Alors que ce dimanche 6 décembre commençent les deux (derniers) jours de négociations du Brexit, la question de l'accès aux eaux territoriales par les pêcheurs français reste un des trois problèmes majeurs.
Sur les littoraux du nord de la France, la question est sur toutes les lèvres, alors qu'un énième délai de négociation de deux jours a été annoncé par Ursula von der Leyen ce samedi 5 décembre : les pêcheurs français (et européens) auront-ils encore accès aux eaux territoriales britanniques après le 31 décembre 2020 ?
L'interrogation reste entière, tandis que les négociations entre l'Union européenne (UE) et le Royaume-Uni ont repris en début de matinée à Bruxelles.
La présidente de la Commission européenne avait annoncé, ce samedi 5 décembre, qu'un "effort supplémentaire devait être entrepris", après avoir appelé Boris Johnson, le Premier ministre britannique. Les négociateurs européen et britannique s'étaient quittés la veille, sans avoir trouvé le moindre consensus quant à l'accord commercial post-Brexit.
I had a phone call with @BorisJohnson on the EU-UK negotiations.
— Ursula von der Leyen (@vonderleyen) December 5, 2020
Differences remain. No agreement feasible if these are not resolved. Chief negotiators will reconvene tomorrow. We will speak again on Monday. https://t.co/fsVtfW0HHh
Parmi les trois sujets clés de désaccord : les conditions de concurrence équitables, la gouvernance et cette épineuse question de l'accès des pêcheurs européens aux eaux britanniques. "Aucun accord n'est possible si ces problèmes ne sont pas résolus" rappelait leur communiqué commun.
Un sujet clef qui fait monter la pression
Or, la question de la pêche fait, de part et d'autre de la Manche, monter la pression.Côté français, la pêche et ses transformations constituent un secteur économique important, l'activité dans les eaux britanniques représentant environ 20% de l'activité de pêche en Atlantique - Manche - Mer du Nord. "Il faut l'accès aux eaux [britanniques], c'est impératif, c'est la priorité", s'était ainsi écrié Olivier Leprêtre, président du comité régional de la pêche, face à Jean Castex, le Premier ministre français, en visite jeudi 3 décembre à Boulogne-sur-mer.
Côté anglais, cette question est vue, en particulier par les partisans du Brexit, comme un moyen de recouvrer leur souveraineté, avec ce message-clef : les "zones de pêche britanniques sont pour et avant tout pour les Britanniques".
Un accès direct jusqu'au 31 décembre
Quelles sont les règles en la matière ? Jusqu'à présent, les pêcheurs français ont un accès direct aux eaux britanniques très poissonneuses, à l'exception des 22 premiers kilomètres à partir des côtes anglaises.Car même si le Royaume-Uni a déjà quitté l'Union européenne le 31 janvier dernier, ce pays continue d'appliquer certaines de ses règles, dont la politique commune des pêches, l'équivalent de la politique agricole commune pour le secteur halieutique.
Ainsi, le volume de ce que chaque pêcheur peut pêcher, en fonction de chaque espèce, est défini tous les ans au mois de décembre.
Les Français, comme les Européens, ont donc continué, ces derniers mois, à pêcher dans les eaux britanniques en respectant ces quotas particuliers. Ces règles prendront cependant fin le 31 décembre, à l'issue de la période de transition.
La fin de l'accès privilégié
Quelles sont les options possibles pour la suite ? Le rapport d'information de l'Assemblée nationale du 11 juin 2020, analysait deux extrêmes : soit la "fermeture totale des eaux britanniques aux pêcheurs européens", une option peu probable puisque la conséquence directe serait la non accessibilité du marché européen (par les Britanniques) ; soit " un mode de fonctionnement proche des règles de la politique commune des pêches associant le Royaume‑Uni, d’une manière ou d’une autre, à la définition des totaux admissibles de capture".L'accès à 100% aux quotas de pêche dans la zone maritime du Royaume-Uni, on sait que c'est fini.
L'accord oscillera certainement entre ces deux extrêmes, avec par exemple un nombre limité de navires européens qui pourraient venir y pêcher tous les ans.
Dans tous les cas, l'accès privilégié sera réduit, comme le précise Clément Beaune, le secrétaire d'Etat aux affaires européennes, dans les colonnes du JDD.
"L'accès à 100% aux quotas de pêche dans la zone de maritime du Royaume-Uni, on sait que c'est fini." Mais, continue ce dernier, "les Britanniques ne peuvent pas d'un côté vouloir l'accès à la totalité du marché unique européen, et de l'autre, exclure la pêche de cet ensemble", n'hésitant pas à brandir la menace du veto français en cas d'accord "non conforme à nos intérêts, notamment pour les pêcheurs". Et donc d'un "no deal" aux conséquences économiques importantes.
Prochaine étape : lundi 7 décembre, jour où la présidente de la Commission européenne fera part des avancées de ces deux jours de négociations.