C'est la première fois que Willy Bardon s'exprime publiquement depuis sa remise en liberté, le 25 septembre dernier. Dans une longue interview accordée à France 2, il réaffirme son innocence et assure qu'il sera "plus fort" pour son procès en appel.
"Je ne rentrerai pas dans la salle comme je suis rentré la dernière fois. Aujourd'hui, je vais être beaucoup plus fort." Ces mots, ce sont ceux de Willy Bardon, condamné en décembre 2019 à trente ans de réclusion criminelle pour enlèvement, séquestration et viol d'Élodie Kulik en janvier 2002. Sorti de prison le 25 septembre dans l'attente de son procès en appel, il s'exprimait pour la première fois depuis sa remise en liberté, face à la caméra de France 2.
Surpris et soulagé
"J'ai été surpris, parce que les gardiens de prison m'ont dit au dernier moment de préparer mes affaires pour m'en aller, et soulagé pour toute ma famille", explique Willy Bardon. Surpris, parce qu'il aura fallu attendre la troisième demande de remise en liberté auprès de la Cour d'appel de Douai (Nord) pour que la requête aboutisse.Après plus de neuf mois d'emprisonnement à Lille, l'Axonais va préparer son procès en appel avec ses trois avocats, déterminé à prouver son innocence. "Je continue à affirmer que je n'ai rien à voir là-dedans, que j'étais bien chez moi avec mon ex-femme et que le lendemain, j'allais travailler", a répété Willy Bardon.La prison, c'était très dur. Une personne a appris mon nom de famille et à partir de là, ça a dégénéré. On disait que j'avais tué une fille et que je l'avais brûlée. J'étais insulté régulièrement.
"Je porte le chapeau pour quelqu'un d'autre"
Une innocence qu'il n'avait cessé de clamer lors de son premier procès, en décembre 2019. Sur un enregistrement glaçant de 26 secondes - la pièce maîtresse du dossier - où on entendait Élodie Kulik appeler les secours, la cour avait cru reconnaître parmi deux voix masculines celle de Willy Bardon. Aucune preuve scientifique n'avait permis de prouver sa culpabilité.Juste après le verdict le condamnant à 30 ans de réclusion criminelle, Willy Bardon avait tenté de mettre fin à ses jours en ingérant un produit pesticide. "Je ne supportais plus tout ce qu'on disait sur moi, qui était faux, explique le condamné. Je voulais mettre fin à mes jours, pour moi et pour que les personnes qui m'aiment puissent passer à autre chose."Depuis le début de l'enquête, je suis présenté comme le coupable mais ce n'est pas du tout moi. Je n'ai jamais agressé personne, même dans une bagarre. Je porte le chapeau pour quelqu'un d'autre.
Pendant le procès, je ne pouvais pas dire ma vérité. On m'a laissé la parole mais je n'ai pas pu m'exprimer comme j'aurais voulu le faire. C'était la première fois de ma vie que je rentrais dans un tribunal. Les gens me regardaient dans tous les sens et je trouvais ça fou qu'ils parlent comme ça de moi.
"Laver mon nom de famille"
Le procès en appel devrait désormais se tenir en juin 2021, et la donne a changé pour Willy Bardon, qui espère "laver [s]on nom de famille". "Il n'est pas du tout pareil, ce deuxième procès, déclare l'Axonais. Les personnes qui me soutiennent ont moins peur de se présenter, ont moins peur des journalistes, ont moins peur de la partie adverse."Face à lui, Jacky Kulik, le père de la victime, ne compte pas non plus lâcher le combat. "Je ne m'attendais pas à une pareille nouvelle, avait-il confié après la décision de remise en liberté. Je suis effondré." Il craignait que Willy Bardon puisse se rapprocher de témoins pour faire pression sur eux, voire qu'il se soustraie à la justice en partant à l'étranger.Aujourd'hui, l'image que la justice et les médias ont mise sur moi, c'est quelque chose qui ne pourra jamais partir. Mais je ne peux pas retourner en prison pour quelque chose que je n'ai pas fait. Ça ne serait pas normal, la justice n'est pas faite comme ça.
Le combat d'un père pour sa fille
Un argument que les avocats du condamné contestent. "Si du jour au lendemain l'ensemble des témoins venait à changer leur version, personne ne serait dupe", balaie Me Stéphane Daquo. Willy Bardon, quant à lui, déclare comprendre le combat d'un père pour sa fille, mais le trouver un peu dur à son encontre.Ce monsieur-là, c'est normal ce qu'il fait et je pense que j'en ferais autant à sa place. Mais il faut qu'il comprenne que ce n'est pas moi et tant qu'on ne lui donnera pas le vrai coupable, je pense qu'il sera toujours contre moi.