Goodyear, géant américain du pneumatique, s'est vu confirmer en appel sa condamnation de mai 2020 pour licenciement abusif au sein de son usine d'Amiens nord. La cour confirme également l'indemnité définie en première instance par les prud'hommes d'Amiens, équivalente à six mois de salaire.
C'était une décision attendue. Près de dix ans, jour pour jour, après les licenciements des 1 175 salariés de l'usine Goodyear d'Amiens nord, la cour d'appel d'Amiens a rendu son arrêt le 22 février 2024. Appelée à se prononcer sur le cas d'un ex-salarié de l'usine, elle juge que son licenciement "est dépourvu de cause réelle et sérieuse" et confirme la condamnation en première instance.
"Même si les indemnités restent faibles, aux alentours de six mois de salaire, la même somme que celle accordée par le Conseil des prud'hommes, la décision de la cour d'Amiens est une nouvelle victoire essentielle. L'arrêt explique de manière précise et détaillée que le groupe Goodyear n'avait pas de justification économique valable pour fermer son usine d'Amiens nord", se félicite Me Fiodor Rilov, l'avocat de salariés.
Un combat judiciaire de plusieurs années
En 2014, ils ont donc été plus d'un millier à voir leur usine d'Amiens nord, spécialisée dans la fabrication de pneus agricoles, fermer ses portes définitivement. Pour nombre d'entre eux, le combat judiciaire s'est poursuivi bien des années plus tard. Après la fermeture du site, 832 ex-salariés de Goodyear prennent en effet part à une action collective pour contester le motif économique de leur licenciement.
En janvier 2020, lors d'une audience exceptionnellement délocalisée dans la salle de spectacles Mégacité, les avocats de Goodyear-Dunlop avaient alors mis en avant les dettes colossales du groupe. Une ligne qui ne tenait pas pour l'avocat des salariés, Fiodor Rilov : "Pendant qu'on licenciait plus de mille personnes au sein de l'usine d'Amiens Nord de Goodyear, le groupe américain faisait simultanément 2,5 milliards de dollars de profits !" Le conseil des prud'hommes leur donne raison le 28 mai 2020.
En septembre 2023, la chambre des prud'hommes a donc examiné l'appel de la société. Quelques salariés, qui avaient refusé de signer l'accord après la décision prud’homale de mai 2020, étaient présents. La cour a débouté l'appel du groupe américain. Les difficultés connues par la seule usine d'Amiens nord ne suffisent pas aux yeux de la cour d'appel à justifier de "l'existence d'une menace sur la compétitivité" de l'entreprise. La cour rappelle que Goodyear avait en 2014, année de la fermeture de l'usine, "distribué pour la première fois depuis 2004 des dividendes à ses actionnaires".
Le groupe Goodyear dispose désormais de deux mois à compter de la décision de la cour d'appel pour se pourvoir en cassation.