de
Daniel Dassonville est physionomiste depuis 30 ans à Lille. Plus connu sous le nom de "Danny", le doyen des "videurs" lillois a lancé l'idée d'une mobilisation des professionnels de la nuit du quartier Massena-Solférino, où s'est produit la tuerie du week end dernier.
A sa grande suprise, la volonté de rendre hommage aux victimes de la fusillade du Theatro s'est exprimée au delà du monde des discothèques et des bars. Pharmacies, restaurants, tabac-presse ont également répondu à l'appel.
Vendredi 13 juillet, l'opération "enseignes éteintes" donnera donc une couleur insolite à ce haut lieu de la vie nocturne lilloise.
Daniel Dassonville, à l'initiative de cette opération, répond à nos questions.
France 3 : Comment vous est venu l'idée d'une mobilisation des commerçants du quartier ?
Daniel Dassonville : Nous nous connaissons tous. Nous avons tous été très choqués par ce qui s'est passé au Theatro, par le fait aussi que deux collègues font partie des blessés.
Nous voulions témoigner notre solidarité et notre émotion. La surprise, c'est que tous les commerçants se sont joints à notre démarche.
France3 : La fusillade du week end dernier, c'est le signe d'une montée de la violence dans ce quartier de la vie nocturne ?
DD : En pleine saison (NDLR de septembre à juin), le quartier Massena-Solférino, ce sont 10 000 personnes par nuit les vendredis et samedis, avec 5 clubs qui ferment à 7h, et des bars ouverts jusqu'à 3h. Dans ces établissements, il y a très peu de bagarres. Le problème ce sont ceux qui traînent dans les rues. Ceux qu'on appelle entre nous les trois "ettes" comme "casquettes, survets, baskets", qui se montrent souvent d'emblée agressifs, nous insultent, nous menacent. Nous le vivons tous les soirs.
France 3 : Ne pensez-vous pas qu'une certaine discrimination à l'entrée des établissements exacerbe les comportements violents ?
DD : Moi et la plupart de mes collègues, nous nous défendons de toute discrimination raciale. Le problème, c'est l'agressivité immédiate, qui nous amène à refuser l'entrée à tel ou tel. Il y a aussi le problème des night shops qui se sont beaucoup développés dans le quartier et qui vendent de l'alcool pas cher. Du coup, ces jeunes sont d'autant plus agressifs qu'ils boivent beaucoup. Le problème concerne d'ailleurs aussi les filles, et ça pour nous, c'est un choc.
France 3 : quelle mesure faudrait-il prendre selon vous ?
DD : Hier soir, des CRS ont patrouillé dans le quartier. C'est très bien sauf que je suis venu leur dire qu'il était inutile de venir à 20h. C'est à partir de minuit - 1h qu'ils devraient être là, et rester dans le quartier jusqu'à 7h, au moment de la fermeture des clubs. Et cela tous les week ends et toute l'année. Il faut savoir que nous n'avons aucun moyen de nous défendre, pas de gilet pare-balle, pas le droit d'utiliser une bombe lacrymogène. La seule défense que nous avons contre des personnes violentes, c'est notre propre solidarité de physionomistes.
Fayçal Mohktari, l'auteur présumé de la fusillade et son complice Djelloul Cherifi ont été arrêtés hier à Figueras en Espagne. Les circonstances de leur arrestation sont développées dans notre dernier reportage sur ce drame qui a coûté la vie à deux personnes, et fait quatre blessés.
Le reportage d' Hélène Bossy et Frédéric Elhorga
A lire aussi :
Fusillade de Lille : une marche blanche dimanche
Discothèque de Lille : qui est Fayçal Mohktari ?
Fusillade de Lille : où en est l'enquête ?
Fusillade de la discothèque de Lille : témoignages