Mardi, lors de la journée de mobilisation organisée par la CGT, Mickaël Wamen, représentant du syndicat sur le site picard, a lancé l'idée de créer une Scop pour sauver l'usine Goodyear Amiens Nord. Une annonce plus politique qu'il n'y paraît.
La mobilisation en demi-teinte du 26 février est révélatrice de la situation inconfortable de la CGT Goodyear Amiens: décriée par nombre de médias qui se sont interrogés sur sa responsabilité dans la fermeture du site, directement attaquée par Maurice Taylor, le patron de Titan, dans sa lettre à Arnaud Montebourg, la CGT doit redorer son blason auprès de ses troupes les plus fidèles, certes, mais aussi auprès de ceux qui doutent...
Car en interne, certains commencent à douter: douter de la stratégie "jusqu'au-boutiste" de Mickaël Wamen, douter d'une suite qui tournerait à leur avantage...
Syndicat ultra-majoritaire depuis de nombreuses années, la CGT de Mickaël Wamen est connue pour ses méthodes abruptes...Des méthodes qui en lassent de plus en plus dans l'usine, si l'on croit les "off" révélés aux journalistes sur le parking de l'entreprise.
Les autres syndicats ont du mal à se faire entendre, tant auprès des médias que des salariés: la CGT occupe toute la place...
Une place qui commence à se réduire, à voir le nombre de Goodyear présents mardi 26 février sur le parvis de l'hôtel de ville. Le manque d'affluence a même contraint la CGT à annuler le défilé prévu dans les rues d'Amiens.
Alors, l'annonce de créer une Scop n'est pas sortie du chapeau de la CGT par hasard….
Elle a besoin de maîtriser à nouveau le jeu et de reprendre sa place exclusive auprès des salariés.
Lancer l’idée d’une Scop, réalisable ou pas, c’est par ailleurs une nouvelle façon d’exister pour la CGT : souvent accusée d’être contre toute proposition, en faire une elle-même, et non des moindres, c’est couper l’herbe sous le pied des détracteurs…La CGT n’est plus dans l’opposition mais dans le constructif…
Et puis l’idée de la Scop, c’est également une réponse symbolique à Maurice Taylor : une société coopérative est détenue financièrement par les salariés… « Alors, vous voyez, Mr Titan, nous, les Goodyear d’Amiens Nord, nous ne sommes pas des fainéants puisque nous sommes prêts à payer de notre poche pour travailler »...
Interrogée par téléphone, un représentant de la CGT admet que l'idée vient de l'avocat du syndicat, Me Rilov : "ça fait 15 jours qu'on travaille dessus...en gros, on voudrait racheter l'usine aux mêmes conditions faites par la direction à Titan: 1 euro symbolique...Si la direction refuse ? Il faudra qu'elle explique à un juge pourquoi elle voulait bien faire ce prix à Titan et pas à nous...". Ou quand un syndicat de gauche se met dans la peau d'un capitaliste américain....