Edouard Philippe, maire LR du Havre, a été nommé ce lundi Premier ministre par le président de la République Emmanuel Macron. Un choix qui inquiète plusieurs élus des Hauts-de-France en raison de son opposition au projet de canal Seine-Nord.
Le député-maire Les Républicains du Havre, Édouard Philippe, a été nommé Premier ministre par le président de la République Emmanuel Macron. À 46 ans, cet élu de droite modéré et fidèle d'Alain Juppé devient le plus jeune chef de gouvernement depuis Laurent Fabius en 1984. Mais sa nomination inquiète plusieurs élus des Hauts-de-France en raison de son opposition au Canal Seine-Nord-Europe. "Nous allons savoir si nous aurons ou non à Matignon un adversaire acharné du canal Seine Nord...", tweetait ainsi ce lundi matin Alain Gest député LR de la Somme, avant l'annonce de l'Elysée...
Ce matin nous allons savoir si nous aurons ou non à Matignon un adversaire acharné du canal Seine Nord....
— Alain Gest (@Alain_Gest) 15 mai 2017
"Il y a quelque chose qui relève non pas du contre-sens, mais en tous les cas de la faute de tempo, à consacrer des moyens absolument considérables à cet outil alors que l’on pourrait, me semble-t-il, utiliser des moyens plus limités, pour capter des flux plus importants à travers les ports français", déclarait Edouard Philippe en novembre 2015 au sujet du canal Seine-Nord. "Il y a mieux à faire que ce canal. Il me semble que cet argent public serait mieux utilisé ailleurs. Avant ce projet, il faudrait dépenser un peu d’argent public pour développer les ports français".
Lors d'une séance de questions au gouvernement en mars 2015, le futur Premier ministre avait également dénoncé "ce coup de pouce donné aux ports d'Anvers de Rotterdam qui n'en ont pas besoin et qui se réjouissent ouvertement des investissements français destinés à améliorer leur compétitivité".
Jeudi dernier, le député PRG du Pas-de-Calais Stéphane Saint-André - également président de Voies navigables de France (VNF) - avait refusé l'investiture d'En Marche! pour les prochaines législatives en raison de la nomination annoncée du maire du Havre à Matignon. "Je suis inquiet d’une éventuelle nomination au poste de premier ministre d’Edouard Philippe qui est un opposant farouche au canal Seine Nord". Une inquiétude partagée par un large spectre politique dans les Hauts-de-France, toutes tendances confondues. "Notre groupe a pointé la nécessité d’obtenir des garanties quant au financement, (...) la nomination de Monsieur Philippe risque de mettre à mal ce projet.", craint ainsi le groupe Front National-Rassemblement Bleu Marine au conseil régional. "Bon Édouard. .. tu viens poser la première pierre du canal Seine-Nord nord quand ?", ironisait de son côté Franck Dhersin, maire LR de Téteghem et président de la Commission Transports, Infrastructures, Ports et Mer à la région.
"Après la nomination du Premier ministre, Edouard Philippe, qui s'était montré hostile au canal Seine-Nord-Europe, je serai extrêmement vigilant à sa réalisation", a indiqué de son côté le député-maire socialiste de Bapaume, Jean-Jacques Cottel. "Ce canal est l'émanation de notre action et je poursuivrai sans relâche mon travail jusqu'à la réalisation de la plate forme de Marquion : celle-là, nous voulons vraiment l'inaugurer et je ne ménagerai pas mes efforts !"
Irréversible ?
La projet de canal Seine-Nord peut-il toutefois être remis en cause ? Bien que le dossier se soit éternisé - et même parfois enlisé ces 25 dernières années - tout semble sur des rails aujourd'hui. Le 5 avril dernier, le prédécesseur d'Emmanuel Macron, François Hollande, avait officiellement lancé à Noyon la réalisation de ce canal à grand gabarit , long de 107 km, entre Compiègne et le canal de Dunkerque-Escaut. Il l'avait alors qualifié d'"irréversible". Le 20 avril dernier, le député PS du Nord Rémy Pauvros a d'ailleurs été élu président de l'établissement public en charge du chantier, avec pour vice-président Gérald Darmanin, le maire LR de Tourcoing et vice-président de région. Pendant sa campagne, Emmanuel Macron n'avait pas remis en cause ce projet. "Je confirme les trois grands projets en cours dont les déclarations d'intérêt public sont en train d'être obtenues, c'est à dire le Bordeaux-Toulouse (...) le Lyon-Turin et le canal Seine-Nord qui sont trois gros travaux d'infrastructure", avait déclaré le futur président de la République sur RTL, en mars dernier.
Le coût du canal Seine-Nord-Europe s'élève à 4,5 milliards d'euros hors taxes financés de la manière suivante : 1,8 milliard de l'Union européenne (soit 40%), 1 milliard de l'Etat, 1 milliard des collectivités locales et 0,7 milliard d'emprunt. A l'issue des travaux, en 2023, il pourra être emprunté par des péniches de 4400 tonnes, représentant chacun près de 180 poids lourds, ce qui permettra de tripler le volume du trafic actuel, selon Voies navigables de France (VNF). Sa création pourrait générer 10 000 à 13 000 emplois directs et indirects selon les estimations du précédent gouvernement.