Depuis 2015, l'Opérabus se gare sur les places des villages des Hauts-de-France. Spectacle de marionnettes, exposition au mini-récital voix-instrument, cette salle de spectacle mobile propose à un public rural et éloigné des infrastructures culturelles de rencontrer le monde de la musique baroque.
On n'entend pas un bruit dans la petite salle plongée dans le noir. Quelques lumières adoucissent l'ambiance. Sur scène, Stéphanie, soprano, chante au son du théorbe de Martin tandis que défilent des illustrations sur le thème de La belle au bois dormant. Assis devant la petite scène, une trentaine d'enfants de CP de l'école de Vermand dans l'Aisne.
Cette semaine, l’Opérabus s’est arrêté dans plusieurs communes du secteur de Gauchy pour faire découvrir aux élèves des écoles l'univers de la musique baroque. Car la musique baroque est la spécialité de l’ensemble musical valenciennois Harmonia sacra, créateur et propriétaire de l’Opérabus.
Un opéra miniature
À l’intérieur de ce bus de 29 places adultes et 40 enfants, des fauteuils rouges, un lourd rideau de velours, des moulures dorées, un plafond peint, une scène, une petite "loggia" pour l’effet balcon et des musiciens en costume… L’Opérabus est littéralement un opéra baroque miniature.
"C’est comme si on avait pris l’opéra de Paris et qu’on avait décidé de le faire en miniature. (…) C’est vraiment une volonté de retrouver tous les codes de l’opéra à l’intérieur du bus, explique Stéphanie Réveillion, soprano. Ensuite, par rapport au spectacle, on a bien sûr voulu donner une touche baroque. Alors, c’est très facile avec l’instrument que joue Martin, le théorbe, qui est un instrument typique de la période baroque. Et par rapport aux costumes, ce sont des costumes faits par une costumière spécialisée dans les costumes de l’époque et qui sait vraiment quelles sont les formes utilisées, etc. Et donc, c’est aussi pour que la totalité du spectacle, en plus du décorum, soit en mode baroque".
La musique baroque, une musique jouée en petit comité
L’Opérabus accueille tous les publics. Mais cette semaine, il propose aux scolaires du secteur de Gauchy une représentation mêlant contes et opéra.
"On essaie d’adapter un peu le propos, mais on ne change rien à la qualité, à la précision et à la subtilité de ce qu’on proposerait à n’importe quel public, résume le musicien, Martin Billet. On leur propose des choses aussi fines musicalement, aussi fines dans la narration que si c’étaient des adultes. Simplement, on prend le temps de se poser la question de ce que ça veut dire de le faire pour des enfants cette fois-ci."
Aller à la rencontre d’un public éloigné de la culture pour des raisons sociales ou géographiques, c’est l’ADN du projet Opérabus. Un projet qui a trouvé toute sa cohérence avec le choix de la musique baroque et d’une salle mobile et intimiste. "Ça fait sens par rapport à la musique que l’on propose, constate Martin Billet. C’est une musique du 17e siècle qui ne se joue pas forcément toujours dans des salles immenses, mais qui se joue, comme on le fait aujourd’hui avec un théorbe et une voix, dans un salon, une chambre, un intérieur pour quelques amis, quelques proches. Et donc, ça a beaucoup de sens de se retrouver dans ces conditions qui sont presque les conditions historiques finalement."
Amener la culture dans les zones rurales
À l’initiative de la tournée de l’Opérabus dans les villages du secteur pendant une semaine, la maison de la culture de Gauchy. Une initiative dont le coût, 12 000 euros, est le prix pour toucher des populations pour lesquelles l’accès à la culture n’est pas toujours aisé. "L’Opérabus, c’est un investissement, mais ça vaut le coup : amener l’opéra dans ces conditions d’accueil et ce professionnalisme pour les enfants du territoire dès le plus jeune âge, c’est extraordinaire, se réjouit Fatima Bendif, directrice de la maison de la culture de Gauchy. L’idée d’aller au territoire rural plutôt que de le faire venir à la maison de la culture est pour moi une évidence. C’est important (…) Ça commence dès le plus âge. (…) Ça aide les enfants à grandir."
Éveiller la curiosité des grands comme des petits, c’est le moteur de l’Opérabus. Et la proximité, son essence. "Pour nous, c’est essentiel d’aller à la rencontre des gens, d’aller vers les gens directement et que ce ne soit plus le public qui se déplace vers la grande ville où il y a une salle de spectacle", conclut Martin Billet.
Avec Maxime Lictevout / FTV