Attentats : l'appel au boycott de l'hommage national lancé par la soeur de François-Xavier Prévost fait réagir

L'appel au boycott de l'hommage national lancé par la soeur de François-Xavier Prévost, mort au Bataclan dans les attentats de Paris, suscite de nombreuses et fortes réactions. 

Le message posté sur Facebook par Emmanuelle Prévost, soeur d'une des victimes de l'attentat au Bataclan, a été largement relayé par tous les médias et n'en finit pas de susciter des réactions. Des amis, des citoyens mais aussi d'autres familles de victimes et même de politiques. Tous réagissent à sa décision de boycotter la cérémonie d'hommage national ce vendredi. "Nous refusons cette main tendue par les représentants politiques de la France pour plusieurs raisons, écrivait-elle, 
- Parce qu’en France, les attentats perpétrés du 7 au 9 janvier de cette année ont fait 17 victimes,
Que depuis, rien n’a été fait. Si des textes ont été votés, aucun décret d'application n'a encore été publié. Que 10 mois plus tard, les mêmes hommes, sont en mesure de recommencer et faire cette fois-ci, 10 fois plus de morts,
- Parce qu’en France, il est possible d’être en lien avec un réseau terroriste, de voyager en Syrie, et de revenir, librement,
- Parce qu’en France, des personnes fichées S (pour « atteinte à la sûreté de l’Etat » ou visées terroristes) circulent librement..."

Sur Facebook, de nombreux amis de la famille mais aussi des anonymes ont exprimé rapidement leur soutien. "Ceci devrait etre lu à l'Assemblée...", écrit Naffy. "Je m'associe à votre douleur et si le gouvernement avait fait le nécessaire avant beaucoup d attentats auraient pu être évités", dit aussi Maryse. 

Patrick Jardin, père de Nathalie Jardin, originaire de Marcq-en-Baroeul et également tuée au Bataclan, a réagi dans La Voix du Nord : "Complètement d’accord avec eux". Il dit avoir "la haine" contre les politiques : "J’ai autant de haine pour eux que pour ceux qui ont tiré sur ma fille". Il ira quand même aux Invalides pour l'hommage national, juste pour accompagner son fils. 
Hors de la région, le père d'Aurélie de Peretti, une autre victime des attentats a dit s'associer au boycott : "Je me souviens des attentats de janvier. Dès le lendemain, il y a eu des effets d'annonce. Lors du rassemblement dans les rues de Paris, la sécurité était devenue une cause nationale. J'y ai cru ! Mais que s'est-il passé ?" a-t-il regretté dans Nice-Matin. "L'espace Schengen a laissé passer toutes ces personnes pourtant signalées par le fameux fichier S. L'espace Schengen est devenu une passoire qui a permis à ces gens-là de venir perpétrer des actes terribles sur notre territoire. Rien n'a été fait !" 

"Comment ne pas s'interroger sur une certaine inertie du pouvoir..."

Des politiques n'ont pas tardé à réagir à ce cri de colère. Il a été relayé et commenté par exemple par Nadine Morano (LR) : "Emmanuelle Prévost a raison. Dans son deuil injuste qui nous révolte tous, elle pointe les insuffisances du Gouvernement après les attentats de Charlie Hebdo il y a bientôt un an. Malgré sa douleur, elle exprime un constat lucide de la situation en France.(...) Le gouvernement doit prendre enfin la mesure du péril qui nous menace, pour que plus jamais, en France, d’autres Emmanuelle n’aient à pleurer la disparition injuste d’un frère."

Marc-Philippe Daubresse, député-maire LR de Lambersart, a également exprimé son soutien au cri de colère de la soeur de François-Xavier Prévost, dans un long message sur Facebook, tout en indiquant qu'il se rendrait à l'hommage national : "Si la Nation rend un hommage national aux victimes je ne le bouderai pas car c'est bien le moins qu'elle puisse faire pour saluer la mémoire de ses enfants morts pour la France sans avoir compris pourquoi !
Mais cela ne m'empêche de partager la colère de la famille de François-Xavier qui se demande pourquoi on intervient si tard alors qu´on aurait pu le faire après les événements du début de l'année, ce qui aurait peut être permis de sauver des vies. (...) Comment ne pas être en colère en entendant un Président de la République annoncer à Versailles pour éviter la critique de l'inaction, la mise en œuvre des propositions de l'opposition datant de janvier et qu'il avait fustigées pendant 10 mois. Que de temps perdu ! (...) Comment ne pas s'interroger sur une certaine inertie du pouvoir en apprenant que les services turcs et irakiens avaient prévenu la France de la préparation d'une opération de grande ampleur, et que l'état d'urgence aurait pu être mis en œuvre bien avant les attentats afin d'aller chercher les armes dont tous savaient qu'elles circulent dans un certain nombre de nos banlieues."

"Petit, mesquin, minable"

Un message qui met clairement en cause la majorité gouvernementale et le Président Hollande qui ont fait vivement réagir Jérôme Roussel, un ancien conseiller municipal socialiste de Lambersart. Sur son blog, il a écrit : ""Petit, mesquin, minable". Voilà les mots qui sont venus aux militants socialistes de Lambersart à la lecture de la réaction du Député-Maire au coup de gueule d’Emmanuelle Prévost suite au décès de son frère dans l’attentat du Bataclan. Oubliée la dignité de la dernière semaine, évaporée la distance qu’avait mis les politiques avec cette tragédie, ignorées la décence et la retenue. L’honneur d’un ancien Ministre, Député de la Nation, n’est pas de prendre appui sur la douleur d’une famille pour revenir dans la campagne des régionales. (...) Descendre aussi bas, aujourd’hui, quelle honte !"

Marielle Timme, Lensoise qui était au Bataclan le vendredi 13 novembre, et en est sortie saine et sauve, ne se rendra pas non plus à l'hommage national. Mais pas pour des raisons politiques ou par colère. "J'ai peur, dit-elle. Je ne me vois pas aller à Paris. Je suis en arrêt de travail pour stress post-traumatique. Je subis le contrecoup ces jours-ci". Et elle précise : "Je trouve que le gouvernement et le Président ont très bien réagi. Personne ne pouvait prévoir des tels attentats. C'est très difficile d'empêcher de tels actes. Il faut rappeler que les Etats-Unis, qui ont pourtant un budget défense bien supérieur, ont eu des milliers de morts en 2001."