Covid-19 : les entreprises textiles restent avec leurs masques sur les bras après avoir répondu à l'appel à l'aide

Il y a quelques mois, l'épidémie de Covid-19 touchait la France. Le manque de masque a poussé le gouvernement à lancer un appel à l'aide. Des centaines d'entreprises textiles ont répondu présent. Mais avec l'arrivée en trombe des masques jetables, elles se retrouvent avec leur stock sur les bras. 

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"Il nous faut produire davantage en France", déclarait le président de la République, Emmanuel Macron, lors d'une allocution télévisée le 31 mars dernier. Dans le Nord, de nombreuses entreprises textiles ont pris cet appel au pied de la lettre et ont orienté leur production textile vers la fabrication de masques. Des mois après, elles sont nombreuses à se retrouver avec des milliers d'invendus sur les bras. 

Bertrand Avio a investi 500 000 euros dans la production de ces masques textiles lavables. Depuis le début de la production, son chiffre d'affaires n'est que de 20 000 euros. "On a de quoi réaliser 3,8 millions de masques et en stock, on en a 70 000 : 35 000 pour les adultes et 35 000 autres pour les enfants."

"On a voulu être conforme à nos valeurs, et c'est ce sens de l'engagement qui est en train de nous porter préjudice. C'est difficilement compréhensible pour nous que le ministère de la Transition écologique ou encore le Sénat lancent des appels d'offre pour des masques jetables", reconnaît, dépité, le gérant de la société Avio. 

Une déception partagée par Sébastien Dessolle, directeur de Cambrai Broderie : "Vous avez ici l'équivalent de 300 000 masques sanitaires possibles qui se retrouvent stockés."

"Il y a des besoins en masques, mais on a complètement abandonné les entreprises textiles, pourtant premières à se lancer sur cette production. On a été mis de côté au profit de l'importation", s'énerve-t-il. 

Des masques jetables importés de l'étranger qui font concurrence

Alors que de nombreuses industries textiles peinent à trouver des débouchés, des millions de masques chirurgicaux et FFP2 sont effectivement livrés de Chine et arrivent par cargos dans le port de Dunkerque.
Jetables, ils représentent un concurrent redoutable pour les masques en tissus. "Quand on est dans ce consommer-jeter, on n'est pas dans une démarche pertinente", estime Bertrand Avio qui produit des masques garantis 50 lavages.

Il propose un calcul : "Si vous achetez des masques lavables pour 9 000 salariés, à raison de 10 masques par semaine par personne sur 9 semaines, vous arrivez à 900 000 masques alors qu'avec les masques textiles lavables, on est sur une consommation de seulement 18 000 masques."

Entre les deux, une différence de 882 000 masques. "Acheter des masques textiles, c'est l'assurance de faire des économies, de pouvoir rendre les gens responsables et de les initier à cette démarche d'achat responsable, bonne pour l'environnement."

"Pour le moment, je ne comprends pas certains choix, je ne comprends pas que le gouvernement nous ait sollicité pour aujourd'hui privilégier les masques jetables, souvent issus de l'importation", dénonce Bertand Avio. 

L'exportation comme solution ?

"Il y a un coup à jouer, il y a une demande à l'étranger, car le Covid-19 touche de nombreux pays", estime Olivier Ducatillion, président de l'Union textile du Nord.

"Un débouché par l'exportation a été couronné de succès pour des entreprises textiles en Nouvelle-Aquitaine. Elles ont sensibilisé plusieurs ambassades et elles ont pu approvisionner un pays d'Amérique du Sud", soutient-il. 

Bertrand Avio pointe lui les difficultés pour une PME de se tourner vers l'export : "Il a fallu qu'on se débrouille par nous-même de A à Z. On avait contacté les ambassades et les consulats en Amérique du Sud, et ainsi de suite."

Aidé par les chambres de commerce et de l'industrie de Lille et d'Amiens, il a pu inscrire son entreprise sur des plateformes dédiées pour des mises en relation en Europe sans obtenir de résultats concrets pour l'instant. 

"Il y a des choses qui bougent, mais c'est trop tôt encore pour avoir des informations sérieuses", considère Bertrand Avio. "On est plutôt dans l'expectative.

Un Made in France écologique et au soutien de la filière textile délaissé

Surtout, il regrette le tournant loupé par le gouvernement : "Beaucoup ont été surpris que notre filière aussi dégradée et méconnue ait pu soulever de telles capacités de production pour une cause nationale, citoyenne. Ça aurait pu être une bonne impulsion pour accompagner notre filière qui a démontré son sens de l'engagement, ses capacités.""Si on le souhaite, on peut vraiment réaliser des produits made in France, sans coûts exhorbitants et en réduisant les coûts de logistiques, d'empreinte carbone", insiste le gérant de la société Avio. "Il faut appuyer notre production de masques et notre filière. On a montré que c'était possible sans passer par des subventions."
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