Une enquête interne a été ouverte à l'hôtel de police de Lille. En cause, des suspicions de pratiques douteuses...
"C'est une petite bombe...", affirme un syndicaliste. L'affaire mise au jour la semaine dernière à l'hôtel de police de Lille risque de faire du bruit. Parce qu'elle concerne des policiers, dont certains haut gradés. Qu'elle écorne leur image. Que la direction départementale de la sécurité publique du Nord s'en serait bien passé.
Au départ, un petit arrangement : des objets -vélos, cyclos, cuivres, radiateurs...- récupérés lors de constatations, perquisitions ou sur la voie publique par les forces de police sont parfois (quand ils ne peuvent être vendus aux domaines, procédure normale pour ce type d'objets) revendus au profit du service plutôt que détruits. Avec l'argent de ces ventes, se constitue une sorte de "caisse noire", cagnotte, qui sert à "améliorer l'ordinaire", "repeindre les locaux ou acheter du petit matériel"...
Une pratique illégale mais qui serait courante dans certains commissariats, organisée par des membres de la hiérarchie, officiers ou commissaires. Avec cette pratique, des revendeurs de scooters ou de vélos, des ferrailleurs se fournissaient parfois directement à l'hôtel de police !
"Moralement, on ne peut pas condamner...Il y a un tel manque de moyens qu'il faut trouver des astuces...", nous raconte un syndicaliste. Dans certains services, tout est consigné dans un cahier par le chef de service : entrées, sorties en toute transparence... On parle de 1000 à 1500 euros par mois environ en liquide...
Mais selon nos informations, ce "système" qui existe notamment à Lille, Roubaix et Tourcoing, aurait dérapé à certains endroits ces dernières années ou derniers mois... D'abord parce qu'au lieu d'être utiles à tout le service, certaines reventes se seraient faites au profit de certains policiers, d'achats injustifiés ou d'organisations de pots ou repas... Ensuite parce que certains objets qui devraient être mis en vente aux domaines seraient "confisqués" directement pour être revendus. Voire pire...
Dérapage ?
Une histoire récente, racontée par un syndicaliste, aurait fait beaucoup de bruit en interne. Un officier appelé dans une maison pour constater un décès aurait saisi un ordinateur portable pour les besoins de l'enquête. Peu de temps après, le fils du défunt retrouve l'ordinateur en vente sur ebay ! Appelé à s'expliquer, l'officier aurait affirmé l'avoir acheté sur le bon coin. "Une version étrange mais validée par sa hiérarchie. ", raconte une source proche du dossier.
Le "système" a-t-il dérapé ? Toujours est-il qu'une enquête interne a été diligentée pour tenter de cerner les responsabilités. Et le Directeur Départemental de la Sécurité Publique du Nord nous a confirmé avoir demandé que cesse purement et simplement le système de "caisse noire". D'ores et déjà, 3 commissaires ont été entendus par l'IGPN. Une procédure disciplinaire est en cours. Pour l'instant, le Parquet attend la fin de l'enquête pour éventuellement envisager des poursuites judiciaires.
Selon un syndicaliste, l'affaire "gêne" à tous les niveaux : "Il y une volonté que ça ne se sache pas. La direction centrale à Paris ne veut pas que cette affaire sorte. Après l'affaire Carlton..."
D'après des sources policières, cette affaire "sent également le règlement de comptes visant un commissaire de police" soupçonné d'organiser les reventes. L'enquête est en cours et les faits sont donc en cours de vérification.
Mais aujourd'hui, un autre syndicaliste se dit presque content que l'"affaire sorte" et affirme qu'il faut en profiter pour clarifier la situation. "On ne peut pas admettre que de l'argent liquide circule dans les commissariats. Nous devons respecter la loi. Point. Revendre des objets provenant d'un vol, c'est du recel...Si on a besoin de matériel, qu'il nous donnent du budget. Que peuvent penser les citoyens d'un tel système ?"
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