Douai : la cour d'appel donnera mardi son avis sur l'extradition d'un présumé génocidaire rwandais

La chambre d'instruction de la cour d'appel de Douai donnera mardi son avis sur la demande d'extradition de l'ancien colonel rwandais Laurent Serubuga, que le Rwanda souhaite juger pour "massacre collectif", et qui a été interpellé le 11 juillet dans le Nord.

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"Laurent Serubuga est recherché par les juridictions du Rwanda pour +massacre collectif+ et +atteinte aux biens des personnes+", a expliqué à l'AFP le parquet général de Douai.

"Nous allons émettre le 13 août un avis positif ou négatif concernant son extradition au Rwanda", a-t-il dit au sujet de cet officier visé pour son rôle présumé dans le génocide de 1994 qui fit en trois mois 800.000 morts au Rwanda, selon l'ONU, majoritairement des Tutsis mais également des Hutus modérés.

"Cet avis sera ensuite transféré au ministère de la Justice, qui le transfèrera à son tour au Premier ministre qui prendra la décision finale", a-t-il précisé. "S'il n'est pas recherché par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), Laurent Serubuga fait cependant partie de certains cas annexes qui, selon le TPIR doivent être jugés par les juridictions du Rwanda", a souligné le parquet.

A la retraite lors du génocide ?


Le colonel Laurent Serubuga fit partie du groupe de 11 officiers - les "Camarades du 5 juillet 1973" - qui aidèrent le général major Juvénal Habyarimana à renverser le président Grégoire Kayibanda, au pouvoir depuis l'indépendance du pays en 1962.

Ayant occupé quelques années plus tard les fonctions de chef d'état-major adjoint de l'armée rwandaise, Serubuga fut poussé à la retraite en juin 1992. Mais "il avait repris du service en 1994", a assuré à l'AFP Alain Gauthier, président du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR).

"Mon client était déjà à la retraite lors du génocide. Il n'y a aucune preuve" qu'il ait commis les faits dont on l'accuse, a rétorqué l'avocat de M. Serubuga, Me Thierry Massis. "Cette demande d'extradition est infondée et arbitraire", a-t-il ajouté.

Des extraditions annulées en France


Le CPCR a constitué "un dossier prouvant que M. Serubuga a participé au génocide" et s'est constitué en 2007 partie civile. "Mais nous n'avons aucun espoir" que la demande d'extradition aboutisse, a regretté M. Gauthier.

Jusqu'à présent, si des avis favorables à l'extradition de Rwandais ont parfois été rendus, ces décisions ont à chaque fois été annulées par la Cour de cassation. La justice française estime que les droits de la défense pourraient ne pas être garantis au Rwanda, pays dirigé par Paul Kagame, issu de la rébellion tutsi arrivée au pouvoir après le génocide.

"Si Laurent Serubuga est extradé, de graves menaces pèseront envers sa personne en raison de ses origines hutues", a renchéri Me Massis, qui juge que "cette extradition ne sera pas conforme aux normes européennes des droits de l'Homme, car le Rwanda ne les respecte pas."

Jugé comme hutu ou génocidaire ?


Ce que conteste le CPCR : "Des pays nordiques, mais aussi le Canada et les Etats-Unis ont déjà extradé d'anciens militaires rwandais. Au Rwanda, ils ne seront pas jugés en tant que hutus, mais en tant que génocidaires", a assuré M. Gauthier.

Dans un communiqué de presse datant de juillet 2013, l'ambassade du Rwanda en France a regretté que la France "refuse quasi systématiquement le renvoi devant la Justice rwandaise du plus grand nombre de ces présumés génocidaires se trouvant actuellement sur son sol."

Une vingtaine d'enquêtes liées au génocide rwandais sont ouvertes au TGI de Paris, mais seule celle visant le Rwandais Pascal Simbikangwa a pour l'heure été bouclée. Il sera jugé en février et mars 2014, à l'occasion du premier procès d'assises en France d'un complice présumé du génocide rwandais.
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