière au monde.


3000 salariés avant la Seconde guerre mondiale

Au fil des ans, à Pechelbronn, les méthodes d'extraction évoluent. On creuse des puits de plus en plus profonds, jusqu'à 1200 mètres sous terre. Dès la fin du 19e siècle fonctionnent des pompes à balancier. On en trouve près de 650 en activité après la Seconde guerre mondiale, jusqu'à Ohlungen et dans la forêt de Haguenau. Dès 1917, une autre méthode d'extraction est employée en parallèle : 430 kilomètres de galeries sont construites sous terre, jusqu'à 400 mètres de profondeur, afin de s'approcher le plus possible des couches de sable pétrolifère. Dans ces galeries, des puisards creusés à distance régulière permettent de recueillir le précieux liquide, et de le pomper plus efficacement. Au plus fort de son activité, dans l'entre-deux-guerres, le site de Pechelbronn emploie 3000 personnes. Beaucoup viennent de loin, Lembach, Soufflenheim ou Obersteinbach, et effectuent matin et soir une vingtaine de kilomètres à vélo.

Bombardé durant la guerre, le site de Pechelbronn reprend pourtant par la suite. Mais faute de rentabilité, il périclite dès les années cinquante. L'exploitation minière, le forage et le pompage s'arrêtent peu à peu. La raffinerie ferme en 1970. Seule la marque d'huiles et de carburants Antar, créée à Pechelbronn en 1927 et rachetée par Elf, survit jusqu'à l'orée du 21e siècle. Aujourd'hui presque tombé dans l'oubli, le site de Pechelbronn était pourtant le berceau de l'Institut français du pétrole, transféré à Strasbourg en 1923 puis à Paris dès 1939. C'est aussi à Pechelbronn qu'a été créée en 1926 la première école de maîtres-sondeurs, qui, aujourd'hui, appliquent leur savoir-faire sur les champs pétroliers du monde entier.

Un musée pour ne pas oublier


Dès 1970, sur le site désormais fermé, de nombreuses pièces de métal sont vendues et les bâtiments laissés à l'abandon. Mais une petite équipe d'anciens crée un musée dans l'ancienne école de Merkwiller-Pechelbronn. "Ils ont ressenti que cet héritage ne pouvait pas être tout simplement abandonné" explique Denise Weinling, présidente de l'association des Amis du musée du pétrole, guide et animatrice. "On a trouvé ici tant de choses, tant d'objets et de photos (…) qu'on ne pouvait pas simplement tourner la page." Mais aujourd'hui, ce lieu de mémoire, trop petit et trop dense, ne correspond plus aux besoins actuels. L'accueil des groupes est compliqué, faute de place, et il manque cruellement de locaux pour proposer des animations aux groupes de scolaires. En outre, parmi les guides, beaucoup sont des bénévoles très actifs, mais vieillissants, qui ont besoin de relève.


Le nouveau musée, une première étape

Une première étude, menée l'an dernier, a permis de déterminer le lieu idéal pour accueillir le musée dans un nouveau cadre : le seul bâtiment encore intact de l'ancien site d'extraction. Côté rue, il est situé sur la commune voisine de Preuschdorf, et a longtemps servi de garage. Tout à côté, le "bât'innovant", deux maisons reliées, construites en 2014 par la communauté de commune Sauer-Pechelbronn à titre expériemental, entièrement en bois local, hêtre et pin, pourraient héberger l'accueil et la cafétéria du nouveau musée. "Notre premier but est de sauver le musée, explique Charles Schlosser, le vice-président de la communauté de communes. Il ne peut pas continuer comme ça. Nous devons soutenir l'association,
aider l'équipe et trouver des forces neuves, des énergies neuves et une volonté nouvelle."


Dans l'immédiat, il s'agit de faire l'inventaire des nombreuses collections du musée, dont les trois quarts ne sont pas exposées, mais éparpillées en divers endroits : archives reçues de l'entreprise Elf, outils de mineurs, plans, maquettes, innombrables photos, etc. A l'arrière du futur musée, il faudra aussi couper quelques arbres, afin que l'ancien site d'exploitation et son terril redeviennent visibles.


Un site au bois dormant

En effet, le site d'exploitation abandonné depuis la fin des années 1960 est caché sous la végétation. Avec les années, il a gagné une beauté singulière, celle des friches sur lesquelles la nature reprend ses droits. Murs de briques mangés de lierre, fenêtres béantes donnant sur des arbres, toits effondrés… Les lieux sont magiques, mais trop dangereux pour les ouvrir à un public livré à lui-même. Pourtant, les Amis du musée du pétrole voudraient pouvoir sensibiliser les visiteurs à l'esthétique et à la valeur du site. "Les bâtiments sont trop branlants, impossible de laisser le public y déambuler", confirme Denise Weinling. Mais on pourra organiser des visites guidées, en restant à une certaine distance des bâtiments." Un circuit qui s'intégrerait parfaitement à la visite du futur musée.    

Pas à pas vers une cité des énergies

La communauté des communes se donne jusqu'à la fin de 2020 pour trouver – via des fonds propres, des subventions et du mécénat - les finances nécessaires aux travaux et au fonctionnement du futur musée. Qui, tel qu'il est conçu, pourrait facilement accueillir 10.000 visiteurs par an, contre les 4.500 actuels. "Notre volonté est que la population n'oublie pas l'histoire du pétrole, et qu'elle la transmette de génération en génération, ajoute Charles Schlosser. Ce n'est pas seulement un projet muséal, mais un projet sociologique." Cette première étape franchie, le projet sera de créer, dans un deuxième temps, une véritable "cité des énergies". Un lieu où il ne sera plus simplement question d'ancienne exploitation de pétrole, mais également d'énergies renouvelables :  énergie passive – dont les deux maisons en bois du bât'innovant sont d'excellents exemples, méthanisation, et surtout géothermie, pour laquelle la commune voisine de Soultz-sous-Forêts est un site pilote. "Mais on reste prudents", assure Charles Schlosser. Offrir un nouveau cadre au musée du pétrole est le premier but. "Ensuite, si on peut développer le projet, on le fera, mais on ne pourra pas avancer seuls, c'est financièrement impossible." Pour créer cette future cité des énergies, qui comprendrait, outre les salles d'exposition, des lieux d'animations, de conférences et de formation, le coût estimé à plusieurs millions d'euros devrait être porté par des mécènes, et des acteurs du secteur de l'énergie.
 
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