Les travaux sont impressionnants et vont durer plusieurs années. La ville de Soissons agrandit actuellement massivement son réseau de chaleur. Il doit permettre de relier l'ensemble des bâtiments publics de la ville pour les chauffer grâce à la biomasse. D'importantes économies et un meilleur respect de l'environnement sont attendus.
Depuis un an, l'ampleur du chantier n'échappe pas aux usagers de la route. La ville de Soissons vit au rythme des tranchées qui naissent en divers endroits et traversent ou longent de nombreux axes. C'est que l'objectif est ambitieux : constituer un réseau de canalisations souterraines de 24,3 km pour raccorder et alimenter en chauffage et en eau chaude sanitaire une grande partie des bâtiments publics de la cité.
Un réseau existait déjà depuis de longues années dans le quartier de Presles, mais bien plus modeste. Cette base est en cours d'agrandissement de presque 15 km. Il faut pour cela atteindre les écoles, les bâtiments sportifs, médicaux ou culturels, en passant sous les rues, afin de les relier à deux chaufferies centrales.
Une chaufferie alimentée grâce à la biomasse
Une première chaufferie existait, l'autre est en cours de construction. Les travaux devraient s'achever dans un an. Cette nouvelle chaufferie fonctionnera grâce à la biomasse et aura une puissance de 6,6 MW. Elle accueillera aussi un dispositif de gestion centralisée du réseau. "Cette chaufferie va fonctionner à base de plaquettes bocagères qui viennent de la région de Soissons", explique Delphine Durieux, directrice de projet pour Idex. "On utilise le bois pour créer de la chaleur qui va ensuite réchauffer de l'eau qui va circuler dans toute la ville de Soissons grâce à des canalisations. Il fallait, pour avoir un taux d'énergie renouvelable supérieur à 85 %, construire cette nouvelle chaufferie", complète la responsable.
L'ensemble du projet atteint 40 millions d'euros, mais la ville déboursera très peu explique son maire. L'essentiel des travaux est financé par Idex, le délégataire du nouveau réseau, et par une subvention de l’ADEME à hauteur de 39 %. "On arrivait au renouvellement de la délégation de service public de l'ancien réseau et on a décidé de s'inscrire davantage dans la transition énergétique et d'avoir une autre ambition pour le réseau de chaleur de Soissons", précise Alain Crémont, maire (DVD) de Soissons.
"C'est 0 % d'argent dépensé par la collectivité"
Un pari économique aussi pour la ville qui espère réaliser d'importantes économies par cette opération. "Ce réseau de chaleur est destiné à l'ensemble des bâtiments publics de la collectivité et de l'État. C'est l'équivalent de 10 000 logements concernés", développe le maire. Selon lui, le centre hospitalier réalise d'ores et déjà une économie de 500 000 € annuels depuis qu'il est raccordé. "Ce qui est important, c'est qu'on arrive à une énergie maîtrisée qui ne dépendra plus des énergies fossiles. La collectivité n'investit rien dans ce réseau, c'est les usagers qui, à terme, vont payer ce réseau de chaleur. C'est 0 % d'argent dépensé par la collectivité de Soissons, si ce n'est un peu de voirie".
Le projet soissonnais a été imaginé avant la flambée du coût des énergies en 2022, mais sa pertinence semble aujourd'hui renforcée. Ses promoteurs expliquent en tout cas ne pas peiner à convaincre les différents acteurs publics concernés de se raccorder au nouveau réseau.
"Aujourd'hui, toutes les villes veulent leur réseau de chaleur. Avant, c'étaient plus des grosses agglomérations, indique Delphine Durieux. Nous sommes complètement dans l'air du temps. C'est conforme à la volonté de réduire les gaz à effet de serre, de faire des économies d'énergie. C'est la seule solution aujourd'hui pour respecter notre trajectoire environnementale", estime la directrice du projet.
D'autres villes intéressées
Si la priorité a été donnée pour le moment au raccordement des bâtiments publics et des logements collectifs, demain les particuliers pourront aussi profiter du nouveau réseau et s'y raccorder s'ils le souhaitent. "Depuis la crise énergétique de 2022, les gens sont plus sensibles car ils ont vu qu'il était possible d'avoir de grosses fluctuations des prix. Aujourd'hui, ils nous croient, ce qui n'était pas forcément le cas avant 2022. L'avantage de la biomasse, c'est qu'elle a un tarif beaucoup plus lisse que le gaz qui fluctue", confie Delphine Durieux.
Selon les promoteurs du projet qui doit s'achever en 2028, d'autres villes devraient rapidement emboîter le pas à Soissons. Dans la région, Château-Thierry, Laon, Compiègne et Abbeville seraient sur les rangs pour suivre la même démarche.