"Je pense fort à elle très souvent" : Gisèle Pelicot est devenue l'icône de cette génération post Me Too

Dans son dernier film, "les femmes au balcon", présenté à Cannes 2024, la réalisatrice marseillaise aborde le thème des violences faites aux femmes et les agressions sexuelles. Lors d'un entretien pour l'émission "Abdoul fait son cinéma", l'actrice-réalisatrice est revenue sur le procès des viols de Mazan, et sur la figure emblématique de Gisèle Pelicot qui malgré elle devient la porte-parole de toutes les femmes dans le monde, victimes d'agressions sexuelles.

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Gisèle Pelicot, depuis l'ouverture du procès des viols de Mazan, le 2 septembre dernier, s'est muée en symbole de la lutte contre les violences faites aux femmes. Avec son souhait de ne pas laisser le procès à huis clos, pour que "la honte change de camp", elle est devenue aussi la porte-parole des femmes agressées sexuellement, des victimes de soumissions chimiques. Cette retraitée de 71 ans, droguée à son insu, a été livrée par son ex-mari à des dizaines d'inconnus qui l'ont violée. Dans son film, tourné à Marseille, la réalisatrice Noémie Merlant, parle des violences sexuelles et de ces hommes qui refusent de reconnaître leur culpabilité ou qui minimisent les faits, dans une comédie d'horreur-fantastique à la tonalité très féministe. 

"Je la trouve d’une d'une force extraordinaire"

Dans son film, les hommes en prennent pour leur grade. 

"Tous les hommes sont cauchemardesques, car le film parle uniquement des femmes et des agressions qu’elles subissent. Il faut y aller à fond ! Ce n’est pas un film dans lequel je vais chercher à montrer tous les hommes, encore moins les gentils. Je ne pouvais pas faire dans le politiquement correct ! Le but, c’était vraiment que les hommes se remettent en question, fassent une projection sur eux-mêmes", déclarait la réalisatrice à TOUMA.

Le film a été tourné à Marseille en plein été 2023, et bien que l'affaire Pelicot eût déjà été révélée, la réalisatrice n'a pas cherché à parler de cette histoire en particulier. La fiction vient juste télescoper la réalité "dans une période post-me too, où la parole de femme est libérée", détaille la réalisatrice.

Lorsqu'on évoque Gisèle Pelicot, Noémie Merlant est émue,“c’est tellement terrible ce qui lui est arrivé, je la trouve d’une d'une force extraordinaire. Je la trouve très digne et en même temps, je ne juge pas toutes les femmes qui n'arrivent pas à se battre de cette manière-là. Mais c'est aussi pour ça que je la remercie et que je pense fort à elle. Je pense fort à elle très souvent, elle donne beaucoup de force et d'espoir."

"Le déni, les mensonges, les excuses, mais jamais d'aveu"

Le plus révoltant pour la réalisatrice, que ce soit lors du procès des viols de Mazan ou dans la vie de tous les jours, c'est le manque de courage des hommes, des agresseurs, des violeurs qui minimisent les faits, qui sont dans le déni, qui n'assument pas. 

"Quand on voit tous ces hommes qui disent, ne pas s'être rendu compte qu'ils ont violé ou que c'est parce que le mari était consentant, forcément, elle aussi. À toujours trouver une excuse et finalement ne jamais avouer, ça montre l'ampleur du problème", insiste Noémie Merlant.

D'ailleurs sans dévoiler le film, à un moment donné, le personnage de Nicole, une des trois femmes, se retrouve face à des dizaines d'hommes, comme au procès et tente de leur faire avouer leurs crimes.

"C'est vrai qu'à un moment donné, Nicole parle à peu près au même nombre d'hommes, c'est-à-dire un nombre assez conséquent d'hommes agresseurs, et à qui elle pose cette question, 'qu'est-ce que vous avez fait ? Dites-le ?' C’était une séquence forte à tourner", décrit Noémie Merlant.

Et comme au procès des viols de Mazan, les hommes minimisent "c'est une scène où ils disent, 'Bah non non, je n'ai rien fait, il ne s'est rien passé, non mais c'est elle', c'est un peu la même chose. Il n'y a aucun agresseur, aucun violeur, qui avoue qu'il a violé. Ils se disent toujours innocents, c'est toujours parce qu'il n'a pas compris ou parce que c'est la faute de la victime d'une manière ou d'une autre, comme si ça n'arrivait jamais. C'est ce qui manque dans la réalité, c'est l’aveu".

L'actrice pointe du doigt cette réalité. " Ne me dites pas qu'il n'y a aucun violeur. Ce n'est pas la réalité. Femme ou homme d'ailleurs, on est quand même énormément nombreux à avoir subi des viols. Donc c'est bien que quelqu'un est à l'origine. Il y a des personnes qui violent donc, mais il n'y a pas cette parole de l’aveu. Et dans mon film, ça, c'était très important. Et c'est pour ça que oui, il y a ce moment où Nicole a juste besoin de l'entendre, besoin de l'écrire, besoin de le dire à ses amies. 'Oui, ils ont avoué'."

Trois femmes et une libération

Le film parle de trois colocataires femmes à Marseille pendant la canicule. Une intrigue se noue avec le voisin d'en face avant que les choses prennent une tournure plus noire. Elles se retrouvent coincées dans une affaire terrifiante et délirante avec, comme seule quête, leur liberté.


Article rédigé avec Abdoul Kouyate et Nicolas Debru de France 3 Provence-Alpes

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