Expérimentation de l’uniforme à l’école : pourquoi certains établissements scolaires ont décidé de renoncer

L’expérimentation de l’uniforme à l’école fait débat en France. Sur la centaine d’écoles, collèges et lycées volontaires, 15 ont déjà fait marche arrière. En Picardie, sur les cinq établissements scolaires test, deux ont jeté l’éponge.

"L’expérimentation de l’uniforme est une atteinte aux libertés et un formatage de nos enfants." C’est par cette phrase que commence la pétition rédigée par les parents d’élèves de l’école Ferdinand Buisson, à Saint-Quentin. Une pétition distribuée avant le dernier conseil d’école. La direction de l’établissement a finalement renoncé à sa candidature.

Le projet d'expérimentation

Après l’annonce de l’expérimentation début décembre 2023, par Gabriel Attal, alors ministre de l’Éducation nationale, une centaine d’établissements scolaires se sont portés volontaires dans toute la France. L’objectif du gouvernement, dans le cadre du Conseil national de la refondation, est de "renforcer la cohésion entre les élèves, améliorer le climat scolaire, lutter contre le règne de l’apparence et contre toute forme d’inégalité."

Mais avant de se lancer, chaque établissement doit valider le projet en conseil d'administration ou en conseil d'école pour inscrire la mesure dans le règlement intérieur. Pour les écoles, le travail de concertation a été fait, en amont, avec la collectivité.

En Picardie, d’après les informations communiquées par le rectorat, un lycée est concerné dans l’Oise et trois écoles dans l’Aisne, toutes situées à Saint-Quentin. La mairie de la commune a proposé ces trois écoles test, Ferdinand Buisson, Amédée Ozenfant et Metz. Sur 4 000 élèves que compte la commune, 600 sont concernés. Autant de tenues complètes à acheter.

Le kit de base, pour chaque élève, pourra être composé, de cinq polos, deux pulls et deux pantalons. Ce kit coûtera 200 €, mais les familles n'auront rien à payer. La piste privilégiée est celle d'un financement à moitié par l'État, à moitié par la mairie, le département ou la région volontaire. "L’idée est de partir sur un zéro reste à charge avec un cofinancement de la ville et de l’État et évidemment sur la même tenue inscrite au règlement intérieur de l’établissement", expliquait Frédérique Macarez, maire de Saint-Quentin, à notre équipe de France 3 Hauts-de-France, le mois dernier.

Deux établissements scolaires jettent l'éponge

Depuis, une école, Ferdinand Buisson, a renoncé à cette expérimentation, devant le refus des parents. "Certains avancent l’argument d’une restauration de l’égalité entre les élèves, par des vêtements identiques, empêchant les jalousies, les moqueries ou le harcèlement. On prétend favoriser la mixité sociale ! Avancer ce type d’argument après avoir dégradé la carte scolaire, publié les indices de position sociale, et largement aidé au développement des écoles privées, relève pour le moins d’une certaine hypocrisie. Les inégalités sociales s’exprimeront par d’autres biais (chaussures, blousons, coiffes, cartables…)", dénoncent les parents signataires de la pétition, qui ont obtenu 80 signatures.

Si la mairie a de l’argent à dépenser, qu’elle finance des cartables, des trousses et des fournitures scolaires, ce serait de la vraie égalité sociale.

Parents d'élèves de l'école Ferdinand Buisson, à Saint-Quentin

Ces parents opposent également une contradiction financière. "Si la mairie a de l’argent à dépenser, qu’elle finance des cartables, des trousses et des fournitures scolaires, ce serait de la vraie égalité sociale. Nous opposons à cette opération les véritables moyens dont nous avons besoin pour défendre le service public d’éducation : l’augmentation de l’enveloppe pour les sorties, pour la découverte de musées ou de site historique, pour des livres, pour des enseignants supplémentaires et des remplaçants, pour une cantine gratuite pour tous les enfants. Il y a tant à faire pour nos enfants."

Les parents que nous avions rencontrés devant l'école Ferdinand Buisson en janvier dernier, n'étaient pourtant pas tous opposés au projet. Une mère, rencontrée devant les grilles de l'école, nous confiait : "C'est mieux pour le harcèlement. Tout le monde sera logé à la même enseigne". Pour ce père d'élève, "ça évitera les discriminations. Les gens qui ont moins d'argent, ceux qui en ont plus... Ça ne se voit pas avec l'uniforme".

C'est un véritable projet pédagogique qui prend du temps.

Rectorat de l'académie d'Amiens

Le lycée François Truffaut, à Beauvais, dans l’Oise, s’est, lui aussi, retiré de l’expérimentation, après le refus des élèves, lors d’une concertation avec la direction. Reste un lycée, dans l'Oise, qui est encore en période de concertation. "Nous ne souhaitons pas communiquer le nom de l'établissement pour éviter de perturber leur travail", explique le rectorat de l'académie d'Amiens.

Concernant la limite de dépôt des candidatures, l'académie précise qu'aucune date n'a été fixée. "Les communes vont à leur rythme pour les écoles, et concernant les lycées, le conseil régional devra encore acter le projet en commission. C'est un véritable projet pédagogique qui prend du temps. Il faudra tenir le rythme pour les commandes des kits et la mise en place du dispositif, si les candidatures arrivent plus tard, mais nous devons laisser la concertation se faire."

L’expérimentation doit débuter dès la rentrée prochaine, pour les établissements volontaires. Si les résultats sont concluants, la tenue commune sera généralisée en 2026.

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