RC Lens / Mammadov : qui possède les Sang et Or aujourd'hui ?

Après son passage devant la DNCG, Gervais Martel, le président du Racing Club de Lens, avait annoncé un possible changement d'actionnaire majoritaire au 1er janvier 2015. L'échéance est désormais passée et c'est silence radio sur le sujet.  

"Il y a une possibilité qu'au 1er janvier, il y ait un changement d'actionnaire. Si ce n'est pas Hafiz Mammadov, ce sera un autre groupe avec lequel on a déjà discuté et pris accord pour entériner une évolution capitalistique début janvier. Ce ne sera pas un "one-shot", ça s'inscrit dans la durée car il faut assurer la pérennité du club"". Voilà ce qu'annonçait Gervais Martel, le 17 décembre dernier, au lendemain de son passage devant la Direction Nationale du Contrôle de Gestion (DNCG), le gendarme financier du football professionnel français. "Au 31 décembre, il y aura une décision qui sera prise. Soit (Hafiz Mammadov) fait face à ce qu'il a promis, soit il ne fait pas face et il y aura un autre actionnaire", ajoutait le président du RC Lens, quelques jours plus tard. La Saint-Sylvestre est désormais passée et le club est désormais muet sur le sujet. Un sujet soigneusement évité par Gervais Martel dans les voeux qu'il a adressés aux supporters pour cette nouvelle année 2015. 

Il faut dire qu'un nouveau rebondissement est survenu en coulisses fin décembre. Hafiz Mammadov, propriétaire des Sang et Or depuis l'été 2013, est sorti de son silence, clamant qu'il n'avait absolument pas l'intention de lâcher le club, ni de passer le relais à un autre actionnaire. Plus surprenant encore, il a assuré n'avoir paraphé aucun accord en ce sens. Si sa signature figure sur un document, il s'agit d'une falsification, dénonce l'homme d'affaires azerbaïdjanais, qui n'a pas été en mesure de verser au RC Lens les 16.5 millions d'euros promis l'été dernier. La faute aux graves soucis financiers rencontrés par son entreprise, le Baghlan Group, et au gel de ses comptes en Azerbaïdjan.

Mammadov contre Mammadov ?

"C'est un problème entre Azéris", a commenté Gervais Martel après cet énième coup de théâtre. Même si le président lensois n'a jamais clairement cité son nom, l'homme censé remplacer Hafiz Mammadov comme actionnaire majoritaire est en effet de nationalité azerbaïdjanaise et s'appelle aussi Mammadov, bien qu'il n'y ait aucun lien de parenté entre les deux. Il s'agit d'Anar Mammadov, fils du très influent ministre des transports d'Azerbaïdjan, Ziya Mammadov, et PDG de Garant Holding, un puissant groupe impliqué dans le bâtiment, le transport, l'agriculture, la finance, l'hôtellerie, le tourisme et les médias. C'est lui qui aurait versé les 2.5 millions d'euros que le RC Lens devait présenter mi-décembre à la DNCG pour obtenir la levée - partielle - de son interdiction de recruter. Ce virement a effectué un étrange parcours avant d'arriver dans les caisses du club. Selon nos confrères de La Voix du Nord, c'est une société off shore​, Point to Point, liée à Anar Mammadov, qui a avancé les fonds, au nom du Baghlan Group d'Hafiz Mammadov. Des fonds que l'actionnaire majoritaire du RC Lens était censé rembourser avant le 31 décembre sous peine d'être dépossédé du club, selon les termes d'un accord présenté à la DNCG.

Cet accord - dénoncé depuis par Hafiz Mammadov - a en effet de quoi surprendre au regard de l'argent dépensé par l'homme d'affaires depuis son arrivée dans le capital du club, surtout à si brève échéance. En clair, pour "seulement" 2.5 millions d'euros non versés, il serait dépossédé des 21.5 millions d'euros qu'il a investis au RC Lens depuis l'été 2013... Etrange concession de la part d'un homme qui semble avoir laissé beaucoup de plumes ces derniers mois. Rappelons d'ailleurs qu'Hafiz Mammadov n'est pas impliqué en son nom propre dans le RC Lens. C'est son entreprise, le Baghlan Group, qui possède 99.99% du capital de RCL Holding, la société parisienne qui détient, elle, la majorité des parts de la SASP Racing Club de Lens. Selon les documents disponibles au registre du commerce, le capital social de RCL Holding est de 12 001 000 euros : 12 millions appartiennent à Baghlan​, les 1 000 euros restants (soit 0.01% du capital) revenant à GIM2, une société lensoise créée par Gervais Martel. Pour qu'il y ait changement d'actionnaire majoritaire, il faut donc que la majorité des actions détenues par Baghlan dans cette holding soient rachetées par Anar Mammadov ou l'une de ses sociétés. Et bien entendu, qu'Hafiz Mammadov, en tant que propriétaire du Baghlan Group, y consente. L'article 11 des statuts de RCL Holding est formel : "les transferts d'actions s'opèrent par virement de compte à compte sur instructions signées du cédant ou de son représentant qualifié. Tout transfert d'actions intervenu en violation des dispositions ci-dessous est nul".  

Quelle est la situation du Baghlan Group ?

Question : Baghlan peut-il ou non être contraint de céder ses parts dans RCL Holding ? A ce jour, Hafiz Mammadov semble toujours tenir les rênes de son groupe, dont la maison-mère - Baghlan Group FZCO - ne se trouve pas en Azerbaïdjan mais à... Dubaï, aux Emirats Arabes Unis. Son site internet ne fonctionne plus depuis des mois mais on a eu quelques nouvelles le mois dernier.

C'est la société Greenfields Petroleum - partenaire du Baghlan Group au sein de la société Bahar Energy en charge de l'exploitation de gisements d'hydrocarbures en Mer Caspienne - qui les a données. Celle-ci a annoncé  le 19 décembre que le Baghlan Group avait cédé les parts qu'il détenait dans Bahar Energy à la banque BNP Paribas, l'un de ses créanciers. Comme l'expliquait en juillet dernier le site internet Bakchich, c'est ce projet d'exploitation pétrolière et gazière qui a conduit le conglomérat d'Hafiz Mammadov à souscrire en 2012 un emprunt obligataire de 150 millions de dollars (environ 125 millions d'euros) qu'il s'était engagé à rembourser dans les trois ans, malgré un taux d'intérêt exorbitant de 14.75%. Et c'est l'incapacité du Baghlan Group d'honorer l'une des échéances, en décembre 2013, qui est à l'origine des difficultés actuelles d'Hafiz Mammadov et du gel de ses comptes en Azerbaïdjan.

Cette cession d'actifs va-t-elle désormais lui enlever une épine du pied et permettre le dégel de ses comptes ? Dans un pays comme l'Azerbaïdjan, où les affaires et la politique sont fortement imbriquées, rien n'est moins sûr. Dans un récent communiqué, Hafiz Mammadov affirmait que "tout le discours sur la faillite de (ses) entreprises est absolument sans fondement". La semaine dernière, une rencontre aurait eu lieu avec Anar et Ziya Mammadov (le ministre des transports NDR) au sujet du RC Lens, d'après le site azerbaïdjanais Sportinfo.az. Les trois hommes se connaissent bien. Hafiz et Anar, notamment, ont été associés au sein de la Bank of Azerbaijan, du club de football du FC Bakou et de plusieurs entreprises qu'ils ont co-dirigées, notamment dans le secteur des transports. Hafiz Mammadov se serait dit apte, une nouvelle fois, à honorer ses promesses. L'été dernier, il s'était engagé à injecter 14 millions d'euros dans les caisses du club en janvier 2015. La DNCG attend aujourd'hui cet argent pour autoriser les Sang et Or à recruter de nouveaux joueurs au mercato hivernal qui s'est ouvert officiellement ce samedi.  
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