On ne parle pas d’un pic de chaleur mais plutôt d’un “petit coup de chaud”, pour ce début du printemps 2024. Le climatologue Alain Moreau revient sur les températures du mois de mars, l’hiver très chaud et les inondations.
Un premier jour de printemps tout doux… Avec des températures entre 17 et 18 degrés et du soleil. Faut-il s’inquiéter de ce revirement météorologique, après des semaines de grisaille ? Alain Moreau, ingénieur des travaux de la météorologie à Météo France, spécialiste de la région Hauts-de-France, répond à nos questions.
Faut-il s’étonner de la douceur des températures en ce premier jour du printemps ?
"Les températures sont douces mais il n’y a rien d’exceptionnel. Le mois de mars est traditionnellement un mois de contraste car le soleil commence à être fort. Aujourd’hui à Lesquin, la température est montée jusqu’à 18,3°C. Sur la région, on a 17-18°C à peu près partout, sauf sur la côte. C’est confortable, mais on est très loin des records, même si ça peut évoluer.
Pour vous donner une idée, les records pour Lille ont été établis le 31 mars 2021 : les températures avaient atteint 24,8°C. Pratiquement toutes les autres stations des Hauts-de-France avaient enregistré des températures entre 23 et 25°C ce jour-là."
Ce printemps doux succède à un hiver particulier…
"Là, il y a en effet une période de douceur. Mais ce qui est exceptionnel, c’est surtout qu'elle fait suite à des mois sans discontinuer de températures au-dessus des normales de saison. Le mois de février 2024 a été le plus chaud jamais enregistré dans les Hauts-de-France. En gros, l’hiver a duré une quinzaine de jours : de début janvier au 18 janvier. Ensuite, on a juste eu trois jours un peu froid début février… Plus largement, en France, cette année 2024 a été marquée par le troisième hiver le plus chaud jamais enregistré – derrière 2016 et 2020."
Peut-on parler d’un pic de chaleur ?
"Selon les normales de saison, les températures devraient se situer autour de 12-13°C, donc on est 5°C au-dessus. Pour parler de pic de chaleur, il faut qu’on soit à plus de 5°C pendant trois à cinq jours de suite. En l'occurrence, ça ne va pas durer : on a juste un petit coup de chaud mais rien d’exceptionnel.
Au mois de mars on peut avoir des légers pics de chaleur, puis des températures qui baissent… En 2013 par exemple, on a déjà eu 16-17°C à Lille : un petit coup de chaud…Juste avant un épisode de neige, avec cinq à dix centimètres !"
Donc ça ne va pas durer ?
"Non. Ce week-end, on peut s’attendre à un coup de froid, avec des températures autour de 8 à 10 degrés, en dessous des normales de saison. Et ces températures risquent, forcément, d’être accompagnées d'un ciel d’averse. Ça ne devrait pas durer mais il faut toujours être prudent avec la météo."
Faut-il s’inquiéter de ces températures agréables ?
"On prend l’habitude de températures très douces. Ce premier jour de printemps, il y a trente ans, aurait été exceptionnel. Maintenant, ça ne l’est plus. C’est tout le problème. C’est ça qui est dangereux avec le réchauffement climatique : on oublie très vite ce qu’il s’est passé avant. On s’habitue très vite aux hivers qu’on a depuis une dizaine d’années, à ces températures douces. Alors que ce n’est pas sans conséquences : la vermine est moins tuée l’hiver et on risque aussi des gelées tardives qui vont poser problème aux horticulteurs et aux agriculteurs – comme en 2021."
Qu’en est-il des précipitations ? Les crues sont-elles derrière nous ?
"Pour l’instant il n’y a pas vraiment de signal stable durable, donc rien n’est sûr. Il n’y a pas de très grosses pluies en vue mais pas non plus un temps très sec qui va s’installer. On a eu quelques jours assez secs, ça faisait longtemps que ça n’était pas arrivé. Mais les pluies vont sûrement reprendre vendredi ou samedi… C’est très compliqué à prévoir à plus long terme."