Attentats de Paris et Bruxelles : les enquêteurs tentent de percer les secrets d'Abrini

Omniprésent tout au long des préparatifs des attentats de Paris et Bruxelles, Mohamed Abrini tente, depuis son arrestation il y a un an, de se présenter comme l'ami fidèle entraîné malgré lui dans les projets jihadistes de ses amis de Molenbeek.

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"Je n'avais aucune intention d'aller vers la mort", répète à plusieurs reprises aux enquêteurs belges "l'homme au chapeau" filmé à l'aéroport de Bruxelles derrière un chariot chargé d'explosifs, avant de prendre la fuite. Quelques instants après, ce 22 mars 2016, 32 personnes meurent dans le double attentat de la capitale belge.

Son ami Salah Abdeslam, dont il a partagé la fuite après les attentats parisiens du 13 novembre 2015 qui ont fait 130 morts, se mure dans le silence. En revanche, Abrini, 32 ans, mis en examen par les justices française et belge pour son rôle dans les tueries parisienne et bruxelloise, répond volontiers aux enquêteurs belges, selon des auditions consultées par plusieurs médias dont l'AFP.

Abrini est présenté comme l'un des logisticiens présumés du 13-Novembre, mais son rôle précis continue d'intriguer les enquêteurs. Sa trajectoire dans la cellule jihadiste du groupe Etat islamique (EI) responsable des attaques dans les deux capitales remonte-t-elle à son voyage en Syrie, fin juin 2015 ? "Je n'ai eu aucune activité, ni reçu aucune mission en rapport avec l'EI", maintient-t-il. "J'ai juste visité la tombe de mon frère Soulaimane."

De retour en Europe, il passe par l'Angleterre, à la demande d'Abdelhamid Abaaoud, qui coordonnera les attentats parisiens. Un voyage mystérieux d'une dizaine de jours, où il change plusieurs fois de téléphone et fait étape à Birmingham, connu pour être un fief islamiste. Les 10 et 11 novembre, il accompagne des amis de son quartier bruxellois de Molenbeek, Salah Abdeslam et son frère Brahim, futur kamikaze des terrasses parisiennes, lors d'allers-retours nocturnes Bruxelles-Paris, pour louer des cachettes. "C'est pas parce que j'accompagne quelqu'un que je l'aide", se défend Abrini, plaidant sa "naïveté totale".



Pourtant dans la voiture, "Salah m'a dit que des gens allaient se faire exploser et que ça allait partir en cacahuètes", raconte-t-il. Le 12 novembre, Abrini est encore là pour le dernier voyage, depuis la Belgique, avec le commando au complet. "Je n'ai rien vu des préparatifs" lorsqu'il était dans une cache en banlieue parisienne : "Même moi j'étais plus nerveux qu'eux. Ils étaient calmes, tranquilles. Ils préparaient à manger dans la cuisine, regardaient la télé". Puis "j'embrasse une dernière fois tout le monde", "les larmes aux yeux".

Jeux vidéos

Pour 365 euros, un taxi le ramène nuitamment à Bruxelles. Le lendemain, jour des attentats, il signe un bail d'appartement avec sa fiancée. Pour se créer un alibi ? Les enquêteurs s'interrogent. "Je suis contre le fait d'aller tuer des gens dans des terrasses, des stades", assure-t-il. Alors pourquoi ne pas prévenir les autorités? "Je ne balance pas mes amis."

Le soir du 13-Novembre, il regarde un match dans un café, raconte-t-il sans mentionner la présence à ses côtés d'Ahmed Dahmani, autre logisticien présumé qui s'envolera le lendemain pour la Turquie où il sera rapidement arrêté. La police belge, qui surveillait depuis une semaine le domicile d'Abrini, ne le verra jamais rentrer chez lui.

Le chauffeur des jihadistes de Paris prétend avoir continué à travailler normalement quelques jours dans son snack, jusqu'à ce qu'un des futurs kamikazes de Bruxelles, Khalid El Bakraoui, vienne le chercher: "Je sais que je suis recherché, que Salah est recherché, j'ai suivi", à contrecoeur, dit-il. Suivront plus de quatre mois de fuite bruxelloise, de cache en cache. Très vite, le fugitif Abdeslam, "pâle, fatigué", les rejoint. Abrini s'étonne que son ami ne soit "pas allé jusqu'au bout".

"L'homme au chapeau" soutient ne pas avoir participé à la préparation des attentats du 22-Mars, pas même à la confection des explosifs qu'il transportera à l'aéroport dans des sacs de voyage. "J'étais planqué avec eux mais c'est tout", assure-t-il. Son testament jihadiste, trouvé dans un ordinateur jeté à la poubelle près d'une cachette ? "Ils auraient trouvé bizarre que je n'en fasse pas un. J'ai fait un copier/coller de celui des autres", prétend-t-il. Abdeslam et lui ne prêtent pas attention aux artificiers: "on voyait des gens rentrer, sortir", "j'étais dans ma bulle". Occupé, selon ses dires, à jouer aux jeux vidéos avec son ami de Molenbeek.
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