On l'a appris lundi 15 janvier 2024, 120 postes d'enseignants doivent être supprimés dans le premier degré à la rentrée, dans l'académie Nancy-Metz. À chaque annonce de la carte scolaire, son lot de stress pour les écoles qui risquent de perdre une classe ou de fermer leurs portes. Au Girmont-Val-d'Ajol dans les Vosges, le projet développé par les parents d'élèves, a permis de rouvrir l'école qui était fermée depuis une quinzaine d'années.
Comment faire quand la carte scolaire ne répond plus aux besoins de la population ? Il y a cinq ans, les parents d’élèves de l’école "Les jeunes pouss" de Girmont-Val-d’Ajol (Vosges) ont trouvé la solution.
L'école publique du village était fermée depuis une quinzaine d'années mais elle accueille à nouveau des enfants, grâce au projet d'école alternative privée, porté par les parents d'élèves et soutenu par la municipalité. Cinq ans après sa mise en place, le pari semble gagnant et permet de redonner du dynamisme à la commune.
Deux enseignants pour 16 enfants
C’est une commune de 270 habitants nichée à l’extrémité ouest du parc régional des Ballons des Vosges. Le petit village dispose de sa propre école privée : 16 enfants de 3 à 11 ans, séparés en deux classes. À la tête du programme d’enseignement, Thierry Germain enseignant à plein temps, et Belé Bopp enseignante à mi-temps.
"L’école existe depuis 2017, mais pour moi, c'est ma troisième rentrée. J’ai une formation classique. J’ai travaillé deux ans dans le public et quand ce poste s’est libéré, j’ai saisi l’opportunité", explique la jeune femme qui a également fait une formation Montessori.
"Je tiens beaucoup à la méthode classique qui amène les élèves plus âgés vers le collège. L’effectif est réduit. Ils sont huit en deuxième et troisième cycle. C’est une autre manière de travailler beaucoup plus individualisée. J’ai énormément de liberté, mais c'est aussi une très grande responsabilité, même si on est approuvé par l’inspection académique", ajoute l'enseignante.
Concernant les absences, les deux enseignants " évitent d’être malades", partage en plaisantant la jeune enseignante.
"Si je dois être absente, on fait appel aux parents qui ont des compétences différentes. Nous avons également deux jeunes en service civique et sur certains ateliers, on peut déléguer, mais les absences ne sont pas remplacées".
Une école en autofinancement
L’école ne perçoit aucune subvention. Le plus difficile est d’arriver à un équilibre budgétaire. Les frais mensuels sont de 200 € par enfant. Cela permet de couvrir les salaires des deux enseignants. Lilian Didier, parent d’élèves, est également à la tête de l’association "Les jeunes pouss" depuis un an.
"Il faut un noyau solide de parents, car ils participent à l’entretien des locaux, les animations, la récolte des fonds pour les sorties. On doit avoir minimum 14 enfants pour que la trésorerie fonctionne. Notre école est une école officielle, associative et privée. Tous les ans, en mars, nous avons une visite de l’inspecteur avec une conseillère pédagogique", ajoute le président de l'association. Sa fille de neuf ans est également inscrite dans l’école. "Elle m’a dit ce matin, papa, c'est dommage qu’il n’y ait pas d'école mercredi, j’irai bien moi", partage le papa engagé.
À ses débuts, l'école a connu des difficultés financières, mais au fil des années, elle semble avoir trouvé son équilibre. Et cela participe au dynamisme de ce petit village.
Plusieurs années sans école
L’école publique a été fermée en 2001. Le maire, Patrick Vincent, se souvient de la détresse des parents.
"C’était le choc pour le village. C’était dur. Je faisais moi-même partie des parents d’élèves. On s’est battu, mais ça n’a rien donné. Des années plus tard, en 2017, des parents d’élèves sont venus avec le projet et depuis la municipalité met à disposition gratuitement les locaux", se réjouit le maire de la commune.
Autre bonne nouvelle : la population du village a augmenté de 15 nouveaux habitants.
"C’est une plus-value pour le village, une école qui tourne, du monde à la sortie. On a des gens qui viennent d’ailleurs. Trois nouvelles familles se sont installées. On a eu deux naissances et deux couples ont construit leurs maisons ici. Ça fait de Girmont-Val-d’Ajol, un village dynamique, alors qu’on avait une population vieillissante", précise Patrick Vincent (SE), maire de Girmont-Val-d’Ajol.
L'école de Girmont-Val-d'Ajol devrait être épargnée par les suppressions de postes cette année, mais en fonction de la démographie, d'autres communes n'auront pas cette chance. La nouvelle carte scolaire sera dévoilée en février 2024.