Mais au fait, que devient Lille capitale mondiale du design ?

Après Mexico, Séoul, Turin ou Taïpei, cette année devait être celle du design dans la métropole lilloise. Une cinquantaine d'événements, des grandes expositions, et des "Maisons POC" *, d'un acronyme que nous n'avions pas encore eu le temps d'apprivoiser.

 

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Le lancement était prévu le 29 avril. Mais la fusée n'a pas décollé. Clouée au sol par le Covid-19. Alors que le déconfinement culturel commence à s'ébaucher, mais que les frontières géographiques restent fermées, comment relancer Lille capitale mondiale du design, une manifestation d'ampleur internationale ?
 

Un démarrage en septembre ?


"Pendant le confinement ? Nous avons continué à travailler", rassure Denis Tersen, le directeur général de Lille Métropole 2020 Capitale Mondiale du Design. Un conseil d'administration a d'ailleurs eu lieu ce mardi. "Il nous a été demandé de travailler sur la perspective d'une reprise physique en septembre 2020, en prenant compte bien sûr du nouvel environnement sanitaire, en repensant les jauges et les conditions de circulation dans les lieux qui recevront du public".

Le défi ? Concentrer et densifier les événements de la rentrée sur les 4 derniers mois de l'année. Revoir toutes les scénographies des expositions, les flux de circulation, la signalétique d'information des visiteurs, et surtout éviter toutes les interactions tactiles sur écrans dans les lieux d'exposition. Pas simple.

Autre difficulté : la gestion des plannings des lieux : un jeu de Tetris géant. "Forcément à la rentrée il va y avoir embouteillage entre tous les événements qui on dû être reportés. Nous sommes donc en train de voir chaque lieu pour voir comment combiner notre programmation avec leurs agendas."
 

Intégrer la crise sanitaire



Forcément, la crise sanitaire a un peu rebattu les cartes des propositions. "Dans les thématiques que travaillaient nos commissaires d'exposition avant la crise sanitaire, il y avait déjà cette notion du "care", qui nous engage à prendre soin des gens. Au-delà des problématiques de santé qui ont vraiment été au coeur de ce que nous avons vécu, il nous faut prendre en compte la situation actuelle dans nos démarches de design. C'est dans cet esprit que nous avons travaillé ".

Luther Quenum, le commissaire de la Maison POC "Action publique" qui prendra ses quartiers au Biotope, explique par exemple le besoin, "pour le monde d'après, de faire de façon moins verticale, et plus participative".

 

Mais la grosse problématique pour les organisateurs, c'est la défection physique des visiteurs étrangers qui étaient attendus sur l'événement. "On ne sait pas combien vont être en mesure de venir, à la fois les designers, mais aussi les visiteurs. Nous allons donc imaginer d'autres propositions, avec par exemple des événements "à distance", explique Denis Tersen.

Dans la métropole, de très nombreux acteurs culturels s'étaient mis à l'heure du design en programmant des événements autour de la thématique. La Villa Cavrois, le Louvre-Lens, le musée de la Piscine à Roubaix... Actuellement, ils gèrent chacun leur déconfinement et mettent en place les directives, parfois complexes, édictées par le ministère de la culture.

Comment vont-ils réintégrer le label "Lille design" ? "Nous sommes en train de remettre à jour toute la programmation", confirme Denis Tersen. Une ébauche de programme est prévue pour la mi-juin.
 

Les POC*, kesako ?

 

Il faut remonter à fin 2017 et la désignation de Lille comme capitale mondiale du design, pour comprendre la genèse des projets POC. L'idée, c'était de mettre à contribution les collectivités, associations, entreprises de la métropole, pour imaginer et expérimenter des projets de design. Les POC, ou Proofs Of Concept, portent sur des sujets aussi divers que l’habitat, l’économie circulaire, la ville collaborative. Ce sont des expérimentations imaginées pour améliorer le service aux métropolitains.

Aménagement d’un espace vert, transition écologique, conception d’une ferme urbaine agro-écologique... D'après les organisateurs, il y aurait 500 POC, qui devaient être présentés dans des lieux conçus comme des laboratoires d'expérimentation : les fameuses "maisons POC"

5 lieux ont été retenus :
  • le Monastère des Clarisses à Roubaix
  • La Chaufferie Huet à La Madeleine
  • La Maison Folie Wazemmes (MFW)
  • Le Bazar Saint-So
  • Le Biotope (nouveau bâtiment de la MEL).


 
Quentin Carnaille, un designer à l'arrêt
On se souvient forcément de ses cubes en miroir, dont il avait affublé plusieurs statues de Lille. Quentin Carnaille, designer lillois, est lui aussi mobilisé pour Lille Design. Mobilisé, mais à l'arrêt.

Depuis deux mois, il met tout au conditionnel. Les projets comme les budgets. Dans ses cartons, "Immersion", une construction de pavillon-miroir en forme de cube de 5 mètres de côté. Une réflexion (réflection) sur l'architecture symétrique et sur la disparition. "J'y travaille depuis 6 mois, en partenariat avec l'atelier Thomas Coldefy qui m'a accompagné à titre gratuit. Pour moi, Lille Design c'était une opportunité . Je leur ai donc proposé de l'exposer, sachant que j'avais un mécène belge qui était prêt à me le financer.  Ensuite l'objectif c'était de le faire tourner dans le monde entier. "

Une oeuvre clé en mains, construite et financée par du mécénat, qui avait donc reçu le label "Lille design". Un projet à 650000€ quand même, qui devait encore trouver son point de chute : Saint-Sauveur ou le Musée des Beaux-Arts de Lille. Sauf que..."J'avais envoyé le dossier à mon client la veille du confinement. Depuis, je n'ai plus de nouvelles. Il habite en Belgique et les frontières sont toujours fermées. Pour le moment, il n'est pas revenu vers moi, donc je suis dans l'attente. Economiquement c'est compliqué, même si j'ai la chance d'avoir de la trésorerie".

Et que dit l'organisation de Lille Design? "Ils sont comme moi, ils attendent". Et en attendant, beaucoup de questions se posent pour adapter son oeuvre aux nouvelles normes sanitaires. "Ça risque d'être compliqué avec les mesures barrières. Le cube est sensé recevoir 5 personnes en même temps. On fera une personne à la fois..."

Hier, Quentin Carnaille a eu confirmation que l'agenda des manifestations reprendrait en septembre. Mais quoi qu'il en soit, il lui faudra un minimum de 6 mois pour construire son cube. Seule certitude aujourd'hui : un contrat signé avec le MUBA Eugène Leroy à Tourcoing pour l'exposition d'un de ses tableaux, "Infini 2", et la réouverture du Musée d'histoire naturelle où il exposera sa série "Vestiges".

 
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