Après le suicide du jeune Lucas à Golbey (Vosges), quatre mineurs âgés de 13 ans seront jugés pour harcèlement scolaire ayant entraîné le suicide de leur camarade. Maintenant que va-t-il se passer pour eux ? Vendredi 3 février, Fabienne Nicolas, ancienne juge pour enfants, répond à nos questions.
Après le suicide du jeune Lucas, quatre mineurs de 13 ans seront jugés pour harcèlement scolaire, normalement au printemps 2023. Lucas a mis fin à ses jours début janvier à Golbey (Vosges). "Lors de leurs auditions, les mineurs scolarisés dans le même établissement que Lucas, ont admis avoir proféré à plusieurs reprises des moqueries à l’encontre de leur camarade", explique le procureur de la République d'Epinal, Frédéric Nahon, dans un communiqué. "Deux filles et deux garçons âgés de 13 ans, seront jugés pour harcèlement scolaire ayant entraîné le suicide de leur camarade".
Le harcèlement moral commis dans un établissement scolaire devient du harcèlement scolaire
Fabienne Nicolas, vice-présidente du tribunal de Nancy
Maintenant, que va-t-il se passer pour les quatre adolescents ? Une première audience pourrait se tenir au printemps. Elle aura pour intérêt d'établir précisément les faits.
Fabienne Nicolas a été juge des enfants. Elle est désormais vice-présidente du TGI de Nancy (Meurthe-et-Moselle). Elle ne sera pas en charge de l'affaire, mais nous donne quelques éléments de compréhension. "On fait du droit. Le procès servira déjà à vérifier si l’infraction est constituée. Qu’est-ce qui s’est passé ? Est-ce que ça constitue une infraction ? Est-ce qu’il y a bien du harcèlement moral dans un établissement scolaire, ce qui devient bien sûr du harcèlement scolaire ? Ensuite, il faudra constater que le suicide est en lien avec ce harcèlement scolaire".
Les enfants et leurs juges
Lundi 30 janvier, Séverine, la maman de Lucas, estime que tout n’a pas été fait pour protéger son fils. "Que fait-on de la responsabilité des adultes ?", dit Fabienne Nicolas. La maman a effectué plusieurs signalements auprès de l’établissement scolaire. Et pendant sa conférence de presse, quatre fois, elle a répété : "mais ça ne reste que des enfants et je ne leur veux pas de mal. Malgré ce qui s’est passé, on veut les protéger."
Selon Fabienne Nicolas, "évidemment que ça ne reste que des enfants et que la justice doit en tenir compte. De toute manière, on va privilégier les mesures éducatives".
Il faut aussi maintenir les relations entre les enfants et leurs parents. "Il faut qu'il y ait une infraction au sens du code pénal. Normalement, la justice va mettre en avant une mise à l’épreuve éducative, des mesures d’investigation socio-éducative".
On va surtout mettre l’accent sur l’éducatif plutôt que sur le répressif. Et aussi tout dépend de l’âge de l’enfant, de ses antécédents. Là, ils sont quand même jeunes. Quoiqu'il en soit, il s’agit de réinsérer les enfants
Fabienne Nicolas
En France, il existe plusieurs dispositifs de protection de l’enfance. "On peut ouvrir une période d’observation de six à neuf mois où il y aura un suivi éducatif avec un module insertion, un module investigation - qui est le mineur, quelle est son histoire ? Il y a un module réparation le temps de trouver un lien avec l'infraction. Quoiqu'il en soit, il s’agit de réinsérer les enfants, et d'éviter les peines d’emprisonnement."
Fabienne Nicolas ajoute : "On va surtout mettre l’accent sur l’éducatif plutôt que sur le répressif. Et aussi tout dépend de l’âge de l’enfant, de ses antécédents. Là, ils sont quand même jeunes. Il est probable que ce soit le tribunal pour enfants qui soit amené à statuer à huis clos". Au moment des faits, le plus jeune des adolescents est âgé de douze ans.
Une marche blanche sera organisée dimanche 5 février à Épinal en mémoire de Lucas. (Voir le lieu de sa marche blanche sur la carte ci-dessus)