Le député du Nord et ancien maire de Roncq Vincent Ledoux est désormais à la tête d'une mission de six mois mandatée par le gouvernement. Il va s'intéresser de très près au phénomène du retrait-gonflement des argiles, phénomène à l'origine des nombreuses maisons fissurées.
Les Hauts-de-France ont connu le mois de février le plus sec depuis les années 1950 et le département du Nord est d'ores et déjà placé en vigilance sécheresse. Ce phénomène attribué au réchauffement climatique a créé une situation de castastrophe naturelle devenue récurrente : celle des maisons fissurées.
En effet, les maisons construites sur les sols argileux sont confrontées au retrait-gonflement des argiles (RGA) qui fait dangereusement bouger leurs fondations. Dans les Hauts-de-France, les assureurs ont enregistré, depuis 2012, des dizaines de milliers de dossiers de particuliers dont les habitations sont victimes de cet effet domino.
Le dossier pèse lourd sur les particuliers mais aussi sur les assurances, qui craignent un déséquilibre budgétaire de grande ampleur. Le député du Nord Vincent Ledoux vient donc d'être mandaté par le gouvernement pour mener une mission de six mois sur la question. Un vaste état des lieux qui vise aussi à chercher des solutions concrètes.
Quelle ampleur prend aujourd'hui le phénomène du RGA ?
Vincent Ledoux : Cela touche à peu près la moitié du stock de maisons actuelles en France. C'est juste énorme, pas une métropole n'y échappe. C'est une part substantielle du risque assuranciel aujourd'hui parmi les catastrophes naturelles.
J'avais fait faire dans mes précédents mandats un rapport de la Cour des comptes, qui constate que le RGA représente 36% de la sinistralité des catastrophes naturelles. Entre 1989 et 2019, il y a eu environ 20 gros événements en France qui ont été très coûteux, et 11 d'entre eux concernaient le retrait-gonflement des argiles. La Cour des comptes estime aussi que le coût moyen pour un sinistré s'élève à 16 300 euros, et on me dit lors de mes premières auditions que ce chiffre serait en-dessous de la réalité.
La Cour des comptes estime aussi que le coût moyen pour un sinistré s'élève à 16 300 euros, et on me dit lors de mes premières auditions que ce chiffre serait en-dessous de la réalité.
Vincent Ledoux
Quel est le premier objectif de cette mission ?
C'est de porter une attention toute particulière aux personnes qui sont les plus vulnérables, qui sont confrontées à ce phénomène et qui peinent à trouver une indemnisation. Cela se fait dans le cadre de la reconnaissance de catastrophe naturelle et c'est un phénomène qui nécessite une reconnaissance pour toute la commune.
C'est très long et en plus, dans ce cas particulier, c'est difficile à déterminer car on est face à un phénomène insidieux, qui s'opère dans le temps. Ce n'est pas comme un raz-de-marée sur la côte.
Il y a aussi tous ceux qui tombent en dehors de cette reconnaissance de catastrophe naturelle, on va regarder ça de très près. Le volet indemnisation et prise en charge des sinistrés est prioritaire, et il active plusieurs leviers. D'abord, celui des assurances, puis celui de la solidarité nationale. Il faut qu'on arrive à trouver un équilibre pour faire tenir le système.
Y a-t-il d'autres chantiers prioritaires ?
Le deuxième chantier, c'est la prévention. On a fait des progrès sur ce qui ce construit mais il s'agit de savoir si on informe bien et suffisamment depuis le permis de construire jusqu'à la fin des travaux.Je veux que l'on répertorie toutes les solutions techniques qui existent aujourd'hui.
L'idée, c'est de réduire les coûts en faisant marcher l'intelligence collective. Il faut qu'on aille chercher des solutions auprès des scientifiques, auprès de nos voisins européens et même plus loin. Je sais qu'au Sénégal, le nouvel aéroport de Diamniadio a été construit sur une zone argileuse dans une géographie de stress hydrique. Ils ont sans doute des choses à nous apprendre.
Il faut qu'on aille chercher des solutions auprès des scientifiques, auprès de nos voisins européens et même plus loin.
Vincent Ledoux
Enfin, on veut aussi s'intéresser aux municipalités. J'ai été maire et j'ai été confronté au montage des dossiers de catastrophe naturelle, je pense qu'il y a des gros progrès à faire. Ça passe notamment par améliorer la communication entre les sinistrés et les collectivités, et entre les collectivités et l'Etat.
Six mois, est-ce un temps suffisant ?
C'est un chantier immense, je suis à plein temps dessus et je pense que six mois, ce sera juste assez pour produire quelque chose. C'est en plus fortement attendus par tout ceux qui sont sinistrés, qui ne savent pas comment faire, qui sont en litige avec leur assurance...
Je veux qu'on puisse créer des connexions entre la recherche et la pratique. Il faut que cette mission ne soit pas seulement une succession d'auditions mais qu'on puisse faire interface entre le monde de la recherche, les constructeurs, les pouvoirs publics... C'est nécessaire pour formuler des propositions qui tiennent la route.