Après les intempéries provoquées par le passage de la tempête Kirk, de nombreux cours d’eau du sud de l'Aisne se sont retrouvés en crue. Ils ont provoqué des inondations. Ces dernières ont submergé certaines exploitations agricoles provoquant de nombreuses pertes. Un événement qui fait suite à une année 2024 "compliquée".
"C'est la première fois qu'on a été inondé comme ça. La dernière plus grosse pluie avait eu lieu en juin 2000, quand j'étais arrivé", rapporte Fabien Fraeyman, joint au téléphone. L’agriculteur et éleveur est installé dans la commune de Bruyères-sur-Fère, dans l'Aisne. Il se trouve tout proche de l'Ourcq, un des nombreux cours d'eau en crue, suite aux précipitations importantes tombées ce jeudi 10 octobre, après le passage de la tempête Kirk.
L’eau est arrivée dans la maison et dans la ferme, alors que normalement, elle restait aux abords des bâtiments. Le niveau est monté à 35 centimètres dans l'habitation. Dans l'exploitation, les hangars, les ateliers et le stockage de céréales ont également été touchés. "C'est rentré sur une cinquantaine de centimètres. Toutes les semences prêtes à semer en céréales, blé et orge ont été aussi immergées entre 50 et 70 cm." Un tiers du stockage de lin a également été perdu.
On a repêché une vache en train de se noyer.
Fabien FraeymanAgriculteur et maire de Bruyères-sur-Fère
Comme lui, Charlotte Vassant, agricultrice à Saint-Quentin et présidente de l'Union des syndicats des agriculteurs de l'Aisne (USAA) liste "plusieurs milliers d’hectares sous l’eau, principalement dans les vallées qui bordent les rivières. On a eu entre 60 et 150 mm de pluie depuis une semaine, ce qui fait beaucoup trop d’eau aujourd’hui dans le département."
L'agricultrice raconte des évacuations de vaches en urgence dans les stabulations, où le bétail passe l'hiver. De son côté, Fabien Fraeyman a dû "repêcher une vache en train de se noyer." Suite à ces nombreux dégâts, l'exploitant souligne "beaucoup de travaux à venir", notamment "des choses qu'on fait généralement l'hiver quand on a plus de temps".
Charlotte Vassant souligne l'incertitude qui règne pour réaliser toutes les tâches. "Aujourd’hui, il y a des récoltes qui sont à l’eau et on ne sait absolument pas quand on pourra rentrer dans les champs. Souvent, ce ne sont pas des terres faciles. Il faut bien que ça sèche pour pouvoir rentrer, puis récolter et sécher pour qu'on puisse les utiliser."
Tous les dommages entraînent des surcoûts de travaux supplémentaires. Fabien Fraeyman estime toutes les pertes à "plusieurs centaines de milliers d'euros". Il dit avec fatalisme : "Je pense qu'il y a plus grave dans la vie, même si c'est très pénible et contraignant." Cependant, il indique avoir un tempérament de battant et explique qu'il doit également venir en aide à une dizaine de maisons sinistrées, étant maire de la commune.
Ils ont eu l’équivalent de quatre ans de pluie en deux ans. Ce n’est pas viable.
Charlotte VassantPrésidente de l'union des syndicats agricoles de l'Aisne
Tout comme lui, Benjamin Thirion, arboriculteur, déplore : "L'excès d'eau de cet automne n'est que la cerise sur le gâteau d'une année 2024 merdique, avec des récoltes à 30% inférieures dans toutes les cultures". De plus, il ajoute à ces pertes "des charges en hausses" et de mauvaises conditions d'implantation des cultures pour la récolte 2025.
Charlotte Vassant précise : "Sur la moisson, cette année, on est tous en déficit de 500 euros de l’hectare à peu près." Elle pense aux agriculteurs connaissant des inondations fréquentes dans le sud de l'Aisne. "On faisait le bilan, ils ont eu l’équivalent de quatre ans de pluie en deux ans. Ce n’est pas viable. On est à 1300 millimètres cette année. On sature", conclut-elle. Avant de rappeler que certains éleveurs ont été touchés par la fièvre catarrhale ovine (FCO) en 2024.
Tous espèrent le retour du soleil et du vent pour évacuer l'eau afin d'effectuer les récoltes et les travaux des champs. Fabien Fraeyman indique : "Il faudra faire le boulot qu'on est censés faire depuis trois semaines", à savoir des arrachages de betteraves et des semis de céréales. "On n'a presque pas semé de blé. Il ne faut pas que les eaux stagnent dans les cultures. On sature", conclut la présidente de l'USAA.