Ancien journaliste à France 3 Nord-Pas-de-Calais, Gilles Jacquier a été tué en Syrie, en tournage pour Envoyé Spécial.
Kosovo, Afghanistan, Algérie, révolutions arabes, Gilles Jacquier, grand reporter de France 2 tué mercredi à Homs, dans le centre de la Syrie, à l'âge de 43 ans, a couvert la plupart des conflits des 20 dernières années et obtenu le prix Albert Londres pour des reportages lors de la seconde Intifada.
Selon un photographe de l'AFP qui se trouvait sur place, un obus est tombé sur un groupe de journalistes qui se trouvait en reportage dans cette ville, haut lieu de la contestation. Selon un communiqué de la direction de France Télévisions, Gilles Jacquier était "en mission autorisée par le gouvernement syrien", avec un autre journaliste de France 2, pour un reportage destiné au magazine de la rédaction "Envoyé Spécial".
Né le 25 octobre 1968, ce passionné d'images depuis sa plus tendre enfance, démarre sa carrière comme journaliste reporter d'images (JRI) dans une chaîne locale à Annecy en 1989, TV HUIT Mt Blanc.
Deux ans plus tard, il entre à France Télévisions, au sein de la rédaction nationale de France 3 Lille, pour laquelle il réalise déjà un reportage à Gaza, "Les cartables de la paix". En 1994, il rejoint la rédaction nationale de France 3.
Il sillonne le monde, couvre les Jeux olympiques d'hiver de Lillehammer, de Nagano, le Festival de Cannes, les élections en Afrique du Sud.
Mais surtout, caméra sur l'épaule, Jacquier couvre tous les conflits depuis les années 1990, à commencer par celui du Kosovo. Suivront la République démocratique du Congo (ex-Zaïre), l'Algérie, la Côte d'Ivoire, Haïti, l'Irak, Israël, la Palestine, jusqu'aux révolutions arabes.
"J'ai horreur de la guerre mais sur ces terrains, je peux faire de vraies rencontres.
Le plus souvent les gens sont eux-mêmes, très sincères face à une caméra et on ne peut rester insensible à leur souffrance", racontait le journaliste dans une interview.
"Moi, j'aime surtout filmer les gens au plus près de l'action, avec leurs émotions
et sans voyeurisme", ajoutait-il.
Jacquier dit avoir vu la "mort à grande échelle, avec des trous béants et des dizaines de cadavres arrivant sur des brancards et jetés là toutes les heures".
Il est particulièrement bouleversé par les massacres en Algérie dans les années 1990 et dans la jungle de Kisangani au Zaïre, avant la chute du Colonel Mobutu en 1997.
En 2003, Jacquier obtient le prestigieux prix Albert Londres avec Bertrand Coq, autre grand reporter, pour sa couverture durant la deuxième Intifada.
"Gilles était un excellent reporter de guerre, il n'avait peur de rien, avait un côté casse-cou mais ne prenait jamais de risques inconsidérés", témoigne Bertrand Coq, interrogé par l'AFP.
Lors des reportages à Naplouse, Jacquier est blessé. "Une balle avait pénétré par le côté de son gilet pare-balles et l'avait touché à la clavicule. La balle avait été extraite par un médecin suisse à l'hôpital de Naplouse", se rappelle Bertrand Coq.
Féru de sport, ancien champion de descente à ski, le grand reporter "mettait dans son travail tout l'acharnement, tout le talent et toute la motivation d'un grand sportif. Il ne rentrait jamais sans les images. Jamais", souligne Bertrand Coq.
"Gilles était un des meilleurs de France 2, un homme hors norme, on est tous sous
le choc, il va beaucoup, beaucoup nous manquer", a déclaré Thierry Thuillier, directeur de l'information du groupe France Télévisions.