"Faudrait rouvrir en juin, sinon y'aura des morts" : le cri d'alarme des restaurateurs et hôteliers des Hauts-de-France

Le président du syndicat des hôteliers et restaurateurs des Hauts-de-France interpelle le gouvernement sur les conditions du déconfinement.

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"Faudrait rouvrir en juin, sinon y'aura des morts". Mais juin est encore loin et Gérard Depoorter ne sait toujours pas quand les cafetiers et les restaurateurs auront enfin le feu vert pour recommencer à travailler. Le président de l'Union des Métiers des Industries de l'Hôtellerie (UMIH) des Hauts-de-France devra donc patienter jusqu'à fin mai pour savoir ce que le Gouvernement décide. Les professionnels du secteur ont rencontré le Président Macron vendredi.

Et cette sixième semaine de confinement s'annonce cruciale. Comment éviter que le quatrième employeur de France (15 000 entreprises et 80 000 emplois dans la grande région) n'enregistre un nombre record de faillites ? Quelles aides financières espérer de l'Etat ? Quelle attitude adopter face aux assureurs qui trainent les pieds ? Quelles mesures anticiper pour protéger et rassurer, après réouverture, les salariés et les clients ? Beaucoup de questions en suspens. Beaucoup d'inquiétude. "C'est pire que ça, rectifie Gérard Depoorter. Je vois des gens qui souffrent.
 

L'UMIH est sans doute l'un des syndicats patronaux français les plus importants. Les 3/4 des hôteliers, restaurateurs et cafetiers du pays y sont adhérents. Gérard Depoorter, lillois pur souche au nom bien flamand, homme de réseaux, fils de commerçants et commerçant dans l'âme, grand amoureux des voyages, y a gravi tous les échelons. Ce retraité de 68 ans qui a géré deux hôtels dans le centre-ville, avec son épouse, a d'abord présidé la section Métropolitaine, puis départementale, avant d'accéder début 2018 à l'étage régional. " Moi qui vient de l'hôtellerie, je vous le dis avec beaucoup de respect : la restauration, c'est un milieu de courageux ! Des gens qui n'ont pas forcément faits de grandes études, mais qui abattent un boulot de dingue. Des métiers très difficiles. Ça donne envie de les aider. Il faut les aider."
 

Si un cafetier doit espacer ses tables d'au moins un mètre, son chiffre d'affaires chutera de moitié


C'est d'abord le désengagement des acteurs de l'assurance qui choque Gérard Depoorter. Quasiment toutes les entreprises du secteur, grandes ou petites, ont été lâchées par leurs assureurs... le coronavirus et le confinement ne figurant pas "noir sur blanc" dans les contrats. "Mais ça commence à bouger, se félicite Gérard Depoorter. Le Crédit Mutuel et sa filiale CIC viennent de décider d'indemniser une partie des pertes d'exploitation de leurs clients (à hauteur de 200 millions d'euros). Axa bouge un peu (l'assureur est revenu sur sa décision de résilier le contrat d'un restaurateur rennais couvrant la perte d'exploitation). La pression du Président et du Gouvernement sur les assureurs commencent à se faire sentir. Il était temps."
 
Dans un communiqué, l'UMIH évoque le "devoir moral" des compagnies d'assurances qui éviteraient bon nombre de faillites et beaucoup de chômage si elles n'indemnisaient que 30% des pertes. Les chiffres donnent le vertige : chaque semaine confinée, le secteur du tourisme perd en France 3 milliards d'euros, dont la moitié pour les cafés, les hôtels et les restaurants. 

Au niveau local, Gérard Depoorter frappe à toutes les portes. "J'ai demandé à Martine Aubry la permission d'élargir les terrasses. C'est vital. Si un cafetier doit espacer ses tables d'au moins un mètre, son chiffre d'affaires chutera de moitié et cela ne sera plus rentable. Il n'aura même pas intérêt à rouvrir. En revanche, si son voisin est un parfumeur ou un coiffeur qui ferment à 19 heures, on peut imaginer qu'il puisse en profiter, le soir, pour étendre sa terrasse."  


On veut également savoir ce qui attend nos saisonniers


Le patron régional de l'UMIH a sollicité également Damien Castelain, le président de la Métropole Européenne de Lille (MEL) pour baisser ou annuler différentes taxes: taxe des enseignes, taxe de séjour, taxe de ramassage des poubelles... "Ce sont autant de frais qui s'accumulent, alors que les recettes sont à zéro. Restent aussi les questions qu'on se pose à propos de la Braderie de Lille et des Marchés de Noël. Annulation ou pas ?"

Pour Gérard Depoorter, la semaine qui s'annonce est importante. La profession va ainsi multiplier les démarches tous azimuts. "C'est à nous d'être à l'initiative. Comme le fait par exemple le groupe hôtelier Accor en association avec le cabinet de certification Bureau Véritas." A la fin de ce mois, Bureau Véritas proposera au groupe Accor (N°1 en France et N°6 dans le monde) toute une série de nouvelles procédures sanitaires à mettre en place dans les établissements à partir du 11 mai. L'idée, c'est que ces établissements, une fois labellisés, retrouvent la confiance des clients. "Et la bonne idée, précise Gérard Depoorter, c'est que les indépendants, qui n'ont pas la trésorerie d'un grand groupe comme Accor (créé dans le Nord, à Lesquin, en 1967) puissent eux aussi utiliser ce nouveau label." 

"Le gouvernement nous promet une campagne de com pour inciter les français à passer leurs vacances d'été en France ?, reprend le patron régional de l'UMIH. OK... mais on veut savoir exactement quels moyens il est prêt à y mettre. On veut également savoir ce qui attend nos saisonniers, avec qui les contrats avaient été signés bien avant le confinement (5 à 6000 sur la Côte d'Opale). On veut savoir ce qu'on fait de nos jeunes en contrat d'apprentissage. Les négociations avec les banques, avec les propriétaires, avec l'administration... C'est sans fin..."

"Je sais que c'est compliqué, admet Gérard Depoorter qui n'accable pas celles et ceux qui sont aux manettes. Sans les flatter, je leur fais confiance. On n'a rien vu arriver. On n'a jamais connu ça. On ne peut donc pas comparer. Mais je veux seulement rappeler au gouvernement que les hôteliers jouent le jeu durant le confinement, quand ils accueillent (parfois gratuitement) des "soldats blancs", des patients infectés par le virus, des routiers, des personnels du BTP qui travaillent sur les grands chantiers, des SDF. Je crois qu'on s'en sortira avec nos coeurs. Il faut inventer."
 
Coronavirus et restaurants
Le Gouvernement prend une série de nouvelles mesures pour aider le secteur de l'hôtellerie, des cafés et de la restauration. Les principales sont :
- le report du paiement des charges sociales et patronales pour au moins les mois de mars, avril et mai.
- le report des charges et taxes fiscales (la TVA doit en revanche être payée)
- la suspension auprès des banques des remboursements de crédits, pour six mois, sans frais.

A partir du Premier juin, renforcement du fonds de solidarité :
- pour toutes entreprises jusqu'à 2 millions d'euros de CA (1 million auparavant)
- jusqu'à 20 salariés (10 auparavant)
- plafond relevé de 5000 à 10 000 euros
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