Assises du Nord : Redoine Faïd, conteur habile et passionné de sa violente évasion de prison

©@F3Nord

Le médiatique braqueur Redoine Faïd s'est présenté mardi en conteur habité au moment de livrer le récit parfois cocasse de sa violente évasion de la prison de Sequedin le 13 avril 2013, au deuxième jour de son procès devant les assises du Nord à Douai.

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Si son évasion n'avait pas impliqué la prise en otage de quatre surveillants, des coups de feu, l'explosion méthodique de plusieurs portes le séparant de la liberté et le renvoi de quatre présumés complices sur le banc des accusés, sa version aurait eu tout l'air d'un divertissement haletant, à l'image des films de Michael Mann dont le truand est adepte.

La présidente de la cour s'est cependant employée à lui rappeler la dangerosité et la gravité des faits, pour lesquels Faïd encourt 30 ans de réclusion criminelle, s'ajoutant aux 18 ans écopés en 2016 dans l'affaire du meurtre de la policière Aurélie Fouquet en 2010. "Fin mars 2013, j'ai eu l'opportunité d'un contact avec un détenu qui avait des armes et des explosifs, il m'a demandé si j'étais intéressé, vu mon profil de gangster", commence Faïd, 44 ans, crâne rasé, polo bleu ciel sur les épaules. "Vous nous prenez pour des idiots quand vous dites "j'ai juste trouvé un sac"", lui dira plus tard Me Pascal Winter, avocat d'otages parties civiles.



"Moi au début j'y croyais pas, ok on a une arme, des explosifs, mais c'est une forteresse", raconte Faïd. Le 13 avril, "je vais dans l'atrium, la famille est là au parloir, j'entre dans une cabine attenante. Je m'équipe, je mets une veste de survêtement confectionnée avec des pains d'explosifs scotchés pour le cas où les surveillants n'obtempéraient pas", relate Faïd. "Certes, je suis pas un ange, j'ai un casier, mais je ne suis pas un assassin, jamais il ne m'est passé par la tête de faire du mal à un surveillant", insiste-t-il.


"Film noir"

Il reprend : "J'ai sorti mon arme, j'avais cinq, six surveillants, la gradée a été la personne la plus proche et réactive, donc lorsqu'elle ma vu sortir l'arme elle a crié "il a un flingue, il a un flingue!" Je jugerais son comportement courageux, d'autre diraient que c'était inconscient, pas moi, car avec moi elle ne risquait rien."
Faïd dit tirer un coup de feu vers le bas "pour leur prouver que c'était une vraie arme et pas une arme en chocolat ou en savon".



Il conte ensuite avec force détails et expressions de son crû les explosions successives des portes et les précautions pour la sécurité des gardiens pris en otage. "J'avais un briquet pour amorcer la mèche (...), ça se déclenche en quinze secondes. J'ai fait sortir les surveillants car il y aura une onde de choc. En sortant je vois deux autres surveillants qui sont à l'ouest, pas du tout au courant du film, je leur dit "Dégagez ça va péter", y a eu une déflagration, ça m'a causé un son aigu aux oreilles".

Il dépeint aussi des scènes digne de théâtre de boulevard le mettant aux prises avec la surveillante gradée, décidément très "courageuse": "Je l'ai laissée partir, pas forcément comme un chevalier blanc mais je voulais pas de femme avec moi, interprétez ça comme vous voulez. (...) Plus tard, la gradée est revenue à la charge en me disant "Tu sortiras pas d'ici" j'ai crié "Dégagez-là je veux plus la voir!""


A l'issue de cette heure de "film", la présidente observe avec dureté: "Dit comme ça, vous nous avez raconté une histoire. Par exemple vous disiez "On", vous et les surveillants, "On ne pouvait plus sortir", etc... Euh, il n'y avait que vous qui vouliez sortir!" Mercredi matin, les gardiens pris en otage raconteront à leur tour leur histoire. Nudité forcée pour passer des barreaux, peur de la mort, traumatisme, séquelles auditives: le film risque d'être beaucoup plus noir.
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